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Seconde carrière 

Par Alexandra Mazzilli et Rémi Boyer de l’association Aide aux Profs


Ce mois-ci :

-       La rentrée d’Aide aux Profs : quoi de neuf ?

-       La valse des DASEN peut-elle suffire à générer le changement en matière de GRH ou est-ce seulement une première étape ?

-       Jack Koch, Professeur des écoles en activité et dessinateur, illustrateur, auteur de BD et… Homme d’affaires !

-       Les axes de réflexion de Vincent Peillon sur la reconversion des personnels de l’Education Nationale



La rentrée d’Aide aux Profs : quoi de neuf ?

 

La refondation nous laissait supposer que le nombre d’enseignants qui nous contacterait se réduirait, mais c’est l’inverse qui s’est produit :

- le trafic du mois d'août s'est accru de +56.7% de 2012 à 2013;

- le trafic de la période Janvier/août s'est accru de +42.9% de 2012 à 2013;

- le trafic de la période Mai/Août s'est accru de +155% de 2012 à 2013 ;

- le nombre de contacts directs est déjà de 150 entre le 1er et le 16 septembre, soit 30% de plus qu’à lé même période de la rentrée 2012.

Le site de l’association réalise progressivement sa mutation pour apporter toujours plus d’informations aux adhérents, dans le cadre d’une bibliothèque dédiée à la reconversion.

Elle s’enrichira :

-       de fiches-métiers (ciblées sur les professions où réussissent les anciens profs qui ont démissionné) qui permettront à chacun de savoir par quelle(s) voie(s) passer pour se reconvertir ;

-       de fiches connaissances pour renseigner sur des aspects pratiques de la reconversion ou d’une création d’entreprise ;

-       de portraits d’enseignants reconvertis et épanouis (ils le sont dans 90% des cas, 10% seulement regrettent d’avoir précipité leur départ);

-       d’articles sur les enseignants porteurs de grands projets pédagogiques et éducatifs, des articles sur des enseignants porteurs de projets innovants et qui veulent témoigner de leur expérience pour qu’elle en inspire d’autres.


Une nouvelle rubrique est apparue dans le menu de notre portail : « Vous valoriser ». Elle permettra de promouvoir tous les adhérents qui le souhaitent dans leurs créations pédagogiques, leurs productions littéraires, musicales et artistiques (de toute nature). Ainsi, ceux qui publient chez un petit éditeur ou produisent leur CD eux-mêmes peuvent-ils bénéficier de notre trafic pendant deux à quatre semaines, un coup de pouce toujours bienvenu.


La rubrique « souffrir d’enseigner » reste d’actualité pour permettre d’exprimer les désarrois face à une Education Nationale qui a du mal à évoluer et à prendre en compte la question des secondes carrières et les attentes des enseignants en matière de Gestion des Ressources Humaines. Elle permettra aussi de diffuser nos publications sur toutes les problématiques qui s’y rapportent.

Une des grandes nouveautés de la rentrée sera notre pôle publication et édition, grâce à une grande nouveauté nous rendant co-éditeur d’ouvrages dans les domaines de l’Education et de la Formation.  

Début octobre, vous découvrirez toutes les facettes de ce partenariat, grâce à notre première co-publication, véritable encyclopédie à usage de tous les enseignants à toutes les étapes de leur désormais longue carrière (43 ans). Ce partenariat permettra enfin à Aide aux Profs de s’intéresser aux conditions d’emploi et de mobilité des enseignants dans les autres pays francophones. Cette voie est en effet prometteuse pour la décennie à venir, puisque de nombreux pays d’Europe vont connaître une pénurie d’enseignants. Or, les salaires que certains pays d’Europe proposent aux enseignants sont nettement plus importants qu’en France. C’est donc une grande concurrence qui va se jouer entre ces états pour attirer vers eux les enseignants les mieux formés, les plus compétents, prêts à s’expatrier pour de meilleurs conditions de travail et de salaire. Le choc démographique à venir dans la profession d’enseignant se caractérise par près de 220 000 départs en retraite sur la période 2013-2023 en France, et s’accompagnera inéluctablement d’un turn over auquel l’Education Nationale n’est pas du tout préparée.

