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- A la Une : Mêler virtuel et réel pour une protection sociale plus digeste. 

La protection sociale, thème central du programme de Sciences sanitaires et sociales, est un thème difficile et qui ne passionne pas nos élèves.
Ce n'est pas simple sur un tel thème d'élaborer une démarche active qui leur permette de prendre à bras le corps les concepts et qui leur donne envie d'avancer dans leur réflexion sur la construction, les caractéristiques des systèmes de protection sociale.
Notre collègue Julie Cogez a embarqué ses élèves de terminale du lycée Lycée François ARAGO de Villeneuve Saint-Georges (94) dans un projet à deux moteurs : une visite au Parlement européen de Bruxelles et les TICE, dans un voyage à destination de l'Europe.


Peux-tu nous présenter ton projet en quelques mots ?
Je voulais travailler autrement sur le programme de terminale SSS et particulièrement sur la protection sociale en Europe.
J'ai pensé ce projet en vue d'un temps fort, la visite au parlement. C'est ce voyage qui a motivé le travail de recherche mené par les élèves : recueil de données et de réalisation d'un dossier documentaire pour parvenir à une synthèse sous forme de diaporama.

Comment ce projet a t-il été reçu par les élèves ?
Dès la rentrée de septembre, j'ai proposé aux élèves que j'avais en SSS de travailler différemment sur un des thèmes majeurs du programme, la protection sociale. Le fait d'aller à Bruxelles les a surpris (C'est loin !) et enchantés aussi.
J'ai joué cartes sur table dès le début : ça ne pouvait marcher qu'avec une implication importante de leur part. Et ils sont rentrés dans le jeu.
Il faut dire c'était une classe assez dynamique, de faible effectif (22).
Nous avons travaillé trois mois sur ce projet, ça n'a pas été toujours simple de maintenir leur motivation sur cette durée.

Comment as-tu préparé le voyage ?
J'avais pris contact en juin, je savais que la visite était possible. Le contact avec le Parlement est facile par messagerie, mais l'accord est plus difficile à obtenir.
Je crois que ce qui a été déterminant pour l'acceptation de notre venue a été l'implication des élèves, plus que la définition du projet pédagogique.
Ils ont pris en charge toutes les démarches, me tenant au courant des résultats semaine après semaine. La qualité des questions qu'ils ont préparées a certainement beaucoup compté aussi.

Et d'un point de vue pédagogique ?
J'ai proposé un travail en groupe d'affinités (trois mois c'est long !) et j'ai laissé les élèves choisir des thèmes qui les intéressaient : la prise en charge du risque maternité, les professions paramédicales, la protection sociale dans les Pays d'Europe centrale et Orientale, le système roumain de protection sociale, la construction de l'Europe, ... je ne suis absolument pas intervenue dans ces choix.
Ils étaient chargés de présenter un dossier documentaire à partir des ressources du CDI et des recherches qu'ils ont menées sur Internet, souvent sur leur temps personnel.
Certains thèmes ont été assez rapidement abandonnés. Les uns faute de documents fiables : j'ai été très stricte sur les sources d'information, si la validité n'était pas suffisante, le document n'était pas retenu. Les autres, parce que les documents que nous trouvions n'étaient pas exploitables par nos élèves.
Je guidais les élèves dans leur collecte, les conseillant sur les extraits les plus pertinents : les rapports des institutions européennes sont parfois un peu complexes ...
C'est seulement quand ce recueil a été terminé et que les élèves sont passés à la synthèse et à la construction du diaporama.

Comment t'es-tu organisée pour qu'ils restent motivés ?
Je crois qu'il faut de la souplesse dans un projet, particulièrement quand il traite d'un thème aussi peu porteur du côté des élèves et qui s'inscrit dans la durée.
J'ai autorisé les changements de groupe. Un élève qui saturait sur un sujet, ou qui trouvait l'étude d'un aspect du thème trop difficile, pouvait changer de groupe. L'accueil dans le nouveau groupe n'était pas forcément spontané, mais en leur rappelant les principes du travail collectif (même à géométrie variable), l'intégration se faisait.
Mon objectif était de permettre à chacun de trouver une place à son niveau, un sujet accessible et qui corresponde à ses interrogations.
Je me suis appuyée sur les éléments moteurs de bon niveau qui ont aussi une grande personnalité positive.
J'ai évité la monotonie d'une répétition hebdo : le travail avait une cadence de toutes les 2à 3 semaines au bout de laquelle les élèves synthétisaient le travail avec moi.
Trois ou quatre élèves sont restés à la marge, changeant souvent de thème. Les autres se sont beaucoup impliqués.

