Sac de plage 2008 - Formation des enseignants : plus d'études, moins d'éducation ? 

Par François Jarraud



Les enseignants recrutés avec un master en 2010. "Le ministre aurait intérêt à voir "Entre les murs". Il apprendrait que le métier ce n'est pas juste transmettre des connaissances. C'est aussi savoir gérer la diversité des personnes. Et ça nécessite du professionnalisme". Pour Jean-Louis Auduc, directeur adjoint de l'IUFM de Créteil, le projet de réforme de la formation des enseignants envisagé par Xavier Darcos est une erreur.


Formation des enseignants : le projet ministériel

Xavier Darcos et Valérie Pécresse ont présenté le 2 juillet devant le conseil des ministres une communication sur la réforme du recrutement des enseignants.


"Le principe de concours nationaux est réaffirmé… La distinction entre le Capes et l’agrégation est maintenue" ont annoncé les ministres. Le concours aura lieu après l'obtention d'un master. " Tout étudiant inscrit en deuxième année de master ou ayant déjà validé celui-ci pourra donc se présenter aux nouveaux concours de recrutement".


S'agissant de la professionnalisation, un sujet qui mobilise les formateurs, les ministres ont défini le contenu du concours et de la formation. "Les nouveaux concours comprendront trois types d’épreuves destinées à évaluer la culture disciplinaire, la capacité à planifier et organiser un enseignement et la connaissance du système éducatif…. Pour préparer les étudiants à leur futur métier, les universités proposeront des parcours de master qui devront comporter une prise de contact progressive et cohérente avec les métiers de l’enseignement. Elle pourra commencer au cours des études de licence et comprendre des stages d’observation et de pratique accompagnée en école, en collège et en lycée. Dès leur première année d’exercice, les lauréats des nouveaux concours seront mis en situation d’enseignement à temps plein avec l’aide et le soutien de professeurs expérimentés. Des actions de formation spécifiques leur seront offertes en dehors du temps scolaire. A l’issue de cette année, le professeur fonctionnaire stagiaire pourra être titularisé après avoir été inspecté". On notera que les IUFM, réformés il y a un an seulement, n'apparaissent plus.  Rayés du vocabulaire…

 

Enfin les ministres ont confirmé le calendrier : la première session du concours aura lieu en 2010.

Communiqué

http://www.premier-ministre.gouv.fr/chantiers/education_863/c[...]


L'avis de Philippe Meirieu

"Les épreuves des concours de recrutement seront organisées autour de trois types d’épreuves « destinées à évaluer la culture disciplinaire, la capacité à planifier et organiser un enseignement et la connaissance du système éducatif ». Où est la pédagogie là dedans ? Que fait-on des connaissances indispensables de psychologie de l’enfant et de l’adolescent, des apports de la sociologie qui permettent de comprendre certains aspects des difficultés scolaires des élèves ? Où est l’histoire des doctrines pédagogiques sans laquelle nous sommes condamnés à réinventer perpétuellement l’eau tiède ? Où est la philosophie de l’éducation et la réflexion éthique, le travail en équipe et avec les familles ?" Ancien directeur de l'IUFM de Lyon, co-auteur, avec Xavier Darcos, d'un ouvrage sur l'Ecole, Philippe Meirieu est un expert reconnu du système éducatif. Il livre ses impressions aux lecteurs du Café pédagogique.

Lire la tribune de P. Meirieu

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/07/Phili[...]


Les réactions syndicales à la formation des enseignants

Les syndicats ont pris position sur cette déclaration gouvernementale. Le Sgen Cfdt " note, avec satisfaction, que les concours ne porteront pas sur la seule culture des disciplines" mais exprime son désaccord " sur les deux points suivants : la possibilité d'un prérecrutement au niveau licence n'est pas retenue ; l'entrée dans le métier à « temps plein » ne laisse aucune place à la poursuite de la formation".


