Dossier spécial : le racisme 

Editorial : Eduquer contre le racisme 20 ans après
Après Auschwitz, il est difficile de croire que l’éducation soit un rempart contre le racisme et l’antisémitisme. Pourtant, il est plus que jamais nécessaire de mobiliser la raison contre la barbarie.

Un certain nombre d’enseignements ont été tirés des 20 années d’engagement des enseignants, des éducateurs, des responsables associatifs, à l’occasion des Semaines nationales d’éducation contre le racisme, que je me propose de partager avec vous.

Il ne suffit pas de discours moralisateurs et incantatoires ; tous les éducateurs le savent. Mais tolérer un écart de langage, risquer une expression qui pourrait s’apparenter à du racisme ou à de l’antisémitisme est, pour beaucoup, un exercice trop douloureux. On est alors tenté de préparer les élèves, de les guider dans leurs prises de parole, de rappeler combien le racisme est condamnable. 

Or, c’est une condition sine qua non du dialogue que de construire des espaces de parole libres où peuvent s’exprimer des préjugés, des incompréhensions, se formuler des plaintes ou des revendications. C’est une condition nécessaire pour les déconstruire. Il est évidemment tout aussi nécessaire que toute séance de libre expression se termine par un rappel fort de la Loi, sa lettre et son esprit.

Plus positivement, pour lutter contre le racisme, il nous faut lutter pour… les valeurs de fraternité, d’égalité des droits, de justice sociale, de démocratie.

Ces valeurs républicaines ne sont pas des principes désincarnés. Elles doivent être vivantes dans les établissements scolaires.

Enfin, il faut que la lumière soit systématiquement faite sur toute affaire de racisme dans une école, un collège ou un lycée, et que l’on se refuse à toute généralisation. Faire se rencontrer les acteurs, se croiser les points de vue (y compris des parents) permet de faire face à ce qui est l’un des défis majeurs de notre système éducatif.

Nadia Bellaoui,
Secrétaire nationale de la Ligue de l’enseignement.


21 Mars : Journée contre le racisme
Que serait notre société si nous supprimions ce principe "Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits" ? Certes l'égalité reste un idéal difficile, toujours à atteindre, toujours remis en question, une quête. Pour autant l'affirmation de ce principe de civilisation s'impose comme un phare pour les sociétés démocratiques occidentales : nécessaire et éclairant. Le remettre en question, en atténuer le principe, ce serait accepter une société basée sur la discrimination dont nous ne voulons pas. Cet enjeu est parfaitement accessible aux élèves à tous les âges. A l'occasion de la Journée contre le racisme,le Café rappelle son dossier spécial. Les enseignants y trouveront des pistes pédagogiques, du primaire au lycée,  pour aborder la question en classe.Le dossier


Racisme et antisémitisme restent à un haut niveau en France
"Les chiffres témoignent d’une certaine stabilité, voire d’une diminution des actes à caractère raciste, xénophobe et antisémite. Quant au sondage de la CNCDH sur les attitudes de l’opinion publique à l’égard du racisme, de la xénophobie et de l’antisémitisme, il révèle une relative décrispation dans le rapport à l’Autre, même si les préjugés xénophobes n’ont pas disparu et restent à un niveau élevé". Après une année 2005 qui avait vu fleurir racisme et antisémitisme, le rapport 2006 de la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH) est plus optimiste. Cependant " certains éléments ne manquent pas de retenir son attention :  le nombre global de violences et menaces à caractère raciste, xénophobe et antisémite reste élevé par rapport à celui de la période des années 1995-1999 ;  l’antisémitisme connaît une hausse de 6 % ; les violences recensées ont un caractère de gravité accru et touchent de plus en plus les personnes physiques". Et la CNCDH parle d'un "climat de xénophobie latente".

Globalement l'année 2006 a vu la violence raciste diminuer de 10% : on dénombre 885 actions et menaces contre 974 en 2005. Mais les violences antisémites ont augmenté de 35%, le nombre d'agressions contre les personnes a doublé.
 