Bien sûr, Aide aux Profs garde sa fonction première : vous aider et vous accompagner dans vos projets de reconversion, vous faire partager son expertise dans ce domaine, expertise acquise depuis sept ans déjà ! C’est un domaine que nous souhaitons toujours plus développer et approfondir car nous avons le sentiment que c’est par ce biais que des profs retrouveront à l’avenir sourire et joie de vivre. Nous remotivons en effet dans leur métier près de 75% de ceux qui nous contactent, beaucoup de jeunes enseignants n’ayant perçu de ce métier que les contraintes inhérentes aux conditions déplorables de leur première affectation sur des postes « bouche-trou » par des services administratifs totalement indifférents à leurs situations familiales ou à leurs revenus (pour pouvoir assumer des déplacements de 1000 km par semaine sur trois établissements par exemple).

Nous vous proposerons aussi cette année un nouveau pôle dédié à la formation. En effet, nous nous apercevons que l’Education Nationale communique peu sur le DIF, n’accepte pas toutes les formations souhaitées (à peine 40%, et bien souvent sans les financer !), ce qui fait hésiter de nombreux enseignants pour se lancer dans des formations coûteuses. Notre travail sera donc de partir à la recherche de formateurs, d’enseignants, possédant des compétences que souhaitent acquérir nos adhérents.

Comme chaque année, Aide aux Profs lance de nouveau projets et poursuit les anciens, se spécialise et innove… Tout cela est dû notamment grâce à nos nombreux adhérents, sans lesquels notre association ne saurait trouver son utilité. Néanmoins, l’équipe des bénévoles est réduite actuellement à quelques personnes. Notre objectif est donc dans les années à venir d’agrandir l’équipe, peut-être avec vous, si vous partagez l’esprit humaniste et désintéressé avec lequel nous animons ce dispositif jour après jour ? Nous vous remercions de nous suivre, toujours plus nombreux, et de nous rejoindre, car ensemble, nous pourrons accomplir de grandes choses !

Pour en savoir plus sur la rentrée de notre association, venez visiter notre site !

http://www.aideauxprofs.org/index.asp?affiche=News_display[...]

Nous vous souhaitons à tous une très bonne rentrée et une excellente année 2013-2014.



La valse des DASEN peut-elle suffire à générer le changement en matière de GRH ou est-ce seulement une première étape ?

A l’évidence, les réformes en cours n’ont pas encore rassuré les enseignants, et même si l’on assiste depuis août 2013 à un jeu de chaises musicales entre les DASEN des différentes inspections académiques, pour apporter sans doute du renouveau en matière de management, et permettre aux enseignants de ressentir un certain « changement », la Gestion des Ressources Humaines qui sévit à l’Education Nationale demeure un chantier en devenir, tous les signaux d’alerte étant au rouge depuis plusieurs années, sans que la technostructure ait levé le petit doigt pour inventer autre chose que ce qu’elle a toujours fait depuis 1994.

Cette valse des personnels d’encadrement suffira-t-elle à faire disparaître les mauvais penchants au harcèlement des personnels que certains maniaient avec dextérité, grâce aux primes alléchantes que leur prodiguait l’ancien Gouvernement ? Avec les habitudes prises entre 2002 et 2012, il serait étonnant qu’en moins de 4 ans d’ici 2017 il soit possible de changer la nature des comportements harcelants de quelques centaines d’inspecteurs qui sévissent toujours, « cassant » le moral des troupes, Aide aux Profs en est souvent informée :

http://www.aideauxprofs.org/index.asp?affiche=News_displa[...]  

Le harcèlement peut aussi provenir de chefs d’établissement, et même si plusieurs enseignants s’allient pour porter plainte, il en faut beaucoup pour arriver à alerter l’administration, et la faire réagir pour prendre en compte le malaise des enseignants :

http://www.snpden.net/node/1721

http://www.franceinfo.fr/education-jeunesse/pres-d-orleans-six-en[...]

Le Café Pédagogique s’y était intéressé le 10 septembre 2013 dans ce dossier :

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2013/09/100920[...]

Ce problème est d’autant plus important que le harcèlement est longtemps resté ignoré dans la loi, tellement difficile à prouver, la victime étant bien souvent culpabilisée dans sa démarche de faire valoir son bon droit.

Daniel ARNAUD s’est intéressé au harcèlement moral dans l’enseignement, un ouvrage qui mérite d’être lu tellement il ne doit pas nous laisser indifférents :

http://leblogdelapresidente.over-blog.com/article-les-enseignan[...]

