Jacques Bernardin et Henriette Zoughebi, pour entrer en matière 

Quatrième édition des rencontres annuelles initiées par le GFEN avec l'appui de plusieurs partenaires, dont le Café Pédagogique, dans un lieu symbolique de la lutte contre les difficultés scolaires, à Saint-Denis. "Nous avons besoin de retrouver une ambition éducative, alors que les politiques publiques axées sur le dogme de la réduction des moyens publics se traduisent par des fermures de classes ou des entendent s'adresser aux seuls "élèves volontaires et méritants", souligne d'emblée l'élu local marquant son opposition aux internats d'excellence lors de ses mots de bienvenue.
Saluant l'importance de la recherche pédagogique "au moment où on bafoue la notion même de formation d'enseignants", Henriette Zoughébi, élue au conseil régional d'Ile de France entend réaffirmer quelques évidences sur la fonction d'enseignant : " Pour le gouvernement, la politique sur l'Ecole n'est pas un échec, c'est un choix cohérent. C'est la RGPP même qui constitue le fer de lance d'une politique qui veut mettre au premier plan la concurrence entre les individus, entre les établissements, en cherchant à naturaliser les inégalités sociales". C'est un choix idéologique : la réussite de tous contre la réussite de chacun. "Pourtant, les jeunes que je rencontre dans les consultations que j'organise me montrent que les élèves savent que le travail scolaire et l'engagement est nécessaire, précise l'élue. Mais ce qui lui semble essentiel, c'est le sentiment qu'ils ont de leurs "manques", y compris de confiance, qui les amène à penser que l'offre culturelle, l'écrit, la lecture "ne sont pas pour eux". Elle appelle les participants à poursuivre leur engagement au service des multiples et minuscules "révélations" qui, grâce aux situations de médiation culturelle, leur permettent de "prendre le pouvoir sur l'écrit", et ainsi comprendre en quoi ils peuvent "prendre le risque" de se confronter à une nouvelle langue pour mieux comprendre le monde et chercher ce qu'on ne connait pas encore. "Buter sur les mots pour éclaricir sa pensée, c'est exigeant et indispensable. Le tout est de les convaincre que "ça vaut le coup".

Jacques Bernardin, président du GFEN, enfonce le clou avec les chiffres de PISA, de l'OZP ou de l'Observatoire des inégalités, qui confirment la bipolarisation des résultats scolaires et qui font de la France le "paradis de la prédestination sociale", pour reprendre les mots de Baudelot. Mais les élèves ont-ils besoin de "plus" ou "d'autrement" ? Assiste-t-on à un "retour en arrière" sous l'effet conjoints des injonctions institutionnelles ? "Ce ne sont pas les élèves qu'il faut remobiliser, mais les enseignants, entend-on souvent dans les quelques stages de formation qui existent encore."

Alors, où sont les obstacles, les malentendus qui conduisent à des actions aveugles ? Jacques Bernardin insiste sur les difficultés de compréhension de lecture : la compréhension littérale ne garantit rien de la compétence à relier les informations explicites avec les connaissances personnelles pour construire une signification. Comme l'avait montré Goigoux, ces élèves pensent que la compréhension de chaque mot garantit la compréhension du texte, ont du mal à justifier de ce qu'ils croient avoir compris. Les bons lecteurs, au contraire, cherchent à construire des représentations logiques, essaient de voir au-delà du texte les intentions de lecture, qui font des retours en arrière si le texte est dense, qui construisent la signification tout au long de la lecture du texte, et non "à la fin".
Pour l'écriture, la réticence semble grandir avec l'âge : blocages liée à l'orthographe, phrase incomplètes, manque de relecture, incohérences dans le récit. Souvent, le sens du brouillon est brouillé : on parle plus souvent de "mettre au propre" que de genèse de texte... Même la copie, parfois mal automatisée, est réduite au "recopiage". Toutes les opérations requises par les différentes phases de l'écrit semblent être ramenées à la "normalisation scolaire", les activités scolaires  réduites à leur formes contraignantes, et non émancipatrices. Entre ceux qui pensent que l'écriture est un "don", et ceux qui pensent que c'est d'abord un "travail", c'est un renversement de posture : pour y parvenir, il faut construire la construction de signification à travers le destinataire. "C'est parce que je dois être à la fois moi-même et l'autre que je peux tester ce qu'il va comprendre de ce que j'écris, grâce à la mise à distance que je vais progressivement construire".
Comment ? Comme d'habitude, au GFEN, les discours se mettent en musique dans les ateliers où les animateurs vont proposer des démarches de travail aux participants.


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Par MBrun , le dimanche 03 avril 2011.

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