A la Une : Rencontre avec L’association pour l’enseignement de l’EPS de la maternelle à l’université 

Par Antoine Maurice


L’AE-EPS devient l’association pour l’enseignement de l’EPS de la maternelle à l’université, évidemment nous avons voulu en savoir un peu plus sur cette nouvelle orientation…



Tout d’abord pouvez-vous nous faire un petit retour historique sur les origines et l’évolution de l’association des enseignants d’éducation physique ?

Créée en 1936 à l’initiative d’Ernest Loisel, cette association d’élèves et anciens élèves de l’ENEP avait pour objectifs de défendre l’école normale de formation des professeurs d’EPS et de promouvoir une éducation physique scolaire, c’est à dire intégrée à l’Education nationale et enseignée par un corps de professeurs formés et recrutés sur les mêmes bases que leurs homologues des autres disciplines.

Après la Libération les dirigeants de l’association cherchent à regrouper et à promouvoir l’enseignement des professeurs des ENSEPS. Ils misent sur les effets de la communication à deux niveaux. En interne, auprès de tous les anciens sortis des ENSEPS en créant un bulletin de l’Amicale qui s’appellera ensuite Hyper et en proposant des stages annuels de rassemblement. En externe, auprès de l’ensemble des enseignants d’EPS en éditant une revue de formation Les Notes techniques et pédagogiques de l’ENSEP qui se transformera et deviendra ensuite la revue EPS. Les stages de l’Amicale, de plus en plus suivis et la revue EPS de plus en plus lue apparaissent comme des structures de recyclage et de perfectionnement technique et pédagogique des enseignants d’EPS.

A partir du milieu des années 1960, dans un souci d’expansion, les dirigeants de l’Amicale incitent les responsables régionaux à prendre des initiatives. Les stages annuels et les regroupements de fin de semaine deviennent ainsi des actions de formation professionnelle continue pour les enseignants d’EPS. Au début des années 1970 des changements structurels permettent à cette association de s’ouvrir totalement  à partir de 1976 à tous  les enseignants d’EPS. L’association devient l’AEEPS. Les stages nationaux sur les sports collectifs, la gymnastique, le tennis ou le rugby influencent la pratique quotidienne des enseignants. Sous l’impulsion de l’équipe d’animation des stages de sports collectifs, une démarche de rénovation de l’éducation physique est entreprise. L’innovation pédagogique est un des objectifs des « rencontres de l’éducation physique » de Montpellier puis des « Universités d’été ».

En quelques années, par leur approche didactique, les stages et les ouvrages de l’AEEPS ont permis aux enseignants d’EPS d’intégrer leur discipline dans la réflexion profonde sur le système éducatif qui s’élabore au début des années 1980, contribuant ainsi à l’intégration réussie de l’EPS à l’Education nationale [1]

A partir de 1982, avec l’institutionnalisation de la FPC, le développement de recherches scientifiques sur les pratiques physiques, la place qu’occupe désormais cette association dans l’univers professionnel de l’EPS interpelle ses militants. Elle semble se redéfinir autour d’options plus fondamentales qui permettent d’afficher les conceptions pédagogiques affirmées de ses militants restant fidèles aux valeurs et aux principes fondateurs de l’association.

Dans les années 1990, des collectifs de travail émergent : « Premier degré », « Collectif d’Etudes Disciplinaire pour la Rénovation de l’EPS »  (CEDREPS) et « Plaisir et EPS ». Ils aboutissent à des productions écrites reconnues par la profession (« Images de 150 ans d’EPS », « Le guide de l’enseignant », « Les cahiers du CEDREPS »).



Ainsi, fort de ce passé pourquoi ce changement de dénomination ?

La dénomination AE-EPS, Association des Enseignants d’EPS, renvoie plutôt à une amicale, ce qu’était l’AE-EPS au début de son histoire. Elle suscite également l’idée de défense d’un corps professionnel, ce qui relève, selon nous, du rôle d’un syndicat. En cette période où nous sentons l’Education physique de nouveau menacée, soit par l’amalgame qui peut être fait dans les esprits avec le sport ou bien dans son aspect disciplinaire scolaire, nous avons souhaité affirmer notre choix et dire ce que l’AE-EPS était devenue.