En s’appuyant sur les statistiques officielles faisant état de 21.9% des personnels estimant avoir souffert de harcèlement, on obtient 40 000 enseignants qui se disent harcelés chaque année :

http://omertaaurectorat.wordpress.com/2013/03/26/ministere-de-[...]

Ce rapport du SNETAA de Corse en 2010 est toujours d’actualité :

http://www.snetaa-bordeaux.fr/documents/RapportHARCELEMENT.pdf

Dans tous les cas, le harcèlement s’exerce de manière isolée, sur une personne qui sera incapable de se défendre, puisque toute la machinerie se liguera contre elle, tous ces sites sont des témoignages d’enseignants harcelés, certains ayant choisi pour seule issue le suicide :

http://www.sudeduccreteil.org/spip.php?breve351 (enseignants harcelés)

http://ecrase.skyrock.com/ (enseignant harcelé)

http://boymottard.wordpress.com/2013/05/16/le-suicide-de-natha[...] (suicide d’une enseignante d’espagnol)

http://www.citoyens-resistants.fr/spip.php?article169 (enseignant désobéisseur)

Ce qui est arrivé à Guy LANDEL entre 1995 et 2007 au Rectorat d’Amiens fait froid dans le dos :

http://www.guylandel.com/pdf/harcelement_old.pdf

Le 22 mai 2013 le Rapport de la Cour des Comptes avait pointé une Gestion des ressources Humaines défaillante, mais dans l’idée de réformer les décrets de 1950 pour aboutir à une annualisation du temps de travail des enseignants, un nouveau moyen d’économiser des postes, et d’assimiler le métier d’enseignant à un quelconque emploi administratif, en oubliant d’imaginer que le métier pourrait encore plus fortement qu’à la rentrée 2013 perdre en attractivité :

http://www.lexpress.fr/education/rapport-de-la-cour-des-co[...]l

A la rentrée 2013, le ministre a déclaré que la GRH de l’Education Nationale était « défaillante », et semble compter sur les 13 groupes de travail qu’il a lancés sur la redéfinition du métier d’enseignant pour qu’ils lui apportent la réponse :

http://www.aideauxprofs.org/UserFiles/2013-Parcours_Professi[...]

La souffrance au travail touche de plein fouet les enseignants en de nombreuses occasions : elle est répétitive, insidieuse, psychologique, produite par de nombreux acteurs, ce qui la rend diffuse : élèves, collègues, chef d’établissement, inspecteur…dans certains cas, l’accumulation de harcèlements peut pousser au suicide. Dans tous les cas, il sera dit que « cet enseignant avait des problèmes personnels et était suivi par le service social de l’académie… ».

Pourtant, c’est un problème de santé publique qui devrait tous nous interpeller, car il touche aussi les élèves, ainsi que les salariés de catégorie C et B dans de nombreuses administrations, et les employés contractuels dans certaines entreprises privées.

Le harcèlement s’exerce toujours d’un fort vers un faible :

http://www.psychologies.com/Travail/Souffrance-au-travail/Harcele[...]

Pour savoir comment porter plainte contre un harceleur :

http://www.avocats-viguier.com/avocat-harcelement-moral-au-tra[...]



Jack Koch, Professeur des écoles en activité et dessinateur, illustrateur, auteur de BD et… Homme d’affaires !!!

Pour une rentrée tout en douceur et tout en sourire, Aide aux Profs vous propose ce mois-ci une rencontre un peu particulière avec un professeur des écoles et dessinateur apprécié par tous ses collègues et même plus… Nous vous l’avions promis lors de la publication d’un portrait, « Jack Koch, le sourire des profs » (cf. le mensuel n°144), ce n’est rien moins que Jack Koch qui nous a accordé une splendide interview pour nous accompagner dans cette reprise qui s’annonce intense. Si Jack ne se pose pas véritablement la question d’une seconde carrière dans le dessin (pour l’instant !), son parcours démontre malgré tout qu’il est possible, tout en restant enseignant à temps complet, de cumuler une seconde activité rémunératrice et épanouissante en dehors de son emploi. Jack ne vous dévoilera ni son âge, ni sa situation de famille, ca fait partie du personnage… Il « n’existe pas » mais il lâche des indices dans ses dessins des éléments qu’il pense ou qu’il a observés ou entendus. Il n’utilise pas Facebook de manière ordinaire, pour raconter sa vie privée mais malgré tout, Jack se présente à nous de manière authentique, dans cet entretien. Voici donc les confidences d’un artiste de talent, qui grâce à ses dessins, illumine les salles de maîtres et les classes des établissements scolaires…

Pourquoi avoir choisi le métier d’enseignant ?

