La décennie des abandons 

François Bayrou avait dénoncé les dix premières années du collège unique dans un livre « La décennie des mal-appris ». Le rapport 2011 de l’OCDE présenté le 12 septembre fustige pour la France ce qu’on pourrait appeler « la décennie des abandons ».


Lorsque Bernard Hugonnier de l’OCDE pointe « que la situation du système éducatif s’est dégradé en France ces dix dernières années », il ne fait que souligner la politique d’abandons qui s’est manifestée dans ce secteur durant ce laps de temps :

• Abandon de la priorité à l’éducation nationale avec une part du revenu consacré à l’éducation en diminution de 2000 à 2010 ;

Abandon d’une lutte contre l’échec scolaire effective alors que la France voit dans ses résultats aux enquêtes PISA se développer une triple fracture : sociale, ethnique et sexuée. Un certain nombre de mesures accompagne cette montée des inégalités sociales à l’école :

- Abandon de l’objectif de scolarisation à 3 ans des enfants en maternelle. Le taux de scolarisation des enfants entre 2 et 3 ans est passé de 35,2% en 2000 à 16% en 2010.

- Abandon dans les faits de la politique d’éducation prioritaire réduite au programme ECLAIR.

- Abandon de l’objectif de réussite pour tous au profit de quelques filières d’excellence pour quelques-uns qui montre d’ailleurs pour les 2000 élèves qui se trouvent en « internats d’excellence » qu’avec un taux d’encadrement d’un adulte pour 3,5 élèves, on peut construire des réussites…..

Abandon de la revalorisation des conditions d’exercice du métier enseignant et des salaires des enseignants. La France est avec la Hongrie le seul pays où pendant la dernière décennie le salaire des enseignants a baissé en monnaie constante.

Abandon de toute formation professionnelle des enseignants alors que l’hétérogénéité des classes s’est accentué et que le système éducatif français a besoin de professionnels capables de transmettre et de prendre en compte la diversité des publics, de savoir organiser leur enseignement dans un environnement complexe : la diversité des publics d’élèves, la diversité des modèles éducatifs parentaux, les nouveaux moyens de communication, des devenirs professionnels en pleine évolution.

La liste des abandons pourrait être multipliée concernant la rénovation des programmes de l’école primaire au collège, le discrédit que les processus proposés par le ministère font courir à la démarche d’évaluation par les compétences, etc.

Le rapport OCDE 2011 comme les conditions de cette rentrée montre que le système éducatif français a besoin non d’un simple « lifting », mais d’une profonde transformation. Il ne s’agit pas d’opposer le quantitatif et le qualitatif, mais de voir que l’effort de l’Etat concernant l’Education doit reposer sur un projet ambitieux de refonte de notre école qui lui permette-ce qu’elle ne fait plus- de retrouver les valeurs républicaines qu’elle ne doit pas seulement afficher mais pratiquer dans le concret.

C’est vrai qu’un tel projet coûtera de l’argent. Mais comme le montre le rapport dans l’OCDE, investir dans l’éducation est rentable pour un pays : « Un diplômé du supérieur « rapporte » (en balance entre impôts et services rendus) 64 000 $ soit le triple de l’investissement mis dans son éducation ».

Puissent nos politiques dans les mois qui viennent avoir le même courage que Lincoln qui déclarait devant le Congrès il y a 150 ans face à des élus hésitants en pleine guerre de Sécession à investir dans l’Ecole : « C’est vrai, l’éducation coûte cher, essayez donc l’ignorance ! »

Jean-Louis Auduc

 

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Par fjarraud , le jeudi 15 septembre 2011.

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