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Lycée 

Par Julien Cabioch 

 

Du BYOD en SVT 

Comment faire découvrir la biodiversité environnante aux lycéens en utilisant les nouvelles technologies ? Deux enseignants de SVT, Virginie Marquet du lycée français de Vienne et Nathalie Fabien du lycée Sud Médoc La Boétie (33) travaillent ensemble en classe inversée sur le même projet. L’objectif est, entre autre, d’identifier différentes espèces dans le bassin d’Arcachon et sur les bords du Danube. Les lycéens des deux établissements collaborent, échangent et se corrigent via Twitter. Rencontre avec ces deux enseignantes 4.0 mises en relation par le MOOC de la plateforme FUN.

 

Présentez votre projet " ByoDiversité" 

 

Pour chacun de nos lycées, il s'agit de construire des connaissances  sur la biodiversité environnante des établissements : le bassin d'Arcachon et la Lobau à Vienne. Il s'agit d'une initiation au développement durable et à la conservation de notre biodiversité.

 

Les projets reposent sur une utilisation des outils multimédia d’identification des espèces de manière collaborative : utilisation de plusieurs applications de science participatives commepl@ntnet pour le recensement des plantes et connaître le nom botanique de l’échantillon. Egalement CarNat qui est une application de géo localisation et gestion de points GPS. Ces données contribuent à l’Inventaire National du Patrimoine Naturel (INPN), programme de restitution de données naturalistes en France.

 

Les élèves vont aussi utiliser anymals pour l'identification des animaux et plantes locales, Obsmapp pour faire un lien avec la carte, Ornidroid pour  reconnaissance des oiseaux etproject Noah.

 

Pour communiquer entre professeur et élèves de chaque classe et entre classes, on compte sur Twitter.

 

Concrètement, comment s’organise le travail au cours des séances ? Que font les élèves ?

 

L'utilisation des outils du Web 2.0 et 3.0 par les élèves nécessite une intégration progressive de séance en séance de ces outils numériques.  Ma première séance a porté sur l'observation d'un écosystème « goutte d'eau ». Sur le plan cognitif, la notion d'écosystème et de réseau trophique a été étudiée par les élèves pour l'appliquer ensuite le jour de la sortie à l'échelle de la Lobau.

 

Sur le plan méthodologique :

•          ouverture du compte Google Drive,

•          signature par les parents de la charte d'utilisation de Twitter.

•          Création de schéma bilan et de synthèse collective au sein de la classe.

 

Ces outils numériques sont ensuite réinvestis au cours des autres séances qui correspondent au programme, car il ne faut pas oublier que nous avons aussi un programme à tenir.

 

Concrètement en classe cela n'a  été facile pour aucune de nous deux car la classe inversée est quelque chose de nouveau pour les élèves. Ils attendent un cours dicté par le professeur et n'ont pas compris que ce sont eux qui vont construire leur savoir avec l'aide du professeur qui l'accompagne ou avec les aides numériques mises en place.

 

L'utilisation du numérique n'est pas évidente pour tout le monde. Un faible pourcentage avait déjà utilisé Google Drive. L'utilisation des réseaux sociaux n'est pas possible en classe car l'accès est interdit par l'établissement. On doit donc utiliser le smartphone des élèves or un grand nombre n'en ont pas. Ils peuvent en rentrant chez eux communiquer mais là les élèves se trouvent seuls face à Twitter, ce qui n'est pas évident en ce début d'année.

 

L'utilisation des applications pose plus de problème sur le plan technique : un certain nombre d'élèves n'ont pas de téléphone portable avec écran, ou le téléphone n'a pas assez de carte mémoire ou il est trop vieux (c'est le cas pour mon téléphone) ou incapacité de les télécharger. Bref, seul 1/3 de la classe a pu avoir l'ensemble des applications. Nous n'avons pas de tablette dans mon établissement, donc je ne peux utiliser cette solution.

 

Vous travaillez avec Nathalie Fabien, enseignante de SVT, dans un lycée bordelais. Quels échanges avez-vous mis en place entre vos classes ? Dans quel but ?

 

L'échange inter lycée a pour but de faire découvrir aux élèves un autre environnement de biodiversité par une classe de leur tranche d'âge. Certains ne sont jamais aller en Autriche ou en France. C'est un moyen d'ouverture vers les autres sur des champs de travail commun.

 

Un autre but est d'apprendre à communiquer sur le plan scientifique pas simplement pour soit mais aussi pour les autres. Au cours de l’année et avec l’aide d’un projet on va  faire évoluer nos pratiques pédagogiques de telle sorte que les élèves soient de plus en plus acteurs dans l’appropriation du savoir.

 

Un autre objectif est de mettre en place une classe inversée collaborative synchrone et asynchrone : ménager son espace de travail  en classe, dans un espace numérique (Pas si facile pour des élèves de seconde).

 

L’utilisation de site de science participative ou de site tel que Wikipédia permet de s’ouvrir aux autres: ouverture de l’espace classe au monde ; on ne travaille pas seulement pour soit mais pour les autres également. L’utilisation d’applications permet de collaborer au sein de réseaux de science participative.

 

En résumé, l’usage du BYOD facilite les échanges, la collaboration, l’intelligence collective, développe la créativité, permet l’ouverture au monde puisque tout est au bout de nos doigts en un clic.

 

Deux sorties simultanées sont prévues : une sur les bords du Danube et l’autre dans le bassin d’Arcachon. Comment allez-vous exploiter ce travail de terrain ?