Quand j’avais quinze ou seize ans environ, j’avais déjà envie de devenir professeur, en maternelle d’ailleurs, même si je ne savais pas exactement en quoi consister ce métier d’instit. C’est donc tout naturellement que je me suis orientée dans cette branche après mon baccalauréat. Maintenant, avec le recul, je me demande bien pourquoi je n’ai pas fait l’école d’illustrateur des « arts déco » à Strasbourg. J’aimais déjà dessiner et cette activité me prenait déjà beaucoup de temps. Mais je n’ai aucun regret d’avoir choisi cette carrière.

Quel a été votre parcours de carrière ?

Après mon Bac, j’ai fait une année en psycho, année pendant laquelle je préparais le concours d’entrée à l’Ecole Normale. J’ai réussi le concours et après mes trois ans de formation, j’ai été titularisé. Je rigole souvent en disant que j’ai déjà démissionné de l’Education Nationale : en effet, j’ai passé le concours dans deux académies (à l’époque cela était encore possible, les dates de concours étaient différentes d’une académie à l’autre) et j’ai été pris à Metz. Je n’avais pas les résultats de Strasbourg, j’ai donc commencé à Metz. Ayant réussi le concours de Strasbourg, j’ai dû démissionner de l’académie de Moselle pour rejoindre celle d’Alsace. J’ai été très souvent remplaçant ZIL, par choix, c’était surtout alimentaire car les trajets étaient bien défrayés, maintenant ce n’est plus un argument, les frais de déplacement sont devenus dérisoires. Bien que remplaçant, j’ai toujours été sur des remplacements longs, j’ai passé des années entières dans des classes. Je change d’école chaque année mais je fais quand même un vrai boulot d’instit. Là, pour la rentrée (l’interview a été réalisée fin août, ndlr), je ne sais pas encore. J’aurais du boulot, c’est sûr, puisque deux postes de remplaçants ont été supprimés mais je n’ai pas encore eu de nouvelles de mon inspection.

Comment êtes-vous arrivé au dessin et à la bande dessinée ?

Le dessin prend une place très importante dans ma vie et cela a toujours été le cas. Je dessine depuis toujours, enfant, c’était déjà pas mal… Je dessinais des trucs un peu bizarres, des trucs qu’un enfant ordinaire de cet âge ne dessine pas habituellement. Et j’ai toujours aimé ça, dessiner les profs, les copains, réaliser des caricatures, peindre, griffonner des cahiers… Au début, tout cela était à une échelle minuscule. Mes dessins étaient affichés dans les salles des maîtres des écoles dans lesquelles je travaillais. Avant Internet et avant mon blog « Danger Ecole », la diffusion à grande échelle n’était pas possible. Je dessinais pour les copains, pour la famille,… C’est grâce à Internet si j’en suis là aujourd’hui.

Comment menez-vous vos deux activités de front ? Quelle organisation ?

C’est très difficile. Je manque de temps… Pour tout ! Déjà, j’ai éliminé la télé de ma vie, je ne la regarde absolument pas… Je consacre également beaucoup de temps et à ma famille et à la musique : je fais partie d’un groupe de rock depuis 10 ans (je suis au chant et à la guitare). C’est complètement bénévole, c’est pour le plaisir même si on se fait payer pour les concerts, tout au bénéfice du groupe… Cela nous permet de faire des restos ensemble, de nous aider à aménager notre local, d’acheter du matos… Se faire payer, cela signifie que ce que tu fais prend de la valeur, sinon, les gens abusent de toi et de ton temps. Pour les dessins, c’est pareil : si l’on met des tarifs, cela signifie que ton travail prend de la valeur… Je consacre énormément de temps au dessin, en plus des préparations et de la gestion de classe mais je manque de temps, surtout que je fais paraître chaque jour plusieurs dessins sur mes comptes FB, Twitter et sur mon blog « Danger Ecole ». La gestion de ces outils Internet est vraiment chronophage (je dessine puis je scanne, et enfin, je publie sur tous les comptes). Pendant les vacances, je me consacre vraiment trop au dessin, tout le temps. De plus, il me faut gérer les mails que je reçois quotidiennement, lire les messages reçus sur mes différents comptes de réseaux sociaux et sur mon blog, les commandes, les sollicitations pour avoir un dessin,… Pour les commandes, c’est toute une organisation à mettre en place : il faut préparer les enveloppes de commandes, les factures, recopier les adresses,… Je publie moi-même les agendas que je vends, c’est une chose supplémentaire à maîtriser.