L’AE-EPS, Association pour l’Enseignement de l’EPS défend une EPS de qualité et pérenne comme discipline scolaire. Elle tient compte des textes officiels tout en donnant son avis sur ceux-ci. C’est une association de professionnels de l’Education physique de la maternelle à l’Université ouvert à tous les spécialistes qui partagent ses valeurs et ses principes rassemblés dans le texte : « Point de vue de l’AE-EPS sur l’EPS » [2] écrit en février 2009.



Pourquoi donner ou redonner plus d’importance aux régionales ?

L’AE-EPS est organisée en « régionales ». Le développement de l’association a conduit à garantir aux associations régionales une certaine autonomie de fonctionnement. Mais l’AE-EPS n’est pas pour autant organisée en fédérations. Par leur activité les régionales sont les forces vives de l’AE-EPS. Depuis quelques années il nous est apparu qu’elles devaient être représentées au sein de la structure dirigeante nationale de l’association. Pour cela il fallait faire évoluer les statuts de l’AE-EPS. C’est chose faite depuis le vote des adhérents et l’AG extraordinaire du 24 mars dernier.

Nous pensons que cette organisation nouvelle permettra de clarifier les missions et relations qui incombent aux régionales et à la nationale. Nous espérons ainsi que davantage de liens pourront s’établir entre la direction administrative de l’association et les régionales. De même, présentes dans le même organe de direction de l’association et faisant vivre la structure générale, les régionales devraient échanger davantage (thèmes communs d’actions). C’est ce qui s’est réalisé cette année avec le thème national d’action « 30 ans d’EPS à l’EN ».



Justement concernant les événements en préparation (régionales et nationales) pouvez-vous nous en parler un peu plus?

Vous vous en doutez cette évolution des statuts de l’association a pris du temps et de l’énergie. Mais la structure administrative doit être au service du fonctionnement de l’association. Cohérence et unité sont les termes qui guident le projet du Bureau national. Pour l’illustrer je prendrais l’exemple de la formule choisie pour nos actions à venir. En dehors des activités spécifiquement régionales, un thème national sera choisi chaque année. Une production écrite (contribution de nos groupes ressource) lui sera consacrée sous la forme d’un « Spécial AE-EPS ». Dans chaque région ou inter-région une journée s’organisera à partir de cette thématique nationale. La « leçon d’EPS en questions » est le support de réflexion pour l’année scolaire à venir. Ainsi l’ensemble des énergies de l’association se mobilisera autour de cette question centrale. Les activités de l’association gagneront ainsi en cohérence et génèreront des échanges entre régionales. Les collègues d’EPS pourront ainsi clairement identifier l’activité de l’AE-EPS à partir de cette thématique.    



Votre association se démarque aussi par les différentes réflexions qu’elle propose, notamment concernant le plaisir en EPS dont nous avions fait un reportage il y a quelques années, et le groupe « analyse des pratiques » ou encore le CEDREPS. Qu’en est-il de l’actualité de ces groupes et des réflexions ?

Le groupe « Plaisir et EPS », actuellement coordonné par Philippe Gagnaire et François Lavie tiendra son séminaire annuel les 12 et 13 mai 2012. Il réfléchit à une modélisation du plaisir en EPS qui pourrait permettre d'élaborer des modalités d’interventions pédagogiques et didactiques plus efficaces. Un certain nombre de thèmes sont étudiés : plaisir et santé, plaisir et éducation, plaisir et apprentissage, plaisir et progrès, plaisir et contenus d’enseignement. Ces réflexions aboutissent à des articles et des publications. Un ouvrage coordonné par Guy Haye et intitulé « Le plaisir », vient d’ailleurs de paraître aux éditions « Revue EPS » dans la collection « Pour l’action ». Il présente une synthèse des connaissances scientifiques les plus actuelles sur ce concept et une analyse de situations concrètes décrivant des procédures et outils utilisés sur le terrain.

Le CEDREPS, Collectif d’Etude Disciplinaire Pour le Renouvellement de l’Enseignement de l’EPS, coordonné par Georges Bonnefoy et Raymond Dhellemmes, est constitué aujourd’hui par un groupe d’acteurs* de l’EPS se retrouvant autour d’idées centrales communes :

1.      L’EPS n’est pas uniquement un espace-temps de pratique physique dans l’école, mais également une discipline d'enseignement, un lieu d'étude.

