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- L’analogie flottaison/natation ne fonctionne pas pour parler durapport entre oralisation-déchiffrage/lecture compréhension. Si laflottaison fait partie d’un champ de compétences lié àl’activité de natation, l’oralisation-déchiffrage n’est pasune compétence qui sert à l’activité de lecture-compréhension.C’est une mauvaise façon d’utiliser la combinatoire (qui bienentendu doit être construite), et trompeuse manière de présenterla lecture aux élèves, et un objectif très souvent dispendieux entemps de classe, empêchant d’autres pratiques, et mettant endifficulté à plus ou moins « bas bruit » (décrochage,incompréhension, dévalorisation...) une partie importante d’élèves(surtout ceux qui ne se sont pas construit les savoirs par ailleurs,dans leur environnement familial, ou dans d’autres pratiquesscolaires plus justes et émancipatrices)

- L’analogie avec les exercices de natation ne tient pas non plus.Ils ne pourraient se pratiquer, avec d’éventuels profits etbonheurs (et il faudrait les analyser précisément pour comprendreen quoi ils peuvent réellement être utiles), que lorsque lapersonne a déjà acquis un certain degré d’autonomie dans sonsavoir « nager » (respiration, flottaison, propulsion,équilibres...), ce qui passera par d’autres situations, d’autres« exercices ». Pour l’oralisation-déchiffrage Charmeuxutilise une analogie plus juste, celle de l’entraînement à faireles gestes de nage sur un tabouret. Certes, il y a bien des gestes àfaire (ou se muscler), mais dans l’eau ce ne sont plus les mêmes,et ils ne sont pas premiers, il y a bien d’autres compétences àconstruire et à utiliser de manière stratégique pour aller un vraisavoir-nager autonome.

- Oui il y a quantité de situations dans la classe (ou dans desprojets) qui pourraient devenir l’occasion d’une réelle lectureà haute voix. Mais pas avant une lecture compréhension (personnelleet collective), pas en ayant tous le même texte sous les yeux, paspour soi-disant contrôler la compréhension (il faut plutôtdemander de reformuler...). Pas non plus pour satisfaire des butscachés de cette pratique (et de beaucoup d’autres) : facile àpréparer, à gérer (avec une autorité-impositive etdiscipline-docilité), à pseudo-évaluer, et suprême bénéficesans besoin de formation (un guide et ça suffit).

- Oui vous avez raison de souligner la nocivité (supplémentaire)liée au dispositif d’oralisation-déchiffrage en grand groupe, etmême en petit groupe. Imaginez vous être celui qui balbutie aumilieu de ceux qui dorment, ceux qui ont déjà lu avec les yeux etleur raisonnement, et ceux qui espèrent échapper à l’humiliation.Car il y a perte de temps, certes, mais aussi tromperie et in fine« casse » des sujets.

- Oui heureusement qu’il y a d’autres objectifs et pratiques dansles classes (toutes?) avec des supports et situations de lecture(fictions, documentaires...) Mais dans quelle proportion ? Avecquel travail, quels savoirs ? Des occasions pour certains élèvesde faire du lien avec ce qu’ils font hors de l’école, pourd’autres de s’en sortir (du déchiffrage), de refaire du sens, dese servir de la combinatoire de manière stratégique...mais combienresteront piégés dans de fausses représentations, de faux-savoirsou difficilement utilisables, sans les savoirs utiles et irontgrossir les rangs des lecteurs en échec, en difficulté,médiocres...futurs citoyens «abîmés » dans leur estime etpouvoir de penser...Mais qui donc a intérêt à ce que celaperdure !

- « Forger pour devenir forgeron » n’est qu’unephrase dont on peut tirer tout et son contraire, elle n’est unponcif réducteur que pour celui qui veut le réduire. Personne n’aexclu le rôle de l’enseignant, ni les savoirs à seconstruire, ni le temps nécessaire...mais cela rappelle qu’il fautpenser pour chaque « âge » précisément les situationset les savoirs, afin que cela fasse sens dès le début etrégulièrement, qu’il faut du projet, de l’action complexe avecdu sens, de l’action qui pose problème et de la réflexion surcette action.

-Sur la fluence et lacompréhension : « S’il y a corrélation entre vitessed’oralisation (fluence) et compréhension, cela ne suffit pas àprouver la causalité et l’imposer comme condition préalable. »(Dans le document « Apprendre à lire oui mais comment ? ») « Si on peut comprendre queles lecteurs habiles soient aussi ceux qui ont le mieux automatisésl’usage du déchiffrage au service d’une lecture aisée etfluide, cette conjonction de compétences ne suffit pas à prouver laprécédence de l’habileté à déchiffrer sur la compréhension,sauf à instituer la corrélation en causalité : affaire deprudence et de rigueur intellectuelle... » (Jacques Bernardin,« Spécial lecture, lire c’est comprendre » gfen 28)

Autrement dit les« autorités » nous mentent, nous manipulent en tordant, faussant les conclusions scientifiques à leur convenance !

Pour avoir moins de « raccourcis »,pour inventer, développer et faire fructifier les idées et lespratiques intéressantes (lire c’est comprendre), pour réduire etsupprimer celles qui sont nocives (lire pour comprendre avecl’oralisation-déchiffrage), pour résister aux matraquage des« autorités » et de ceux qui ont intérêt à ce quecela perdure, pour résister aux fatalismes, aux réflexes depédagogie de survie... il faut vraiment aller lire les ouvrages deCharmeux, débattre avec des collectifs (mouvements pédagogiques...)pour mieux faire réussir tous les élèves.





De : fjarraud
Publié : mercredi 2 octobre 2019 07:36
Objet : Evelyne Charmeux : Oraliser un texte, ce n'est pas lire à haute voix

État d'approbation Approuvé 
 
Pièces jointes
Type de contenu: Message
Créé le 04/10/2019 23:36  par Alain Miossec 
Dernière modification le 26/11/2019 13:14  par fgiroud 

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