Le plan banlieue et l'Ecole 

Par François Jarraud



Le gouvernement a présenté le 20 juin le plan Banlieue. Outre des efforts de désenclavement des quartiers et la création de 45 000 "contrats d'autonomie" sur trois ans pour accompagner des jeunes vers l'emploi, le plan contient les mesures scolaires que F. Amara avait déjà présentées le 14 février.

 

Plus qu'un plan, il s'agit d'un éventail de mesures. L'accompagnement éducatif sera étendu à 3 730 écoles primaires (on annonçait 5 000 en février). 30 collèges très dégradés seront fermés, en accord avec les conseils généraux (propriétaires des lieux !) et la reconstruction intégrée dans un programme national. Un nombre équivalent de "sites d'excellence" seront créés dans des lycées , déjà nominativement désignés, qui bénéficieront de filières artistiques, de sections internationales etc. 4 000 places d'internat seront ouvertes et 12 000 places en école de la seconde chance d'ici 2010.

 

D'autres mesures touchent à la vie des élèves. Des banques de stage, à l'image de l'expérimentation menée à Aix-Marseille, aideront les élèves à trouver des stages de 3ème ou de la voie professionnelle. Du busing pour favoriser la mixité sociale dans des communes volontaires. Le ministère soutiendra l'accès des jeunes en prépas : 5% des élèves "les plus méritants" de chaque lycée se verra proposer un accès en classe préparatoire. Enfin le ministère effectuera un repérage individuel des élèves déscolarisés et des sorties sans qualification. Une circulaire de lutte contre l'absentéisme sera publiée d'ici la rentrée.

 

La FSU a critiqué ce plan. Pour la fédération, "esquivant la question des moyens nouveaux et fondé essentiellement sur des redéploiements, il n'est pas de nature à produire l'effort indispensable pour réduire véritablement les inégalités par une action cohérente et durable… Il n'est pas de nature à produire l'effort indispensable pour réduire véritablement les inégalités par une action cohérente et durable" estime le syndicat.

Le plan banlieues

http://www.espoir-banlieues.fr/  

La liste des 30 sites d'excellence

http://www.espoir-banlieues.fr/article.php3?id_article=120   

Communiqué FSU

http://www.vousnousils.fr/page.php?P=data/autour_de_nous/l_act[...]  

Sur le Café, F. Amara et Darcos

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/02/1502200[...]  

 

Espoir banlieue : la banlieue en plan

Pourquoi "faire du social" quand on a peu de moyens à y consacrer, que son électorat s'en désintéresse et que soi-même on croit davantage dans la réussite individuelle que dans les inégalités sociales ? Annoncé une première fois il y a maintenant 4 mois, le plan "Espoir banlieues" arrive au terme, sans grandes modifications avec son volet éducation nationale.

 

Pourtant la question des inégalités sociales à l'Ecole se pose de façon aigue en France. On peut le mesurer par exemple dans l'inégalité d'accès au bac. Si ce taux progresse pour toutes les catégories de la population, l'écart entre les familles cadres et ouvrières reste particulièrement élevé, au point que l'OCDE a pu reprocher à la France ces inégalités.

 

Se définissant comme un plan "banlieues", le programme gouvernemental prend en compte la dimension géographique de ces inégalités. L'essentiel des crédits prévus iront d'ailleurs à des moyens de transports sensés désenclaver les quartiers. Sur le plan scolaire, le plan reconnaît la ghettoïsation de certains quartiers et propose la destruction de 30 collèges. Dans la même optique il propose du "busing"  à l'école primaire pour promouvoir la mixité sociale.

 

Mais c'est évidemment sur ce terrain que le plan est le moins crédible. Le débat engagé actuellement sur la carte scolaire après la "sortie" du rapport Obin – Peyroux montre que sa suppression accentue les phénomènes de ghettoïsation. Le contre-feu prévu, qui consiste à donner la priorité aux boursiers sociaux est peu efficace, ne serait-ce que parce que les familles  les plus défavorisées connaissent souvent mal l'univers éducatif (voir les études anglaises) et sont peu demandeuses. Les efforts pour créer des "pôles d'excellence" dans 30 lycées de banlieue risque fort de faire du busing à l'envers, c'est-à-dire d'instaurer au sein même des établissements une nouvelle forme de relégation.