 

A Vienne, sur le terrain, les élèves doivent prendre des photos avec leur téléphone portable. La fonction GPS doit être absolument mise en fonction. Le 3g n'est pas nécessaire sur place. Ils pourront en rentrant à la maison, utiliser le site internet correspondant aux applications pour ceux qui n'ont pas de téléphone portable. Pour ceux qui ont la 3g, ils ont pu reconnaître les espèces différentes.

 

Ils ont aussi un cahier de terrain papier qu'ils doivent remplir et des échantillons d'eau sont prélevés et seront étudier en physique chimie avec le collègue de cette discipline. 

 

 A Bordeaux, ma collègue travaille sur ce projet avec le professeur de Physique-chimie de sa classe. On peut ainsi travailler en interdisciplinarité. Le collègue de Physique-Chimie s’est chargé en particulier des mesures physico-chimiques effectuées sur le terrain. Ces mesures permettent d’apporter une réelle plus-value aux notions étudiées en cours de Physique-Chimie à partir du concret.  

 

Ces données de terrain seront ensuite traitées par groupe.  A la Lobau, il y a 4 écosystèmes. Il y a donc 4 groupes. Les élèves vont rédiger une présentation de leur écosystème avec Google doc, construire les réseaux trophiques, présenter les espèces animales et végétales. Je vais prendre 15 minutes chaque semaine sur l'heure et demi hebdomadaire pour les guider dans leur travail.

 

A bordeaux, ma collègue travaille de la même façon mais a intégré ce projet dans le cadre de l’enseignement d’exploration MPS. Une partie de ce travail sera réinvestie dans le cadre du cours. La mise en place des groupes est différente aussi. Elle et son collègue ont fait le choix de 4 ateliers sur lesquels les élèves se sont inscrits en fonction de leur goût:

 Atelier1: responsable du répertoire des espèces observées sur le terrain (récolte des données: prise de notes, photos, vidéo…)

Atelier 2: responsable des mesures physico-chimiques effectuées sur le terrain

Atelier 3: responsable des croquis effectués sur le terrain (environnement avec photos, géo localisation, exposition, utilisation d’images interactives …)

Atelier 4: responsable de la rédaction (notamment par écriture collaborative)

 

Quand ils auront fini, nous communiquerons leur travail à l'autre classe qui les évaluera (évaluation par les pairs). La production finale peut-être une vidéo, un power point etc. La grille d'évaluation sera la même pour les deux classes, grille mis au point par les professeurs.

 

La touche finale sera la rédaction de la page Wikipédia de la Lobau et celle du bassin d’Arcachon. Nous allons participer au concours Wikipédia des lycéens.

 

Comment avez-vous rencontré cette collègue de SVT ? Comment avez-vous mis en place ce projet ? Quelles sont vos sources de motivation ?

 

J'ai rencontré Nathalie sur un Mooc de la plateforme FUN : « un Mooc de A à Z ». Nous avons, avec plusieurs collègues, réfléchi sur un scenario pédagogique de « Mooc classe inversée ». Suivre ce Mooc permet de prendre conscience de l'importance de la scénarisation. Puis ensemble nous avons suivi le Mooc « Ma pédagogie à la sauce Web 2.0 » où nous avons mis en place notre projet. Ces deux Mooc ont été complémentaires : nous avons scénarisé notre projet « à la sauce classe inversée et web numérique ». Notre projet a été ensuite présenté au Clic 2015 en juin 2015 comme projet collaboratif et présentation de la classe inversée 3.0 et 4.0.

 

Vous travaillez également avec les élèves sur leur identité numérique professionnelle. Comment s’organise votre démarche ?

 

Depuis plusieurs années, nous avons au sein des établissements des « soucis » avec les réseaux sociaux qu'utilisent nos élèves. En parallèle, l'accès à ses plateformes est interdit dans les établissements. Nous, éducateurs, nous nous trouvons dans une situation où nous ne pouvons les former à utiliser à bon escient ses outils.

Après avoir suivi le « Mooc DIY EMI », j'ai pris conscience que nous devons éduquer nos élèves aux médias, dont les réseaux sociaux font partie.

 

Tout commence avec eux en leur demandant de « googoliser » leur prénom et nom sur internet et de répertorier vidéo, image, texte qu'il ne souhaite pas avoir sur la toile.  Ils prennent alors conscience qu'ils ont une identité numérique. Est-ce qu'elle correspond à ce qu'ils veulent ? La réponse est très souvent non. Mon objectif est qu'ils sortent du lycée avec une identité numérique professionnelle et qu'ils continuent à  construire cela dans le supérieur : les élèves produisent  des vidéos sur leur propre chaîne YouTube, des documents en ligne, utilisent les réseaux sociaux, rédigent dans Wikipédia. Ils doivent avoir, en sortant du lycée, une nouvelle page Google quand ils « googelisent » leur nom.

 

Pour cela, je fais l'accompagnement personnalisé au lycée et je demande de suivre mes élèves de 1ere S en TS. J'ai ainsi 1 heure par semaine de décembre à juin. Je les forme aussi en parallèle à la licence creative commons. Mes élèves deviennent ainsi des utilisateurs éclairés d'internet et participent à la construction de leur identité numérique. Ils ne la subissent plus.

 

Propos recueillis par Julien Cabioch

 

Le site Classe inversée en SVT

Le cahier de terrain

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Par vivelessvt , le mercredi 16 décembre 2015.

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