Concrètement, qu’en est-il de votre activité complémentaire ? Est-ce une auto-entreprise ? Une micro-entreprise ? Avez-vous dû demander une autorisation de cumul d’activité ?

Une reconversion définitive n’est pas envisageable pour l’instant : j’ai une famille, je ne peux pas prendre le risque de ne plus être enseignant et de ne plus toucher de salaire fixe. Mais, depuis 3 ans, je suis auto-entrepreneur. Au début, je dessinais pour la famille, les amis, je vendais certaines de mes créations sans être «installé ». Maintenant, tout s’est précisé : je facture, je déclare. L’auto-entreprise est, selon moi, la meilleure solution pour vendre l’agenda, les tampons, mes créations dessinées sur des produits dérivés ou sur des t-shirts de manière légale.

Je suis soumis à l’autorisation de ma hiérarchie et je dois refaire la demande chaque année, et à mon IEN, et au DASEN de mon Académie. J’ai obtenu mon autorisation de cumul d’activités facilement, j’ai soumis mon projet et comme mon activité rentre dans le cadre des œuvres de l’esprit, il a donc été accepté. Les activités d’artisan ou de commerçants peuvent être refusées par exemple, mais le fait de donner des conférences, de peindre des tableaux, d’écrire des livres ou - que sais-je encore - rentre dans cette catégorie des œuvres de l’esprit. Elles sont autorisées sous condition qu’elles n’interfèrent pas avec la fonction d’enseignant. Pour mes albums de BD « Danger Ecole », c’est encore différent, je suis payé en droits d’auteur. C’est un éditeur qui publie mes albums, j’ai signé un contrat d’édition avec des droits d’auteur (10%), ça ne rentre pas dans l’activité d’auto-entrepreneur. Inversement, les agendas sont en auto-publication, ils rentrent donc dans le cadre de l’auto-entreprise, de même que les dessins que je peux vendre en plus. Spreadshirt est une société externe qui gère mes produits dérivés : je dessine mais aucun objet n’existe vraiment sauf s’il est commandé (on le fabrique alors à l’unité). Je peux donc créer autant de modèles que je veux et créer à la demande ; si un modèle fonctionne bien, pas de risque de rupture. Cela me permet de prendre une petite marge.

Pour bien comprendre, voici un exemple : le t-shirt uni vaut 10 euros, une impression (devant ou dos ou manche) 3 euros, trois impressions (devant, dos et manche) 3 euros. Un t-shirt à trois impressions vaut 19 euros, si je veux une marge, je le vends à 22 euros. Je récupère donc les 3 euros, TVA en moins. Pour l’auto-entreprise, concrètement, il faut effectuer un paiement trimestriel (une cotisation aux URSSAF) sur ce qui a été vendu (environ 22 euros pour 100 euros de gain). A l’époque, j’avais essayé de me renseigner partout mais personne ne savait vraiment à quoi correspondait mon activité. Les gens ne sont pas bien informés et les personnels académiques peu renseignés malgré la multiplication des projets externes à l’école. Mais maintenant, je suis dans les clous avec cette auto-entreprise. Merci à Internet en tout cas… Je n’avais pas programmé l’ampleur du phénomène, encore moins que tout cela pouvait me rapporter de l’argent. Ca a commencé très simplement en plus… J’avais monté un blog pour mon groupe de rock. Quand j’ai vu que ça marchait bien, j’ai commencé à faire un blog avec mes dessins sur l’école. Pendant plusieurs mois, ça ne m’a rien rapporté, juste la satisfaction de voir le nombre de connexions augmenter.

Avez-vous suivi un apprentissage, une formation pour vous perfectionner ?

