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JP Gallerand - E Jourdan

Les sciences de la Terre, un outil pour l’acquisition de compétences pluridisciplinaires.

A l’école de Poucet, Véronique Maufay, chercheur accompagnant, Pierre Jacques Chiappero, minéralogiste MNHN et Philippe Léotoing, IA adjoint ien Clermont ville nous font part de leur expérience dans une école, expérience transposable en collège. 

 « L’école de Poucet de l’utilité des petits cailloux des grands chemins » et son équipe a orienté ses travaux sur la thématique : « en quoi les sciences de la Terre sont un outil pluridisciplinaire à l’école pour l’acquisition de compétences pluridisciplinaires à l’école » maternelle, élémentaire et au collège.
« Jeux, Moi, et la Terre » ( Puy de Dôme ), « Bâtir Paris, ou la découverte de l’histoire du calcaire lutétien », « les minéraux font de la géométrie » (CARDIE Paris 2009-2012),« promenade géologique autour de l’école » , « Mon cailloux raconte une histoire ( CARDIE Orléans Tours projet en cours ),  illustrent cette éducation au regard par l’analyse scientifique et la démarche expérimentale à partir de l’objet minéral comme outil d’apprentissage par compétences ou des fondamentaux ; conformément aux IO. Des projets qui permettent à l’enfant de se révéler dans l’acte d’apprendre tout en prenant conscience qu’il fait partie d’un tout la planète Terre régit par le règne animal, végétal mais aussi minéral. Les thématiques autour des géosciences proposées par des équipes éducatives pluridisciplinaires en partenariat avec des chercheurs en sciences de la Terre ; des enseignants engagent leur élèves dans la classe pris comme terrain d’expérimentation est la classe au quotidien. Ces activités, nouvelles ou moins nouvelles selon les contextes d’enseignement sont supervisés dans le cadre des dispositifs d’innovation par les CARDIE au niveau des académies.
En effet chaque enfant vit et évolue dans un environnement et un patrimoine qui appartiennent à un contexte géologique particulier. C’est dans ses paysages et les bâtis de sa région qu’il grandit, qu’il joue et trouve ses repères. C’est là aussi que l’enfant se fabrique un ensemble de références mentales qui lui permettront de se développer dans un monde à sa mesure. Le temps de l’enfance, c’est le temps de l’observation et de l’apprentissage, c’est aussi celui qui permet à l’Homme de découvrir et de s’ouvrir au monde pour tenir son rôle dans une société.
L’objectif de l’école de Poucet est d’apprendre au travers une démarche scientifique particulière la géologie, comment construire des apprentissages fondamentaux pluridisciplinaires à tous les niveaux et découvrir l’élément minéral et son application au quotidien.  C’est  aussi l’occasion de mettre en pratique une pédagogie coopérative et mutualisante  dans le laboratoire de la classe pour l’enfant co-chercheur inventeur de son apprentissage où l’adulte est accompagnant – enseignant et/ou scientifique   l’aide à valider ses acquis et à rebondir pour une meilleure préhension de son apprentissage, de persévérer pour se dépasser.
La rencontre avec l’objet, le premier regard, le temps pour l’enfant du tâtonnement, de l’observation et de l’interrogation, de la construction d’un référentiel propre pour l’établissement de savoirs et de méthodes, l’observation réfléchie de l’objet minéral et la mise en œuvre de procédés d’observation propre au géosciences l’aidera à mettre en place des stratégies et des concepts transférables et communicables.


La minéralogie et l’étude des cristaux, la reconnaissance des figures géométriques connues et inconnues, la manipulation de ces objets ayant pour sens premier l’esthétique implique non seulement que l’élève doit faire appel des notions acquises dans les classes précédentes en géométrie. Se rappeler le nom des figures permet aussi la mise en place de connaissances par la construction d’un référentiel évolutif propre. L’élève chercheur par la manipulation et l’observation pourra établir des axiomes universel et des compétences précises à propos de la connaissance des volumes, des solides de Platon et pourra à postériori en reconnaître d’autres, savoir les reproduire dans l’espace ou par le dessin.
De même qu’un simple objet factuel d’intérêt, le « caillou » ramassé aux alentours de l’école ou dans la cour de récréation, est devenue un objet intellectuel, base sur laquelle, d’un commun accord entre enseignant et chercheur, a été bâtie la recherche de l’enfant. Entre l’enseignant et l’enfant existe désormais une part de découverte commune dont l’enfant a le sentiment d’être le maître.
C’est avec cette approche originale des sciences naturelles, dans ce contexte d’apprentissage par compétence, par la manipulation et l’observation raisonnée que l’enfant peut réaliser que ses acquis personnels ne sont pas inutiles et qu’il doit persévérer pour améliorer ses connaissances pour accroître son savoir et mieux comprendre le monde. Il prend alors conscience qu’il apprend, qu’il grandit.