Le Snuipp est plus critique. Il y voit "la volonté du ministère de l' Education Nationale de se désinvestir de la formation initiale des enseignants. Elles conduisent à supprimer une année de formation professionnelle rémunérée et surtout à économiser environ 11000 postes de professeurs d'école stagiaires".  Mais pour le Snuipp, ce projet met en danger la formation professionnelle. "L'existence des IUFM, le rôle des IMF (maitres formateurs) comme la dimension professionnelle de la formation sont complètement absents du projet gouvernemental. Dans ces conditions,… les critiques et les insuffisances de la formation actuelle risquent d' être amplifiées par une « mastérisation » menée au pas de charge et qui privilégierait les connaissances académiques… Le SNUipp rappelle qu’enseigner est un véritable métier qui s’apprend. Une bonne formation d’enseignant doit conjuguer la maîtrise des savoirs disciplinaires et professionnels en s'appuyant sur la recherche".


Et puis il y a des inquiétudes immédiates : "La disparition de l’année de formation professionnelle à l’IUFM se traduira-t-elle par une forte baisse du nombre de postes au concours 2009 des professeurs des écoles?       Comment les stages de Formation continue et les décharges de direction actuellement effectués par les stagiaires seront-ils assurés à partir de 2010 ? Quel avenir pour les maîtres-formateurs ?" En conséquence, le Snuipp demande un débat public et un moratoire sur cette mesure.

Le Snes n'avait pas fait connaître son opinion mercredi soir.

Sur le Café le dossier formation des enseignants

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/Reform[...]



Analyse : Une formation sacrifiée

Le plan de formation des enseignants dévoilé par Le Monde, s'il s'avérait confirmé, serait un mauvais coup porté à l'Ecole et particulièrement à l'enseignement des couches populaires.


Il faut d'abord marquer qu'il isolerait encore davantage la France en Europe. La formation strictement professionnelle (non disciplinaire) occupe généralement chez nos voisins environ la moitié du temps de formation. C'est le cas par exemple en Finlande (50%). La France se singularise déjà avec la formation professionnelle la plus faible d'Europe (13%). Sa quasi-suppression au profit d'un allongement de la formation universitaire achèverait de nous singulariser. C'est dire que la remise en question de cette formation professionnelle ne se pose qu'en France. Partout ailleurs on cherche à professionnaliser davantage la formation et à ne pas la séparer de la formation théorique.


Ce mouvement général ne résulte pas du hasard. Il est lié à la démocratisation scolaire et à l'arrivée dans les établissements d'élèves éloignés de la culture scolaire traditionnelle. C'est parce que l'Ecole s'adresse à tous qu'elle a besoin de maîtres capables de se faire comprendre d'enfants très différents des bons élèves d'autrefois, des enseignants d'aujourd'hui.


L'arrivée dans les établissements populaires des nouveaux maîtres frais émoulus des universités mais désarmés face aux difficultés du métier en zep, ne pourra que créer des difficultés supplémentaires à ces établissements. La faiblesse de la formation des enseignants se retournera davantage contre les enfants des quartiers populaires que contre ceux des familles favorisées, mieux adaptés à l'Ecole et scolarisés dans des établissements à faible turn over.


Réactionnaire sur le terrain pédagogique, la réforme projetée de la formation des maîtres serait aussi l'enterrement du droit à l'éducation pour tous.

La formation des maîtres en Europe

http://www.eurydice.org/portal/page/portal/Eurydice/ByTop[...]

Une synthèse de l'INRP

http://www.inrp.fr/vst/LettreVST/decembre2005.htm

Sur le Café,le métier d'enseignant

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/91_Metierense[...]

Sur le Café, dossier sur la formation des enseignants

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/formation_de[...]


29 organisations demandent une véritable formation professionnelle des enseignants

" Enseigner est un métier qui s’apprend, il nécessite une formation, initiale et continue, disciplinaire et professionnelle de haut-niveau, en lien avec la recherche. Elle doit se dérouler dans le cadre d’une véritable alternance théorie-pratique, en relation avec les établissements scolaires. L’entrée dans le métier doit être progressive, accompagnée par des équipes de formateurs qualifiés". 29 organisations représentant les enseignants du secondaire et du supérieur, les chefs d'établissement, les inspecteurs, les lycéens et les étudiants (FERC/CGT – FSU - SGEN/CFDT - UNEF – UNL - UNSA Éducation SNEP/FAEN - SNCL/FAEN – UNSENCGT - FERC SUP/CGT - SNPEFP/CGT - SNTRS/CGT - SEPIDOP/CGT - A&I/UNSA - SEA - SE/UNSA, SIEN, SNPDEN, SNPTES/UNSA - SUP’RECHERCHE - SNASUB/FSU - SNES/FSU - SNEP/FSU - SNESUP/FSU - SNETAP/FSU - SNPI/FSU - SNUIPP/FSU - SNUEP/FSU - SNUPDEN/FSU) "dénoncent la disparition des IUFM" et la masterisation.


