Les Pyrénées Orientales mobilisées 

 

En décembre dernier, les établissements de l’enseignement agricole public ont commencé un mouvement de protestation contre les restrictions budgétaires qui se traduisent notamment par des fermetures de classes et une précarisation accrue des personnels. Les deux lycées agricoles des Pyrénées Orientales, Théza et Rivesaltes, regroupés dans l’Epl 66, se sont fortement mobilisés. Plus d’un mois après, nous avons demandé à des enseignants des deux établissements de faire le point sur le mouvement.

 

L’Epl 66 semblait fortement mobilisé en décembre. Sur quels points vos établissements vous semblent ils menacés ?

Des fermetures de classes ont été sous-entendues, puis clairement annoncées en l'espace de quelques jours. Il s'agissait de la classe de 4ème à Rivesaltes, de la filière STL (sciences et techniques de laboratoires) à Théza, d'une réduction d'effectifs en Services aux Personnes et du gel du Bac Pro Viticulture. Mais, hormis la classe de viticulture qui connaît des problèmes de recrutement, ce n'était pas parce que ces classes ne fonctionnaient pas, car elles fonctionnent très bien. C'était juste que le ministère avait ordonné des économies et il fallait fermer des classes, sans se préoccuper de ce que ça impliquait.

On a vraiment eu l'impression que le ciel nous tombait sur la tête. Il a fallu réagir vite et se mobiliser immédiatement pour informer le plus efficacement possible les gens, les élus, les politiques, les medias. On travaille dans de petites structures, fermer des classes c'est indirectement menacer la survie même des centres.

 

Dans la plupart des établissements en grève, les élèves participaient activement aux actions. Est ce le cas chez vous et comment ?

Oui, les élèves ont été très présents lors de la manifestation organisée à Perpignan, et ils ont toujours été très volontaires pour envoyer des représentants lorsque des délégations (de professeurs, de parents d'élèves, d'élèves) ont été reçues par les élus. Et lorsqu'on a mis le blog en ligne, ils ont relayé l'info très efficacement sur leurs blogs à eux.

 

Comment expliquez vous cette implication ?

On a vu naître des slogans comme « touche pas à mon lycée » qui ont été adoptés immédiatement autant par les enseignants que par les élèves.

Nous travaillons dans des petites structures, où nos élèves se sentent bien, alors ils ont tout de suite eu envie de se joindre à la lutte pour les défendre. Tous les élèves de Bac Pro qui sont passés par une 4ème Techno ou de l'Enseignement Agricole disent que c'est ce qui leur a permis de retrouver une certaine sérénité vis à vis de l'école, et de bâtir un projet professionnel en continuant sur un BEP, la suppression de la 4ème les a choqués, surtout sachant qu'aucune alternative n'était envisagée. Et à Théza, lorsqu'ils ont appris que la STL serait supprimée, alors qu'il n'y a pas d'équivalent dans la région dans l'enseignement public, alors que le conseil régional vient d'investir plus d'un demi million d'euros dans les équipements, ils se sont insurgés.

Ce sont des ados comme tous les ados, toujours prêts à se mobiliser pour lutter contre l'injustice.

 

 

 

Rassemblement 14 dec 2007 devant la préfecture de Perpignan contre le démantèlement de l'enseignement agricole dans les PO – des tables ont été installées dans la rue pour recréer une salle de classe, ce sont les élèves qui font le spectacle.

 

 

Vous avez créé un blog, est ce qu’il vous a amené des contacts, des retours sur vos actions ?

Oui, beaucoup. Ca a été un moyen efficace de collecter des signatures pour notre pétition, de faire passer des infos en temps réel. Et nous avons trouvé de nombreux commentaires postés par nos élèves, d'anciens élèves, des parents d'élèves ou des citoyens lambda qui nous exprimaient leur soutien. On a vu que d'autres blogs étaient créés, dans d'autres régions, pour lutter contre le même type d'annonces et de mesures, et ça nous a motivés !

 

Vous avez écrit aux élus, étaient ils au courant des menaces de fermetures ? Certains élus ont ils affiché leur soutien au mouvement ?

Bien entendu, nous leur avons écrit, et nous sommes allés les voir. Les élus locaux, départementaux, régionaux nous ont reçus, nous ont écoutés, nous ont apporté leur soutien. Nous avons été reçus par le Préfet, par les maires, les députés. Tous ont fait remonter l'information, nous ont dit souhaiter nous aider.

Le conseil régional et le conseil général se sont bien mobilisés, une motion a été votée par le conseil régional contre « le démantèlement de l'enseignement agricole ». Ils savent combien nous sommes impliqués dans la formation, l'insertion, l'animation, dans un territoire où les filières auxquelles nous préparons (horticulture, agro-alimentaire, techniques de laboratoire, viticulture, services pour ne citer que celles-ci) sont des secteurs dynamiques et porteurs, et ils ne pouvaient pas ne pas s'impliquer.

 

Et les professionnels ?

Les professionnels nous ont suivis aussi. A la chambre d'agriculture nous avons reçu beaucoup de soutien (certains des membres sont passés par chez nous, leurs fils aussi, bientôt peut-être leurs petits-enfants), eux aussi sont bien conscients de l'importance de notre rôle.

 

Où en est le mouvement aujourd’hui ? Avez vous obtenu des avancées ?

Pour l'instant nous attendons, nous n'avons encore obtenu aucune garantie solide. Les restrictions budgétaires sont là et bien là, on va avoir moins de moyens, probablement des classes regroupées, au détriment de l'efficacité de l'enseignement et du suivi des apprenants. On a peut-être sauvé quelques meubles cette fois-ci, mais on s'attend à tout et surtout à n'importe quoi pour l'avenir. Mais quoi qu'il arrive nous sommes prêts à en découdre pour défendre ce que nous avons réussi à mettre en place : un enseignement de proximité, bien ancré dans la réalité sociale, professionnelle et culturelle de nos territoires.

 

Propos recueillis par Monique Royer

Sur le site du Café
Par moniqueroyer , le vendredi 01 février 2008.

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