Non, je n’ai jamais suivi aucune formation. Mais depuis 3 / 4 ans, à force de dessiner encore et toujours tous les jours, mes dessins se sont forcément améliorés.

Souhaitez-vous quitter l’école un jour pour vous reconvertir définitivement et entièrement vivre de votre passion ?

Ce n’est pas un souhait immédiat mais j’espère que ça me permettra de ne pas faire les années en trop… Si ça pouvait me permettre de partir un peu plus tôt… En même temps, si demain on me paie des 1000 et des 100 pour mes dessins, je vais avoir du mal à dire non ! Si ça continue à prendre de l’ampleur et si je gagne pas mal d’argent, je ne serais peut-être plus prof mais je deviendrais vite fou à rester enfermé toute la journée à dessiner… Avec les gamins, je l’avoue, je m’éclate. Pourtant, c’est crevant. C’est un métier dans lequel tu donnes une énergie pas possible. J’ai eu des classes « cool », sans stress,  pas bruyantes, et quand même, à la fin de la journée, tu es crevé car on ne peut pas faire ce boulot à moitié. Parfois, comme tout le monde, j’en ai marre d’aller à l’école : les mômes te pompent ton énergie, c’est un boulot hyper prenant, tu n’as pas un moment de répit en classe. En plus, le monde a changé et dans l’Education Nationale, on fonctionne toujours de la même manière ! Quand j’ai commencé, on ne nous mettait pas la pression… C’était plus simple. On a eu l’art de compliquer le boulot de manière délirante. Après, ça me fait peur de risquer de perdre ma passion : passer d’une passion à un gagne-pain, ce n’est pas la même chose. Pour l’instant, j’ai le luxe de refuser des demandes mais demain si je dois en vivre, je devrais démarcher, trouver des contrats sans arrêt, faire des trucs au rabais ou qui ne m’intéressent pas, bref, ça ne m’attire pas.

Est-ce que votre hiérarchie vous a déjà fait des remarques par rapport à ta seconde activité et aux travers de l’Education que vous dénoncez parfois dans vos dessins ?

Non, je n’ai jamais eu de soucis avec ma hiérarchie, jamais la moindre question. En même temps, je suis dans cette circonscription depuis une quinzaine d’années, mes supérieurs savent qui je suis. Mon inspecteur m’a envoyé plusieurs fois dans les zones chaudes car il sait qu’il peut compter sur moi pour assurer. Une fois, mon inspection m’a même commandé des dessins pour un projet.

Fort de votre expérience de dessinateur, comment menez-vous vos séances d’arts visuels ?

Ca m’arrive de leur apprendre à dessiner un personnage de BD. J’aime beaucoup travailler avec la peinture. Je travaille beaucoup sur les mélanges de couleurs, sur l’observation et la dexcription des résultats… Avec huit couleurs, on peut faire des milliers d’autres couleurs. Du coup, il leur est interdit de mettre la couleur du tube sans la transformer sur leurs productions. Je leur demande de travailler sur du non-figuratif (je leur interdit de représenter quelques chose de reconnaissable); eux, ça les bloque toujours un peu au départ, mais ensuite, ça les libère. Après c’est fantastique : tout le monde a raison quand tu demandes de produire quelque chose ! J’aime aussi que les productions aient un cadre blanc autour, ça les réhausse, les met en valeur, à l’inverse d’une production réalisée en bord de feuille. Je fais beaucoup de peinture, beaucoup d’arts visuels. Par contre, pendant la séance, on produit… On ne passe pas notre temps à nettoyer le matériel ou autre. Chaque élève a une pochette, avec ses pinceaux, sa gouache, sa palette. A la fin de la séance, tout est rangé dans la pochette en plastique et nettoyé à la maison sinon tu perds du temps à nettoyer en classe, il faut arrêter au moins 20 minutes avant pour s’en sortir et ça met du bazar dans la classe, dans les couloirs, aux WC,… C’est  un fonctionnement qui vise l’efficacité. En début de séance, on s’organise, un élève distribue du journal, un autre distribue les gobelets, un autre encore distribue de l’eau puis 5 minutes avant la fin, c’est rapporté à la maison.

Aujourd’hui, quel regard portez-vous sur l’école de la République ?

