Edito 

Café

Poison


C’est loin, l’Afghanistan. Et franchement, depuis plus de dix ans qu’on en parle, on s’est habitués, non ? Les Talibans, la corruption, le pavot, les bandes rivales, les Américains, la guerre civile… Et l’Education.

 Hier, plus d’une centaine de jeunes filles tentant malgré tout d’étudier dans une école ont été empoisonnées. Selon toute vraisemblance, on a mis du poison dans le réservoir d’eau qui alimente leur école. Rappelons que de 1996 à 2001, les talibans au pouvoir avaient alors décrété l’interdiction de l’éducation des filles.

 Excusez-moi, mais je ne m’habitue pas. Je sais, c’est un peu idiot. Il y a plus de dix ans, déjà – une éternité médiatique -, je me souviens combien le visage lumineux d’une jeune fille prête à apprendre avait servi d’icône médiatique pour quelques combats associatifs, et contribué à remplir quelques camions de matériel destiné à ouvrir quelques écoles, notamment pour les filles. Elle s’appelle Sharbat Gula. Elle a été mariée de force à seize ans, a eu quatre enfants, dont un est mort à la naissance.

 So what ? Ce nouveau fait-divers rappelle cruellement l’éternel combat pour s’opposer aux fausses évidences des fatalités, des destins tracés et des renoncements. Quels que soient les progrès d’une société d’humains, l’avenir n’est jamais sûr, et les obscurantistes ne sont jamais loin. Ils n’ont ni race ni religion, mais un point commun : ils ont un pouvoir à défendre ou à construire, et l’Education est toujours leur ennemie jurée. Parce qu’elle aide à pense seul, ou à plusieurs. Surtout à plusieurs, en fait.

 Et dans nos cités, nos banlieues, nos ghettos, ceux qui veulent apprendre rencontrent souvent le poids de la fatalité, du regard qui discrimine, du renoncement ou de la rage. Filles ou garçons. L’Afghanistan, c’est tout près. Et les poisons sont nombreux.

Marcel Brun

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Par MBrun , le dimanche 22 avril 2012.

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