Salon de l'Education : et la formation des enseignants ? 

Le SE-UNSA organisait au salon de l’Education une table-ronde sur la formation des enseignants.
Elle fut l’occasion de croiser plusieurs points de vue.


AuducLelievreInterrogé à la tribune par Christian Chevalier, secrétaire national du SE-UNSA, qui dresse la liste des inquiétudes de son syndicat devant la réforme annoncée des IUFM, Claude Lelièvre, historien, attaque comme à son habitude bille en tête : "la vraie droite a toujours été rétive à l’idée de former les enseignants du public dans des organismes qui leur donnent à la fois de l’esprit de corps et de "promotion". Il y a quelques années, Fillon et Ferry avaient déjà le projet de supprimer les IUFM créés par la gauche. C’est d’abord une question idéologique avant d’être une question de moyens. « N’oublions pas que les réformes actuellement appliquées ne sont pas, contrairement à ce que dit X. Darcos, celles qui étaient dans le projet de l’UMP sur lequel N. Sarkozy a été élu ». Pour lui, à terme, le concours de recrutement est dans le collimateur, et on peut imaginer que le recrutement risque de se faire localement.
AuducLelievre"Cette réforme va revenir à la division des deux ordres" : si le primaire va sans doute continuer à appuyer la formation sur la vie de la classe, le second degré va revenir cinquante ans en arrière avec un corps strictement appuyé sur le disciplinaire. Cela va évidemment poser un problème de démocratisation : "Darcos est un prestidigitateur : en mettant la pression médiatique sur la maternelle ou les deux heures d'aide du primaire, il fait disparaître le collège et le socle commun, qui obligeaient à penser articulation des programmes de l’Ecole et du Collège". Tout espoir de nouvelle étape de la démocratisation est donc renvoyé aux calendes…

Jean-Louis Auduc, de l'IUFM de Créteil, ne veut pas se laisser enfermer dans les querelles de mots. Master ou non, là n’est pas la question, même s’il s’inquiète du refus du ministère de penser la mastérisation des enseignants de lycée professionnel. Pour lui, la volonté d’opposer l’université et les formateurs n’a pas de sens : « On est actuellement dans une urgence et une incertitude sur les concours, qui empêchent de réfléchir correctement aux maquettes de formation, sans pilotage national ».
Il précise : «nous devons articuler formation disciplinaire et capacité à organiser l’apprentissage des élèves » et résume le débat actuel sur la formation à deux termes : « faire classe ou faire cours ? Selon le terme qu’on privilégie, on ne fait pas la même formation… ». Former des profs d’école sans travailler la maternelle, former les professeurs de lycée professionnel sans penser l’alternance, former des enseignants de lycée et collège sans penser les transversalités ne peut qu’être improductif pour qualifier des enseignants. Pour « dépasser la déploration », il appelle des ses vœux des maquettes de formations qui, pour tous les enseignants, permettent de prendre en compte  quatre directions fondamentales :
- prérecruter et augmenter les bourses pour que les enseignants soient représentatifs de la diversité de la société,
- Alterner présence à l'université et stages sur le terrain professionnel pour toutes les catégories, et pas seulement pour les professeurs d’école,
- Apprendre à croiser les regards, à penser la continuité pédagogique et les liens entre le premier et le second degré
- Accompagner la prise de fonction pour apprendre le vrai métier d'enseignant : prendre trente décisions par heure. "Un enseignant, ce n’est pas un maître-jacques, c’est un aiguilleur qui sait travailler aussi avec d’autres professionnels. Avec la suppression des maîtres spécialisés, on tourne le dos à tous les autres modèles européens. N’oublions pas que la formation continue des enseignants va aussi être directement impactée par la supression des PE2, sans doute très largement renvoyée hors du temps de travail."

AuducLelievrePour Denis Abecassis, universitaire à Paris X, les universités qui ont intégré un IUFM ont les compétences nécessaires pour développer les compétences professionnelles des enseignants, disciplinaires ou professionnelles. Mais la disparition du statut de fonctionnaire-stagiaire pose une kirielle de questions : comment organiser le financement des études de ces nouveaux enseignants avec moins de ressources financières ? Comment organiser des réseaux d’enseignants capables d’accueillir les enseignants stagiaires ? Comment organiser les passerelles entre les différents cursus, pour ceux qui voudront changer de professionnel en cours de route ? Comment organiser des contenus communs ?
Cette question va aussi impacter l’avenir des mastères universitaires soumis à la «concurrence» des mastères enseignement. On risque de voir des directions très hétérogènes, d’une université à l’autre, avec des contenus très différents. A trop vouloir aller vite, on risque d’arriver au mauvais endroit : les premières épreuves sont prévues pour fin 2009…
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Enfin, Jean-Baptiste Prévost, président de l'UNEF insiste sur les compétences des formateurs, que ce soit dans les mastères qui vont préparer aux concours ou dans les autres filières universitaires. "Nous appelons les universités à se rendre compte qu'être un spécialiste de la discipline ne suiffit pas à être un bon enseignant, même à l'Université".

Insistant sur la nécessité d'accompagner les étudiants dans leurs parcours, et de prévoir des passerelles pour les étudiants qui, en fin de maser 1, vont échouer au coucours, il exprime également ses craintes devant la manière dont risque de se passer la "masterisation" : "nous risquons d'avoir un décrochage des étudiants issus des milieux populaires, dont nous savons qu'ils ont du mal à financer leurs études au-delà de la licence. Ce serait catastrophique pour l'Ecole de ne renouveler ses enseignants qu'avec des enfants de classe moyenne..."

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Par ppicard3 , le .

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