L'opinion publique semble largement pénétrée des idées racistes. Un tiers des Français se reconnaît raciste. Seuls 18% de la population pense que les races n'existent pas. 58% estime que "certains comportements peuvent justifier des réactions racistes". 56% pensent qu'il y a trop d'étrangers. " Tout se passe comme si les personnes interrogées adhéraient aux valeurs républicaines de tolérance, de respect de l’autre et d’universalisme d’un point de vue formel,  mais que d’un point de vue pratique certaines concessions doivent être faites à ce pacte républicain".

Il y a pourtant deux bonnes nouvelles. C'est d'abord la baisse des violences et menaces dans les établissements scolaires. Les actes racistes seraient en chute de20% et les actes antisémites de 40%. Près de neuf actes raciste et antisémites sur dix ont pour auteur des élèves et six fois sur dix ce sont les élèves qui en sont victimes. Mais un quart des actes a eu pour victime un membre du personnel des établissements scolaires. Les salles de cours sont, à égalité avec la cour de récréation, les lieux privilégiés des actes racistes.

La seconde bonne nouvelle c'est l'impact de l'instruction sur le racisme. "le niveau de diplôme et l’orientation politique sont les deux critères les plus liés à ce type d’attitudes : 35 % des non-diplômés se déclarent racistes, contre 16 % des diplômés supérieur à bac plus 2, de même que 46 % des personnes proches d’un parti de droite gouvernementale, contre 15% des personnes proches d’un parti de gauche gouvernementale et 90 % des proches du Front national".

Mais, pour Nonna Meyer et Guy Michelat (Cevipof), une recomposition idéologique est en route. "L'ethnocentrisme dépend essentiellement de la position sur l’échelle gauche droite, et dans une moindre mesure du niveau de diplôme. Ni l’âge ni le sexe ni l’ascendance étrangère ni la pratique religieuse ne rentrent en ligne de compte une fois contrôlé l’effet des autres variables. L’aversion à l’Islam, elle, s’explique seulement par la pratique religieuse, autrement dit par le degré d’intégration au catholicisme, la religion dominante. Aucune autre variable n'a de coefficient significatif… L’échelle d’autoritarisme est de très loin la variable la plus prédictive, tant de l’ethnocentrisme ou valorisation de l’entre soi que de l’aversion pour l’Islam".

Que faire face à ce racisme rampant ? La CNCDH demande "une volonté politique forte et ciblée". Au ministre de l'éducation nationale elle demande la mise en place d'une éducation aux droits de l'homme et la sensibilisation des enseignants à ces questions. Le rapportUne vidéo antiraciste réalisée par un comité laïc à Beaubrun.


Discrimination : Des chiffres officiels
" Les analyses ont permis de constater que la discrimination était très forte à l’encontre de tou.te.s les candidat.e.s minoritaires, tant de sexe féminin que de sexe masculin et d’origine « noire africaine » ou d’origine « maghrébine ». Les écarts de traitement les plus importants ont été relevés à l’encontre des hommes et femmes d’origine « noire africaine », avec des employeurs qui ont choisi dans 4 cas sur 5 le/la candidat.e majoritaire. Lorsque les candidat.e.s minoritaires étaient d’origine « maghrébine », les employeurs ont favorisé 3 fois sur 4 le candidat majoritaire au sein des paires masculines, et 2 fois sur 3 la candidate majoritaire au sein des paires féminines. En terme de discrimination, ce dernier résultat n’est toujours pas satisfaisant ; c’est pourtant le meilleur enregistré sur toute l’enquête".

Le Bureau international du travail et la Dares publient les résultats d'une enquête importante sur les discriminations au travail. Elle porte sur 2 440 tests et 2 323 offres d'emploi. Elles attestent des pratiques discriminatoires qui très souvent rient les candidatures dès le CV.http://www.ilo.org/public/french/bureau/inf/download/discrim_france.pdf

Par fjarraud , le mercredi 18 avril 2007.

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