La démarche de « l’école de Poucet » encourage à participer à une logique commune à la classe et l’enseignant à utiliser d’autres méthodes liées à la méthodologie de la recherche tant en sciences de la Terre qu’en sciences humaines dans son projet professionnel. Enfant, enseignant et « groupe de classe » sont les acteurs de l’élaboration de la connaissance et partie prenante dans le laboratoire qu’est la classe. Le questionnement, la mise à jour des obstacles sont le passage obligé pour la mise en œuvre d’un vrai projet et justifier d’un dialogue pédagogique auquel le chercheur scientifique, dans sa mission d’accompagnement, se doit aussi de répondre.

Cette utilisation des sciences de la Terre comme outil offre aux enseignants y compris de l’école maternelle à l’école élémentaire de prendre conscience de l’intérêt de saisir ce que vit l’enfant dans l’élaboration d’une démarche expérimentale. Elle a aussi montré l’importance de l’enseignement dans la transmission des savoirs traditionnels. L’enfant en recherche, redécouvre aussi la communication et l’utilité des mots, de la syntaxe, de la sémantique. Il réalise que l’objet géologique est polysémique et peut se décliner à l’infini, par le dessin, le chant, la vidéo, les maquettes, les livres, et toute autre forme de production... Ce n’est plus une brutale mémorisation de faits intellectuels institués par un monde d’adultes pour réussir dans la vie que l’enfant supporte, mais des objets de sens qui s’ouvrent à lui, l’objet minéral. Son avenir est inscrit dans sa manière de procéder en prenant en compte aussi le bâti qui est autour de lui. Par sa curiosité naturelle de faire des châteaux de sable, de chercher les trésors dans la pierre ou d’écrire à la pierre de craie, sa participation innée à la découverte du monde, on comprend mieux sa pensée, son ressenti, ses attachements et surtout son investissement spirituel qui font de lui un être critique, responsable et un citoyen de demain.
Comme pour l’enfant, le groupe de travail classe peut partir à la découverte de son environnement direct et commun : la classe, la cour de récréation, la rue, puis l’école... Dans cet univers apparemment clos, de simples roches deviennent peu à peu le contenu d’un patrimoine pour le groupe. La difficulté de récolte, la rareté donnée à certains objets créent des affections. Il est alors nécessaire de déterminer ensemble, par des critères, les objets de la recherche, de les codifier pour les déterminer et les conserver. L’enfant observe, recherche, découvre, utilise les sciences de la Terre comme un outil d’interdisciplinarité. Seulement, la passion, l’engouement, l’accumulation des objets ne sont pas du domaine de la recherche en science. C’est à ce moment que le scientifique, par la maîtrise des concepts, a toute sa place dans une équipe pédagogique. Tenant compte de la réalité des faits en matière de pédagogie, le projet des enseignants prend toute sa valeur. Il s’agit ici d’aider l’enfant à recadrer, recentrer, réduire ses engagements pour ne pas le laisser se perdre dans des méandres cognitifs dont il doit rester maître.
De cette action axée sur l’expérimental que l’enfant éprouve au quotidien, parfois inconsciemment, ce dernier est alors capable de construire des concepts scientifiques comme la structure atomique, la formation de la Terre,… par la modélisation et toujours en référence avec le quotidien. Un des objectifs autre de l’atelier et donc du projet, était de mettre en place des expériences à moindre coût, à partir d’objets familiers à l’enfant. Puisque l’expérience, sans danger, peut être reproduite à la maison, l’enfant qui mène l’enquête à l’école et sur le terrain peut ainsi continuer à la mener hors de l’école, par exemple, chez lui.