2.      L’EPS est appréhendée comme une culture scolaire des APSA

3.      En EPS l’enseignant présente des formes de Pratiques Scolaires Originales (Cahiers 4, 5, 6) fondées sur une conception ouverte et irrévérencieuse de la référence aux pratiques sociales

4.      Il propose des thèmes et des objets d’enseignement et choisit des objets d’étude et des contenus d’enseignement (Cahier 10) Qu’est il pertinent de soumettre à l’étude des élèves ?

5.      Le praticien réflexif a un rôle central par la divulgation de ses innovations  dans la création de cette culture scolaire. Les cahiers 11 et 12 interrogent ainsi la place et le rôle des innovations dans la construction disciplinaire et sa mise en texte. (Programmes.)

Ainsi le CEDREPS comme Groupe ressource de l’AE-EPS, contribue à alimenter les débats sur l’identité de notre discipline, sur sa transformation dans le sens des attentes sociales d’aujourd’hui sur le corps et dans le sens d’une éthique des pratiques corporelles de développement, sportives ou artistiques.

Depuis sa création en 1993 LE CEDREPS a publié 12 Cahiers et animé de très nombreuses journées de réflexion. 

Le CEDREPS a tenu son séminaire 2011-2012 les 26 et 27 novembre 2011 à l’IUFM de Lyon. Le Cahier 11 sorti en novembre est épuisé mais il sera téléchargeable sur le site national de l’AE-EPS. Le Cahier 12 est actuellement en préparation pour la rentrée scolaire prochaine.

* Une soixantaine de participants organisés en groupes de régions, coordonnés par un groupe national.



L’association s’est également souvent positionnée concernant les différentes politiques éducatives que ce soit d’un point de vue global ou du point de vue de l’EPS. Justement quel est votre bilan des dernières années, que ce soit sur l’expérimentation sur le sport l’après midi ou sur les nouveaux programmes du lycée, ou bien encore le socle commun ?

En effet, en ce qui concerne les programmes de lycées, une consultation nationale a été organisée et une synthèse a été envoyée à l’Inspection Générale. En substance elle souligne que, si la matrice disciplinaire est jugée comme plutôt positive, les adhérents consultés émettent cependant des réserves quant à la programmation imposée des cinq grandes catégories de compétences (Compétences propres à l’EPS) retenues sur le cursus du lycée dont trois différentes au baccalauréat. C’est notamment la compétence « conduire et maîtriser un affrontement individuel ou collectif » qui est la plus critiquée car elle regroupe dans une même classe des APSA de nature fort différente (sports collectifs, sport de combat, sport de raquette) et qui ne peuvent donc plus être programmées ensemble.

Pour la suite, l’objectif de notre association n’est pas de se situer principalement en réaction aux différentes expérimentations élaborées dans l’enseignement. Nous souhaitons, grâce à nos groupes ressource et nos actions de formation continue des enseignants, faire des propositions pour aller vers un enseignement de l’EPS plus moderne, adapté aux besoins et aux capacités de tous les élèves. Ainsi l’ensemble des groupes ressource de l’AE-EPS travaillent actuellement à la préparation d’un ouvrage collectif. Le titre sera « La leçon d’EPS en questions ». Cet ouvrage est coordonné par Bernard Boda et Alain Coston. Les articles de cette nouvelle publication de l’AE-EPS aborderont différentes thématiques liées à la leçon d’EPS sous la forme d’études de cas.

Nous souhaitons ainsi montrer que l’EPS que nos défendons a sa place parmi l’ensemble des disciplines de notre système éducatif. 


Merci à l’AEEPS à travers Denis Abonnen, président de l’AE-EPS avec les contributions de Georges Bonnefoy et François Lavie.


Le site de l’AE-EPS

http://www.site.aeeps.org/


1 Pour plus de détails et d’informations se référer à la rubrique « Notre histoire » du site aeeps.org.

2 « Point de vue de l’AE-EPS sur l’EPS », texte rédigé en commission du CA le 7 février 2009, site aeeps.org rubrique « Nos valeurs ». Ce texte s’appuie sur les propositions et réflexions issues du séminaire de Valence de 2008 au cours duquel les Groupes ressource de l’AE-EPS étaient invités à exprimer leur regard sur l’EPS.



Sur le site du Café

Par antoinemaurice , le samedi 21 avril 2012.

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