Je n’aime pas qu’on mette les enfants dans des boites et aujourd’hui, c’est exactement ce qu’on fait : mettre des enfants dans des boites d’évaluation. J’essaie donc de ramener de l’humain dans ma classe, de donner beaucoup avec le cœur. Aujourd’hui je suis guitariste grâce à ma maitresse de CE2, ça m’a construit. Je suis sévère avec les gamins mais malgré tout j’essaie de redonner de l’humanité aux échanges. D’oublier le boulot de technicien qu’on essaie de nous imposer : les évals, les notes, les pourcentages, c’est rassurant. Mais ça ne reflète pas la réalité de l’école. L’école, c’est vivre avec les  enfants. Les enfants ressentent tout, mais ce que tu leur apportes, c’est difficile à quantifier. Tout est devenu trop  scientifique : on recherche une façon de se sécuriser et de se blinder face à des gamins de plus en plus durs. Cela transparaît dans mes dessins et c’est ce qui plaît : les enseignants s’identifient aux situations que je mets en scène. Je ne m’en rendais pas compte non plus. Au début, je me disais que ça n’intéressait que moi car je racontais ce que moi j’avais vécu. Mais maintenant, j’ai ouvert des yeux, c’est immédiat je le vois de suite : quand je raconte quelque chose, ce sont des centaines voire des milliers de profs qui ont déjà vécu le même truc, c’est énorme !

Pour en savoir plus :

Le blog de Jack Koch « Danger Ecole » : http://dangerecole.blogspot.fr/

Les deux pages Facebook de Jack et celle des « Amis du blog Danger Ecole » :

https://www.facebook.com/jack.koch.568?fref=ts

https://www.facebook.com/jack.kochdeux?fref=ts

https://www.facebook.com/groups/10001029834/

Jack publie aussi ses dessins sur Twitter où vous pouvez également le suivre si vous avez un compte : https://twitter.com/dangerecole

Le portrait de Jack que nous avons réalisé en juin : http://www.cafepedagogique.net/lemensuel/lesysteme/Pages/2013[...]

L’hommage à Jack rédigé dernièrement par une bloggeuse quimpéroise : http://dequimperatelaviv.wordpress.com/2013/04/12/hommage-jack-[...]

Une interview accordée en janvier par Jack à « vousnousils, l’e-mag de l’éducation » : http://www.vousnousils.fr/2012/01/02/jack-koch-grace-a-mon-blog[...]



Les axes de réflexion de Vincent Peillon sur la reconversion des personnels de l’Education Nationale

Le 16 juillet 2013, des discussions et des débats ont eu lieu au Ministère de l’Education Nationale en présence de Vincent Peillon sur le thème des métiers et des parcours professionnels de l’Education Nationale. Pour la première fois depuis sa nomination, le ministre, qui est lui-même un reconverti de l’Education Nationale puisqu’ancien professeur, agrégé de philosophie, semble s’interroger sur la pénibilité du travail des enseignants et les faibles possibilités de reconversion qui s’offrent à eux. En plus des nombreux chantiers de réflexion déjà en cours et arguant sur l’idée que les personnels de l’Education Nationale sont en première ligne pour amener la réussite de la refondation de l’école, des chantiers concernant notamment l’exercice du métier enseignant et les pratiques professionnelles ont été lancés.

Fin juin, le vote de la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’Ecole de la République marquait l’avènement d’une première étape dans le projet global et général de la refondation de l’école. De nombreux chantiers sont aujourd’hui en cours, des missions et des groupes de réflexion engagés. Les thèmes sont nombreux et parmi eux, beaucoup touchent de près l’école primaire, qui est l’axe d’action prioritaire du Ministre.

Parmi les dynamiques en cours, pensons à la réforme des rythmes scolaires mise en place aux rentrées 2013 et 2014, la consultation des enseignants dès 2013 pour amener une rénovation des programmes de 2008 pour la rentrée 2015, l’évolution de la politique actuelle des cycles et la scolarisation des moins de trois ans, l’augmentation des recrutements pour installer un dispositif « plus de maîtres que de classes » et la mise en place d’un conseil école-collège dès l’année scolaire 2013-2014. Tout cela s’accompagne d’une réforme de la formation des enseignants avec la création des ESPE (Ecoles Supérieures du Professorat et de l’Education) et d’une mise en valeur du numérique à l’école (meilleure formation des personnels, évolution des pratiques et des enseignements, innovations pédagogiques,…).