Le scientifique, acteur du projet en tant que membre de l’équipe pédagogique, qui intervient en classe, est aussi présent pour soutenir l’enseignant dans sa pratique. Ensemble, ils peuvent se lancer ce procédé didactique en l’adaptant selon les besoins de la classe et en lui donnant de multiples perspectives qui en font toute sa richesse. Les sciences de la Terre peuvent s’appliquer à toutes les disciplines comme le français, les mathématiques, l’histoire, la géographie, l’éducation physique, les arts plastiques, sans oublier l’apprentissage de la langue … Si par la parole l’enfant a du mal à restituer les observations et les actions menées, cette démarche lui permet de trouver des moyens d’expressions compensatoires par son aspect transversal. L’enfant trouve ses repères dans toutes les disciplines abordées par les programmes scolaires. Ce n’est pas parce qu’un enfant est d’origine étrangère et maîtrise avec maladresse la langue du pays d’accueil qu’il ne réfléchit pas et ne construit pas ses repères. Par une approche ludique le projet « École de Poucet » permet de déboucher sur des concepts scientifiques et notamment sur la découverte du monde minéral quels que soient le niveau de l’enfant et sa possibilité à s’exprimer dans un langage clair. Il repense et reprend certains événements scientifiques à son compte, pour créer sa problématique et l’élargir à d’autres compétences et communiquer de façon structurée et rassurante. L’enseignement au média est alors un support essentiel à cette démarche. Écrire pour lire, être lu, partager la connaissance et agir dans une société en mouvement.
À titre de conclusion deux témoignages :« Les sciences de la Terre sont à la portée de tout le monde puisqu’il s’agit avant tout d’aborder des notions à travers l’environnement quotidien. Le matériel pour réaliser les expériences est très peu coûteux (pâte à modeler pour relever des empreintes, craie, sel, farine…) et fait partie de la vie quotidienne de l’enfant qui peut retrouver et utiliser ces produits aisément, notamment chez lui. De plus, les chercheurs en pédagogie s’accordent sur le fait qu’un apprentissage pour être efficace, doit donner au préalable aux élèves, une culture, un vécu commun, car ces enfants viennent souvent de milieux géographiques très différents. Les sciences de la Terre réunissent ces conditions puisqu’elles s’appuient sur cet endroit qu’assurément tous les enfants ont en référence commune : leur classe, leur école.  La large ouverture transdisciplinaire permet aussi une plus grande richesse d’exploitation et un approfondissement des notions abordées » (Geneviève Despomaderes, enseignante en maternelle). « Ils ont observé des morceaux de roches avec des fossiles de coquillages, les mêmes que ceux qu’ils avaient vu dans les murs du quartier, escaliers de la gare de l’est, l’immeuble en démolition rue de paradis, etc. Ils ont observé, dessiné, moulé les traces des coquillages, comparé aux planches du Muséum, etc…« ils ont fait comme les chercheurs »…
Certains disent que maintenant, ils ne « regardent plus pareil qu’avant les pierres des bâtiments de Paris « et même pendant les vacances…Grande découverte : « à Paris, il y avait la mer, une mer chaude ! »… c’est ce qui les a marqués le plus ! Ils ont manipulé des cristaux de diverses sortes, les ont observé, comparé, dessiné, reproduit, « schématisé », etc…, en 2 ou en 3 dimensions, en plan et en volume … et de passer de l’un à l’autre…


Ils ont appris les notions de base de la minéralogie se rapportant à la géométrie plane et « dans l’espace » (le nom des volumes, les formes géom., les termes appropriés « face, arrête, sommet »etc...) et ils sont capables pour la plus part de les retrouver et de les utiliser à bon escient ». (Michelle Luton directrice de l’école Martel Paris Xe). Finalement , ils ont fait, à l’instar du Bourgeois Gentilhomme, non pas de la prose sans le savoir mais de la géologie, discipline trop souvent décriée  mais que l’expérience menée permet de totalement réhabiliter notamment au niveau de l’école  élémentaire en particulier grâce à toutes ses disciplines transversales constitutives  du projet pédagogique (géographie, géométrie, histoire, chimie, physique, etc…) qui montre pour peu qu’on veuille bien le montrer, son omniprésence dans la vie de tous les jours.     

Bibliographie :

http://respire.eduscol.education.fr/pg/profile/geodul

 

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Par JP Gallerand , le mardi 15 janvier 2013.

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