"La « mastérisation » annoncée ne saurait servir de prétexte à des dégradations des contenus de formation" déclarent-elles. "Les organisations considèrent comme une régression l’annonce d’une formation professionnelle réduite à un simple compagnonnage". Elles demandent "une véritable concertation".

Communiqué

http://www.snuipp.fr/spip.php?article5654

Sur le Café, dossier formation

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/ReformeFo[...]


Formation : L'avertissement de la CDIUFM

La réforme de la formation peut être " une formidable source d’enrichissement ou au contraire un dramatique appauvrissement de la formation initiale des enseignants" prévient la Conférence des directeurs d'IUFM (CDIUFM) dans un communiqué.


Elle craint "un trop grand écart entre le contenu des épreuves des concours de recrutement et les conditions réelles d’exercice des métiers auxquels ils conduisent" et demande "des épreuves académiques qui sélectionnent les futurs enseignants sur ce qu’ils auront à enseigner et ensuite des épreuves professionnelles pratiques qui vérifient leur aptitude à enseigner".


La CDIUFM souhaite "une formation en alternance : alternance entre des moments de formation à l’université et des moments de formation par la pratique dans les classes, alternance entre une formation académique dans les disciplines à enseigner et une formation professionnelle aux méthodes et aux outils de l’enseignement. De plus ces différentes dimensions de l’alternance doivent être articulées et non pas seulement juxtaposées". Dans tous les cas il faut, selon elle, de nouveaux masters.

Le communiqué

http://www.iufm.fr/applis/actualites/article.php3?id_article=482

Sur le Café le dossier formation

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/Refo[...]


Vers des Etats-Généraux de la formation des  enseignants 

" Cette réforme représente un cheval de Troie qui pourrait bien être monté pour entraîner la disparition des concours nationaux et l’abandon d’une culture commune". Le master annoncé par Xavier Darcos et Nicolas Sarkozy signe-t-il la fin de la formation professionnelle des enseignants et la disparition des IUFM ? Afin de permettre un échange large et sans précipitation sur ces questions et garantir aux futurs enseignants « une formation de haut niveau dans des IUFM rénovés » Y. Jean, M. Lauton, P. Meirieu, C. Pontais, F. Poirier et M. Rousseau ont lancé récemment un appel, qui a déjà recueilli, en moins de 14 heures, près de 2 000 signatures. P. Meirieu, S. Bonnery, J.L. Auduc exposaient leurs analyses le 25 juin. Le Café rend compte de cette réunion.

Lire le reportage de F. Solliec

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/06/V[...]

Signer l'Appel

http://www.former-des-enseignants.org/

Sur le Café, annonce d el'Appel

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/06/250[...]


Formation des maîtres : Pour Jean-Louis Auduc, on tourne le dos aux besoins

"La communication au conseil des ministres du 2 juillet 2008 concernant le recrutement et la formation des enseignants est surtout révélatrice par ses silences des logiques choisies dans ce domaine" nous confie Jean-Louis Auduc, directeur adjoint de l'IUFM de Créteil, en réaction à l'annonce faite au conseil des ministres le 2 juillet.


"Les IUFM ne sont pas cités, ce qui semble signifier que toute une série de compétences professionnelles portées par les formateurs de ces écoles professionnelles sont totalement niées pour la construction des conditions de formation des futurs enseignants.


Les stages en établissement ne sont pas présentés comme obligatoires et évalués, ce qui pose clairement la possibilité que des enseignants puissent être recrutés sans jamais s’être confrontés aux réalités de l’exercice de ce métier.


