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A Oyonnax, Peillon relance la voie professionnelle 

 

Quelle place pour les entreprises au sein de l'enseignement professionnel ? Cette question va organiser la semaine de Vincent Peillon qui s'ouvre, le 14 octobre par l'inauguration du premier "campus des métiers" à Oyonnax (01) et se clôt le 18 par l'installation du Conseil National Education Economie. Au coeur de ces événements les relations entre l'Education nationale, les entreprises et les régions. En arrière-plan : le rôle de l'éducation nationale dans le "redressement productif" cher à François Hollande.


C'est un nouveau type de dispositif éducatif que Vincent Peillon inaugure le 14 octobre avec Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Le "campus des métiers" d'Oyonnax associe 5 structures différentes autour d'une filière économique, la plasturgie. Le campus réunit le lycée Arbez Carme d'Oyonnax, le lycée Robert Doisneau de Vaulx en Velin, le Greta de Val Bugey Léman, l'INSA et le pole de compétitivité Plastipolis. Le lycée Arbez Carme est au coeur du campus. Il prépare des bacs S et STI2D, des bacs pro plastiques, des BTS ingénieurie collaborative et une licence professionnelle Outillage et plasturgie. L'INSA prépare au diplôme d'ingénieur en génie mécanique. Le rôle du lycée Doisneau reste encore mystérieux. D'après le ministère, le campus, qui comprend aussi une base résidentielle, sera piloté par el ministère, la région et les institutions participantes.


le campus d'Oyonnax Selon le ministère, le "Plasti Campus" répond à une demande des entreprises de la Plastics Vallée. Il s'agit de " valoriser l’enseignement professionnel, atout pour le redressement productif de la France et pour l’insertion professionnelle des jeunes". Au sein du campus, les établissement d'enseignement "peuvent rechercher des synergies entre des lycées professionnels et polyvalents, des centres de formation des apprentis, des organismes de formation, des établissements d’enseignement supérieur, des laboratoires de recherche ainsi que des entreprises". Le campus repose sur un "partenariat renforcé" entre entreprises, laboratoires de recherche, associations et établissements d'esneignement".  On attend des campus qu'ils offrent aux entreprises les ressources humaines dont elles ont besoin et aux jeunes une insertion facile dans l'emploi.


Le ministère envisage la création d'un campus des métiers par région. A ce jour, 12 ont été labellisés dont 4 en aéronautique (Auvergne, Pays de la Loire, Midi Pyrénées et PACA), 5 autour des énergies (Basse Normandie, Haute Normandie, Lorraine, Rhône Alpes et Languedoc) , un en métallurgie (Picardie) et en Travaux publics (Nord Pas de Calais).


Si Arnaud Montebourg participe à l'inauguration c'est que ces campus sont présentés comme un élément de reconquête industrielle. En favorisant la synergie entre entreprises et formation, l'Etat veut donner un avantage compétitif aux entreprises françaises. Mais ce sont encore une fois les régions qui sont appelées à financer les installations. Même dans ces 12 vitrines de l'enseignement professionnel, l'avenir se dessine grâce aux collectivités territoriales.


François Jarraud


Appel à projet de mai 2013

http://www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.ht[...]



Campus des métiers : L'Etat a-t-il encore les clés de l'enseignement professionnel ?

Douze ans après le lancement des "lycées des métiers", l'Etat affiche une nouvelle politique volontariste en matière d'enseignement professionnel. Mais est-il vraiment l'acteur premier qu'il prétend être pour son pilotage ? Le rôle des régions s'affirme alors que l'Etat n'a toujours pas su faire évoluer la place des entreprises dans ses établissements d'enseignement. Et si l'action réelle se dérobait sous ses pieds, par le bas ?