 

La banlieue a avant tout besoin de politiques d'aide aux familles et de soutien aux établissements. Quelques mesures vont dans ce sens. Ainsi l'effort qui sera fait pour suivre et rattraper les décrocheurs. Mais lui-même est contrarié par la politique de valorisation des CAP et la création du DIMA, un dispositif qui poussera hors de l'école, sans qualification réelle, des jeunes de 15 ans.  Un grand doute demeure sur l'efficacité de l'accompagnement éducatif proposé dans une partie des écoles primaires. Il est exprimé officiellement à Paris par exemple. Rien d'autre n'est prévu pour éviter le creusement des inégalités dans les premières années de la scolarité qui sont prédictives de la suite. Rien n'est fait pour diminuer l'élitisme du système éducatif. Au contraire il est réaffirmé par la réforme du primaire qui fait du redoublement une réponse automatique aux problèmes.

 

Le candidat Sarkozy avait été mieux inspiré quand il annonçait : "Dans les quartiers où s’accumulent tous les problèmes de l’exclusion et du chômage, je propose de créer des classes de quinze élèves dans les collèges et les lycées...."

Sur le Café, le DIMA

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/04/1404200[...]  

Sur le Café, promesse de Sarkozy

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/02052007_Pr[...]   

 

Le plan banlieue sonne-t-il le glas des zep ?

"Dans les quartiers où s’accumulent tous les problèmes de l’exclusion et du chômage, je propose de créer des classes de quinze élèves dans les collèges et les lycées...." Il aura fallu moins d'un an pour que le président trahisse les propos du candidat et inverse sa politique. Car le Plan banlieue présenté le 8 février ne prétend plus à un renforcement des moyens dans les zep ou à une politique sociale. Au nom du "aide toi l'Etat t'aidera", il ne vise plus que la débrouille individuelle, le soutien d'éventuelles élites émergées des cités qui justifieront à rebours l'échec des autres. C'est l'ouest qui impose sa morale à l'est.

 

Ce plan se nourrit des insuffisances politiques antérieures. Les moyens injectés dans les cités ont parfois été, dans le passé, mal ciblés. En matière scolaire ils ont été consacrés à la remédiation, aux PPRE, à l'accompagnement scolaire sans qu'on se soit réellement penché sur ce qui se passe dans la classe et sur les moyens pour améliorer son efficacité. Trop rares sont les équipes qui ont réellement pu voir le jour alors que pour l'OZP c'était là une dimension essentielle. Les renforts humains annoncés, des professeurs référents aux assistants d'éducation ont été en dessous des attentes : les premiers ont souvent été institués selon des logiques administratives, les  seconds sont difficiles à trouver tant la paye est sans rapport avec l'investissement demandé. Au bout du compte il se passe pour les zep la même logique que pour la carte scolaire : ses manques conduisent à sa suppression sans égard aux résultats obtenus.

 

Faut-il pour autant abandonner toute politique territoriale d'aide ? Deux études ont pu montrer que les investissements peuvent être rentables en zep. D'abord celle de Thomas Piketty, un conseiller de S. Royal. Il établit que "la légère politique de ciblage des moyens actuellement en vigueur en ZEP (taille moyenne des classes de 21,9 en zep contre 23,3 hors zep) permet de réduire d'environ 10% l'écart de réussite. Cet écart pourrait être réduit de 40% si l'on mettait en place un ciblage fort avec une taille de classe moyenne de 18 en Zep et 24,2 hors zep". Une autre étude, Urban Schools, a démontré l'efficacité du programme anglais  Excellence in the Cities. Ce programme, qui concerne un millier d'établisssements, affecte des fonds supplémentaires pour rémunérer des tuteurs et du soutien scolaire. Selon cette étude, l'investissement est rentable. Le programme EiC améliore l'assiduité scolaire et relève le niveau en maths.