La présentation des épreuves du concours ne comporte pas l’annonce d’épreuves orales professionnelles. Cela semble clairement indiquer que, globalement, les concours de recrutement continueront d’être tournés vers l’amont, c’est-à-dire vers la vérification de savoirs déjà validés à l’Université, et non vers l’aval , c’est-à-dire vers le métier qu’on veut exercer.


Ce projet de recrutement et de formation des enseignants est contraire à tous les modèles européens de formation des enseignants basés sur une véritable alternance entre l’exercice sur le terrain, les apports disciplinaires et des moments d’analyse des pratiques professionnelles.


En refusant de se poser la question de la préparation des enseignants à la diversité des situations d’exercice et des publics scolaires, ce projet tourne le dos aux besoins de notre système éducatif qui doit se fixer comme horizon la réussite de tous les élèves".

Sur le Café, JL Auduc sur la formation

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/formati[...]

Sur le Café, L'Expresso du 3 juillet

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/07/030[...]



L'analyse de Nathalie Mons


N. Mons"Il faut encore que le gouvernement démontre que cette nouvelle organisation puisse améliorer la situation à terme pour les élèves". Nathalie Mons, spécialiste des comparaisons internationales des politiques éducatives, analyse pour le Café la formation des enseignants dans les pays européens.


Relevant la "très faible part d’enseignement consacrée à la formation professionnelle" en France par rapport à nos voisins, elle interroge les perspectives offertes par la réforme annoncée. " L’enjeu sera demain dans le contenu des concours. C’est le contenu des épreuves – plutôt axé sur le disciplinaire ou incluant réellement des compétences pédagogiques – qui déterminera le contenu des enseignements de ces nouvelles formations. Si les concours exigent une formation pédagogique, les Master devront être ajustés dans ce sens-là. C’est donc sur ce point qu’il faudra être vigilant".

Sur le Café, l'article de N. Mons

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2008/For[...]

Sur le Café, le dossier sur la formation des enseignants

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/Reforme[...]



Le compagnonnage ne suffit pas, dit JL Auduc

Le compagnonnage suffit-il à former un enseignant ? Jean-Louis Auduc expose les risques d'une formation réduite uniquement en établissement. "Il faut permettre au futur enseignant de se construire une identité professionnelle qui s'appuie sur des savoirs, des savoir-faire, et des gestes professionnels".

Sur le Café, lire la tribune de JL Auduc

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2008/Form[...]

Le dossier du Café sur la masterisation

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/ReformeForm[...]



"Une catastrophe annoncée et confirmée" affirme Pierre Frackowiak

"Les nouveaux vieux programmes, la réduction du temps scolaire et la mise en place du soutien et des stages de remise à niveau pendant les vacances, la réduction drastique de la formation continue des enseignants du premier degré,  la disparition annoncée de la formation professionnelle et des IUFM, le projet d’agence de remplacement avec des personnels non fonctionnaires, tout va dans le même sens de manière très cohérente". Pour Pierre Frackowiak, avec la réforme de la formation des enseignants, la droite achève un programme cohérent de destruction de l'éducation nationale.

Sur le Café, tribune de P. Frackowiak

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2008/PF[...]


Une réforme efficace ?

"Il ne faut tout de même pas oublier qu'une réforme ne peut-être efficace que si elle a est discutée avec les intéressés. Peut-on espérer que cela se fasse au moins dans le secret des bureaux!" Jacques Nimier réfléchit sur les propos du président de la République à propos de l'Ecole.


"Pour la réforme des lycées, la diminution des heures de cours "ex cathédra", l'augmentation du travail de groupe et individualisé, le travail sur projet, l'apparition, peut être, de "profil individuel, de formation" par des choix de modules permettant des orientations plus faciles, l'autonomie plus grande des lycéens" éceit J Nimier. " tout cela me paraît aller dans la bonne direction (le lycée Finlandais semble en être le modèle ); Cela va demander une évolution considérable des enseignants, non seulement des nouveaux mais également de ceux en poste or on ne voit, pour l'instant, aucune annonce sur la façon dont ils seront aidés:

Sur Pedagopsy

http://www.pedagopsy.eu/



Sur le site du Café
Par fjarraud , le mardi 01 juillet 2008.

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