Quelle est donc cette structure qui "a vocation à être un outil essentiel de la professionnalisation et de l'insertion des jeunes et à devenir un vecteur de l'éducation et de la formation tout au long de la vie" ? Cet établissement "dont l'identité est construite autour d'un ensemble cohérent de métiers d'un même secteur professionnel" ? Ce dispositif "destiné à jouer un rôle majeur dans le développement durable des territoires" pour lequel "il convient d'établir des relations étroites avec les acteurs territoriaux : les entreprises et leurs représentants régionaux" ? Bien sur vous aurez reconnu la circulaire créant les... lycées des métiers en décembre 2001. Un texte signé par Jean-Luc Mélenchon, alors ministre délégué à l'enseignement professionnel. Entre les lycées des métiers, tels qu'ils étaient définis à l'origine, et les "campus des métiers" qu'inaugurent aujourd'hui V Peillon et A Montebourg, la filiation est saisissante. A coup sur les auteurs des campus avaient en tête le projet de Mélenchon. Peut-on prédire aux nouveaux campus le sort des lycées des métiers, c'est à dire leur relative banalisation au fur et à mesure que  les exigences mises en eux se sont abaissées ?


On peut prédire que les campus rencontreront les mêmes difficultés. La première c'est la difficile collaboration avec les entreprises. S'il est essentiel qu'il existe une voie professionnelle prise en charge par la puissance publique et échappant à l'autorité patronale, personne ne peut imaginer qu'elle puisse être vraiment professionnelle sans s'appuyer sur les entreprises. Or sur le terrain des relations Etat - entreprises, rien n'a réellement bougé depuis le début du siècle. Certes, début octobre, un décret a légèrement augmenté leur représentation au sein des conseils d'administration des lycées professionnels. Mais elles restent absentes de la formation des enseignants et elles n'ont pas vraiment leur mot à dire dans la vie des établissements. Les maitres de stage restent à leur place, à la porte des établissements. Alors même que les lycées professionnels doivent s'immerger dans une filière de production, l'idée que le président du CA du lycée puisse être un dirigeant d'entreprise reste un tabou aussi bien pour Montebourg que Mélenchon. Les entreprises n'auront pas plus de place dans les campus que dans les lycées des métiers. Il n'est pas impossible qu'elles soient carrément absentes de l'organisme de gestion des campus. Là où les relations sont excellentes entre lycée et entreprises, et ce n'est pas rare, c'est hors réglementation, de façon spontanée.


La deuxième limite c'est la relation avec les collectivités territoriales. Les lycées des métiers n'ont pu voir le jour que grâce au soutien régional. Douze ans plus tard, les campus n'apparaissent qu'avec des fonds régionaux. Ce sont les régions qui financent les locaux, y compris les lieux de vie, le matériel, parfois très sophistiqué, et qui alimentent largement le budget de fonctionnement des lycées. La loi d'orientation leur a reconnu un rôle important dans la création des cartes des formations. L'Etat prétend piloter des campus dans lesquels il investit beaucoup moins que les régions.


Autant dire que le projet de campus des métiers repose sur des contradictions évidentes. Alors qu'une partie de la gauche milite pour des lycées réellement polyvalents et de vraies passerelles entre le professionnel et le général, les campus affirment l'idée de la spécialisation professionnelle. Alors que Montebourg représente un courant colbertiste, il s'inscrit dans une économie où l'Etat a passé la main au secteur privé. Alors que l'Etat veut piloter le campus, celui ci n'existe que par l'investissement régional. Alors que l'Etat croit en ses labels, les lycées professionnels qui fonctionnent bien sont ceux qui ont su s'ancrer dans le local et s'appuyer sur les entreprises du secteur et leur région. Inaugurés en 2013 comme les lycées des métiers de 2001,  les campus des métiers soulignent que les idées n'ont pas évolué dans les ministères aussi vite que le monde réel qui les entoure...


François Jarraud


La circulaire sur les lycées des métiers

http://www.education.gouv.fr/bo/2001/47/encart.htm

Rentrée de réussite dans un petit lycée professionnel

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2013/09/04092013A[...]



Sur le site du Café


Par fjarraud , le mardi 15 octobre 2013.

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