Des chantiers restent à ouvrir comme l’a souligné le ministre ; il s’agit d’une réflexion sur l’éducation prioritaire (quel diagnostic et quelles solutions possibles ? Quels moyens ? Quelles modalités d’exercice des personnels ?) ainsi que des réformes générales à mener pour le collège et le lycée, qu’il soit général, technologique ou professionnel.

Mais s’il y a un domaine qui a interpellé Aide aux Profs, c’est bien l’engagement des discussions souhaité par Vincent Peillon sur les métiers et les parcours professionnels des enseignants, pour la première fois depuis sa nomination à la tête de l’Education Nationale. Afin de mettre en cohérence les missions et les parcours professionnels des personnels par rapport aux enjeux pédagogiques, 13 groupes de travail ont été mis en place à la rentrée. Tous les personnels de l’Education Nationale sont visés, voici la liste de ces groupes de travail :

-           Les directeurs d’école

-           Les RASED

-           Les formateurs des 1er et 2nd degrés

-           Les conseillers pédagogiques

-           Les professeurs des écoles

-           Les enseignants du 2nd degré

-           Les conseillers principaux d’éducation

-           Les chefs de travaux

-           Les personnels de direction

-           Les personnels d’inspection

-           Les personnels administratifs

-           Les personnels médico-sociaux

-           Les personnels contractuels


Nous déplorons ce cloisonnement par fonction, qui signifie que vont être étudiées en priorité les échelles indiciaires, les revalorisations, les hors classes…alors que les parcours professionnels auraient mérité de la transversalité. Nous estimons qu’avec un pareil cloisonnement, la bonne volonté du ministre s’est déjà écartée des résultats attendus.


Ces discussions sont programmées de septembre 2013 à juin 2014 : selon les groupes, le thème des parcours professionnels et de la formation devrait être abordé. Aide aux Profs souhaite que ces groupes amènent de véritables possibilités concrètes afin de solutionner la volonté de mobilité de nombreux enseignants (39% ont songé au moins une fois à quitter leur métier si c’était possible faciement, selon un sondage MGEN en janvier 2012), y compris en cours d’année scolaire, en réussissant à se libérer des contraintes d’un calendrier trop rigide et responsable en partie des difficultés de mobilité professionnelle.

Les enseignants, qui constituent 20% des personnels de la fonction publique, sont les cadres qui ont les primes les plus faibles (bien moindre qu’un agent de catégorie C) et se voient empêchés dans leur mobilité en cours d’année, malgré l’existence de la loi du 3 août 2009 sur les parcours professionnels, qui permet à tout agent de l’Etat de déposer un préavis de mobilité de trois mois. Enseigner est donc une impasse professionnelle quand on souhaite, à un moment, en sortir, en dehors des concours internes de l’Education Nationale, ce qui explique grandement la désespérance de milliers d’enseignants chaque année.


Ce n’est pas le cheval de bataille prioritaire du Ministre actuel mais rappelons que le métier n’en sera dès lors que plus attractif et apte à faire face à la crise des vocations qu’il rencontre actuellement. En effet, les conditions de travail et de valorisation professionnelles sont aujourd’hui trop dégradées pour continuer à motiver les personnels sur le long terme, d’autant plus que l’on s’achemine vers des carrières de plus en plus longues.

Courant octobre, le premier ouvrage co-édité avec Aide aux Profs et un éditeur d’un autre pays d’Europe, ancien enseignant ayant réussi sa seconde carrière, bouleversera la perception des 13 groupes de travail sur la réalité précise du métier d’enseignant, liée aux effets désastreux du précédent quinquennat. Ce sera enfin le moment, pour le Ministre et les services de « RH », de « GRH » et de « DGRH » de l’Education nationale de mieux comprendre le travail qu’aura été celui de l’association Aide aux Profs depuis 2006, à l’échelle de toute la France, en ayant accueilli plus de 6 200 enseignants à ce jour sur son site web, de manière personnalisée, et humaine. Aide aux Profs reste aujourd’hui disponible pour les groupes de travail qui le souhaiteront afin de partager son expertise des métiers, des parcours professionnels et des secondes carrières que recherchent les enseignants.



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Par fjarraud , le lundi 23 septembre 2013.

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