JP Gallerand - E Jourdan
Librairie de molécules
Banque de données participative et application en ligne pour les élèves et les enseignants
Interview de Paul Pillot
L’origine du projet
La visualisation de structures moléculaires en 3D a permis de rendre plus concrète l’étude de phénomènes biologiques jusque là inaccessibles à l’observation et à la manipulation directes. Les travaux précurseurs (entre autres Barrère, Dupont, Salamé « Structure et fonction des molécules biologiques » INRP 1997) ont fait leur entrée dans les classes et de nombreux enseignants ont commencé à constituer leurs répertoires de fichiers PDB en les enrichissant de leurs découvertes glanées sur le Web. Plusieurs répertoires ont été proposés en ligne sur des sites académiques ou personnels.
En 2003, devant la dispersion de ces efforts et de ces ressources, il nous (Jacques Barrère et moi même) est paru intéressant de proposer un site de référence pour les enseignants qui pourrait, à l’échelle nationale, fédérer les contributions de tous les collègues intéressés. L’idée de la librairie de molécules était née. Nous en avons dessiné les contours et proposé ensuite le concept aux représentants des différentes académies. Le projet a reçu un accueil très positif et rapidement des moyens ont été fournis par la DCTICE du ministère afin de soutenir le travail de l’équipe constituée et de parvenir en 2005 à la mise en ligne d’un site collaboratif auquel ont participé des collègues d’une dizaine d’académies différentes. Le site est hébergé grâce aux moyens techniques de la cellule TICE de l’académie Orléans-Tours.
L’enrichissement de la librairie de molécules
Lorsqu’un participant s’inscrit sur la librairie de molécules, il peut ajouter de nouveaux modèles moléculaires correspondant à une structure qui présente un intérêt pédagogique et/ou scientifique. Par exemple en relation avec une notion du programme (hormones, adn, etc…), parfois parce que cette structure a été utilisée pour un TPE (EPO, carraghénanes, etc…). Le modèle doit provenir d’une source qui en autorise la redistribution (ou l’accord explicite des auteurs doit être obtenu). La contribution est ensuite validée par des modérateurs avant d’être mise en ligne.
À l’heure actuelle près de 300 modèles sont ainsi proposés à la consultation.
D’autre part, la librairie de molécules propose aussi des applications pédagogiques, c’est à dire des propositions d’utilisation des modèles moléculaires dans une séquence de classe.
La consultation de la librairie de molécules
Comme pour de nombreuses banques de données, la consultation se fait par une requête dans un formulaire, ou bien par un parcours d’une arborescence dans laquelle sont classés les modèles (nous ne sommes pas biologistes pour rien !).
Chaque modèle est accompagné d’une description. Lorsque le modèle contient des protéines ou de l’ADN, la séquence de ces molécules est extraite et elle peut être téléchargée sous la forme de fichiers utilisables par des logiciels de traitement de séquences (Anagène, Géniegen, etc…).
Enfin des outils pour pouvoir manipuler la structure en 3D directement en ligne dans la fenêtre du navigateur sont disponibles par un simple clic.
À la fin d’un article, des liens renvoient vers des outils de visualisation en ligne et des données à télécharger, dont les séquences extraites des chaînes du modèle
Le module de visualisation simple permet de réaliser rapidement des traitements pour mettre en évidences les propriétés les plus remarquables du modèle.
Evolutions de la librairie de molécules
Depuis la mise en ligne de la librairie de molécules, une réflexion a été engagée sur la possibilité d’utiliser des modèles de minéraux dans l’enseignement. Si les données issues de la recherche sont disponibles, il s’avère que nos outils de visualisation classiques sont largement inadaptés. Dans cette perspective le logiciel MinUSc (pour Minéraux à Usage Scolaire) pour le traitement en ligne de structures minérales a été mis au point. Il est disponible dans les outils de la librairie de molécules.
Plus récemment, pour les besoins des concours internes de recrutement, une clé USB regroupant les principales ressources numériques à disposition des enseignants a été élaborée. Il a fallu adapter la librairie de molécules à ce nouveau support et une interface regroupant consultation et visualisation a été créée. Comme elle peut rendre plus accessible la consultation de la librairie, cette interface a été aussi mise en ligne.
Interface interactive de consultation de la librairie. Ici recherche par mot clé et affichage d’un modèle traité à l’aide des commandes proposées.
En intégrant étroitement ressources et traitements ce nouvel outil peut faciliter l’utilisation en classe des techniques de visualisation en particulier pour les collègues encore hésitants face à des outils parfois rebutants.
Les perspectives du projet
Dans une période de renouvellement des programmes de lycée, le contenu de la librairie de molécules est amené à s’enrichir.
Les statistiques de consultation du site montrent que certains lycées réalisent plusieurs centaines de connexion au cours de la même heure ce qui s’explique par le fait que la librairie de molécules est utilisée en TP par les élèves. La piste des outils de traitement en ligne paraît de ce point de vue prometteuse. Les outils de visualisation offrent des techniques nouvelles (calculs de surfaces, contacts, superpositions, etc…) qui pourraient être intégrées dans nos pratiques. Enfin, les outils gagneraient à être plus explicites pour les élèves en les informant sur la signification des représentations qu’ils réalisent.
L’outil de traitement en ligne MinUSc propose dans une fenêtre (bas-droite) une explication sur les commandes employées par les élèves
Les molécules ne sont pas l’apanage des SVT, et les nouveaux programmes de SPC amènent les élèves à découvrir les fonctions de la chimie organique par l’étude de modèles. Il paraît évident que l’on gagnerait à mutualiser nos outils et nos pratiques dans ce domaine. Une piste de recherche est engagée sur la librairie de molécules avec un outil en ligne, Scribmol, qui permet dans un navigateur d’écrire une formule chimique et de la voir se concrétiser en parallèle sous la forme d’une structure 3D, elle même ajustable.
Copie d’écran du logiciel en ligne ScribMol (mise en parallèle de l’écriture et de la représentation 3D)
Les possibilités sont déclinables à l’envi : coloration d’atomes, légendes, comparaison de structures dessinées pour un QCM, etc…
Un des intérêts d’une banque de données sur le web est la possibilité de mise en réseau des informations. Ainsi une structure biologique peut amener à l’étude de sa conservation au cours de l’évolution, à la mise en évidence de parentés structurales, à la recherche des gènes gouvernant sa formation, à la connaissances des moyens mis en œuvre pour la découvrir, etc… Ces informations peuvent être trouvées dans différentes banques de données et la librairie de molécules pourrait ainsi constituer une plateforme pour guider l’exploration de ces ressources.
La validation des données de la librairie de molécules, assurée par des professeurs de SVT nous renvoie parfois à nos limites, même si les publications scientifiques sont de plus en plus accessibles. À ce niveau un partenariat avec la recherche est souhaitable et commence à être engagé.
Pour soutenir ce développement, la librairie de molécules est engagée cette année dans les TRAvaux interAcadémiques Mutualisés ce qui doit permettre de dégager d’une part des moyens et d’autre part une collaboration autour de ce projet.
Un retour aux sources, pour ce projet collaboratif par nature !
Adresse de la librairie des molécules :
http://www.librairiedemolecules.education.fr/