 

Uniquement tourné vers le soutien aux jeunes "méritants" ,le plan  banlieue perd de vue les réalités de terrain. Il faut peut-être les rappeler pour mesurer l'urgence. A Clichy-sous-bois, selon le rapport Zus 2005, où la quasi totalité des écoles et collèges sont en Zep et Zus, 11% des élèves entrent en 6ème avec au moins deux ans de retard. Ils sont 26% en 3ème.  Sur le plan médical, 13% des enfants souffrent d'obésité, 2% sont dénutris, un enfant sur huit est anémié. Ces chiffres situent la nature de ce qui se passe dans les classes de ces ghettos urbains. Ces enfants sont-ils responsables de leurs difficultés ? En quoi le plan banlieue peut-il  les prémunir contre l'échec ?

Un dossier du Café sur l'éducation prioritaire

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/88_zep_sommaire.aspx  

 

 

Education prioritaire : Les convoyeurs attendent ? Pas sûr…

On peut toujours se dire qu’il en est de l’Education Prioritaire comme du service public en général : s’il n’y en avait pas, ça serait pire. Mais ça ne dispense pas de chercher à comprendre ce qu’on pourrait faire pour que ça aille mieux.

 

Les moyens, quand ils existent, ne sont pas suffisamment employés vers le cœur de la difficulté scolaire : ce qui se passe dans la classe. A forcer sur les doses de projets, de remédiation, de dispositifs, de PPRE ou de soutien, on oublie que l’essentiel se joue dans le rapport ordinaire que l’élève de ZEP entretient avec la situation scolaire la plus banale, dans la classe, dans ce qu’il comprend qu’il fait là…

 

Avec une question qu’on ose rarement énoncer publiquement : quand on parle d’Education Prioritaire, pense-t-on « réussite de tous » ou « pacification sociale » ? Depuis quelques années, il semble malheureusement que la réponse soit de plus en plus claire : dans une société où le politique cherche à faire porter le poids du destin social sur le seul mérite des individus, où le président de la République peut oser dire aux journalistes que la désespérance sociale qui s’exprime dans ces quartiers n’est que la conséquence du laxisme face aux délinquants et au trafiquants qu’il fut renvoyer « chez eux », pas la peine de se demander pourquoi le ministère ne juge pas utile de nommer des pilotes nationaux de l’Education Prioritaire. L’inspection générale peut à loisir publier des rapports pertinents, les universitaires peuvent continuer à colloquer, la priorité affichée à la réussite de tous et au socle commun n’est qu’un slogan marketing pour les plateaux télé.

 

On sait désormais beaucoup sur ce qu’il faudrait faire si on décidait réellement que la Nation se fixe comme objectif prioritaire de travailler à la réussite scolaire des élèves qui ont le plus besoin de l’Ecole. Encore faut-il ne pas se contenter de l’afficher, mais de le décider. Les enseignants de ZEP l’attendent-ils encore ? Pas sûr…

Education prioritaire, le nouveau dossier mensuel du Café

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/88_zep_sommaire.aspx   

 

En Angleterre, les élèves exclus confiés au privé

C'est un revirement radical qu'opère l'école anglaise au risque d'encourager les exclusions. Le gouvernement vient de publier un Livre blanc qui annonce une nouvelle politique en direction des élèves exclus des établissements anglais.

 

Le gouvernement renforce les pouvoirs disciplinaires des enseignants qui sont habilités à user de la force pour mettre à la porte de leur classe un élève, à fouiller les élèves, à retenir un élève ou lui confisquer des objets même si les parents ne sont pas d'accord. Parallèlement il annonce que les élèves exclus pourront être confiés à des structures privées. Un appel est lancé vers elles pour qu'elles développent des projets d'accueil.

Le livre blanc

http://www.dcsf.gov.uk/pns/DisplayPN.cgi?pn_id=2008_0095  



Sur le site du Café
Par fjarraud , le lundi 01 septembre 2008.

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