Quelles difficultés avez-vous rencontrées ?
D'abord une difficulté d'ordre pédagogique : il est très difficile pour nos élèves de synthétiser des documents, d'en repérer les axes forts, de prendre du recul et cela particulièrement sur des documents primaires, sans construction pédagogique ou journalistique.
Ils ont beaucoup souffert pour mener le travail de synthèse que je leur demandais en vue du diaporama. Ils étaient tentés de recopier des extraits et non pas de chercher l'essentiel du document. Nous avons beaucoup travaillé sur la lecture de documents et la synthèse.
Ce type de projet demande beaucoup de travail personnel de la part des élèves et des heures en dehors des cours en concordance entre le prof et les élèves.
Nous avons aussi rencontré une difficulté d'un tout autre ordre :
Malgré l'envoi de notre guide de visite, l'intervenant qui nous a accompagnés n'avait pas mesuré la spécificité de notre groupe. Il ne pensait pas avoir besoin d'entrer autant que ça dans le détail des systèmes de protection sociale, il n'imaginait pas non plus que les élèves seraient aussi pointus dans leurs questions ... notre demande n'était pas courante, semble t-il !
Beaucoup de nos questions seraient restées sans réponse s'il n'avait été possible de poursuivre l'échange par courriel : il nous a proposé de chercher lui même au sein des commissions l'expert capable de nous répondre et d'être lui même ainsi l'intermédiaire entre nous. Ainsi, nous avons poursuivi notre recherche une fois rentrés à Villeneuve : nous lui postions nos questions et quelques jours plus tard, il nous transmettait la réponse.
Ces échanges ont été très riches, ils ont aussi eu pour force de maintenir le lien entre la classe et l'objet de notre visite, et cela sur un axe relationnel réel.

Comment as-tu intégré les TICE dans ce travail ?
Par Internet, d'abord.
Sur la protection sociale en Roumanie, le CDI cale assez vite. C'est par le réseau que nous avons pu avoir des informations. Et sur certains sujets, la difficulté est plus la sélection des documents que leur recueil.
Mes élèves utilisent Internet assez facilement, et même si notre CDI n'est pas très riche en postes connectés, ils ont réussi chez eux, en TD à bien utiliser les ressources de la toile.
Nous avons aussi beaucoup communiqué par messagerie électronique.
La liste des courriels des contacts publics au Parlement est en ligne, c'est ce qui nous a permis de transmettre facilement notre demande et la présentation de notre projet.
Nous avons aussi beaucoup utilisé la messagerie pour envoyer nos questions après la visite, comme je l'ai raconté. La classe disposait d'une adresse électronique qu'un élève était chargé de relever à chaque cours et de présenter à la classe. L'outil est d'une grande souplesse, à la fois pour ce qui est de la rédaction des messages, mais aussi pour la rapidité des échanges.
Puis, pour finir, nous avons utilisé les TICE pour la synthèse, dans la création d'un diaporama.
Le fait d'avoir un support synthétique et visuel à concevoir a motivé les élèves pour cette phase si ardue.
Certains élèves restés un peu en marge du groupe classe ont trouvé une place dans cette étape du travail, souvent dans la conception graphique.
Sur ce temps-là, les élèves disposaient d'une grille d'évaluation qui leur a servi de guide pour mener un travail de qualité. Ils savaient qu'ils seraient notés à partir des critères présentés, ils s'évaluaient à la fin de chaque séance (3 TD pour le diaporama).

Quelles sont pour toi/pour les élèves les points forts d'un tel projet ?
C'est le "faire ensemble", dans un but concret qui est le point fort d'un projet comme celui-là. Faire dans un contexte réel, avec les contraintes réelles aussi. Je crois que c'est ce qui leur a donné l'énergie et la motivation pour s'investir autant.
Ils ont partagé une aventure et produit quelque chose à partir de la réalité à laquelle ils ont été confrontés et de leur travail, de leurs recherches.
Ce croisement du réel et de l'action (ici, pour produire un diaporama sur « protection sociale et Europe ») oblige à manier les concepts, à tout engager pour les faire céder afin d'en tirer ce qui permet de résoudre le problème posé. Je crois que les élèves ont pris peu à peu conscience qu'ils étaient capables de prendre du recul sur un thème comme celui-ci.
On pourrait parler aussi de l'ambiance de la classe, devenue plus soudée de cette expérience partagée.
Ils auraient souhaité poursuivre...

Si c'était à refaire, que modifierais-tu ?
Peut-être le lieu de la visite : Strasbourg, qui est un peu plus loin, mais c'est là que se trouve la commission chargée des PECO. Ça nous permettrait d'accéder plus facilement aux informations concernant les pays entrants. Il faudrait dormir sur place, c'est un peu plus compliqué à organiser. Mais je me sens prête à tenter l'aventure l'an prochain...

Liste des contacts utilisés
http://listes.ac-creteil.fr/wws/d_read/liste-sms/public/contact_europe.rtf

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