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L'Ile-de-France met de l'égalité dans la marmite des cantines scolaires 

"C'est notre fierté de créer des conditions de réussite et de bien être pour tous les lycéens". Pour Henriette Zoughebi, vice-présidente du Conseil régional d'Ile-de-France en charge des lycées, la tarification unique de la restauration dans les lycées franciliens fait partie des mesures  qui vont aider les lycéens défavorisés à réussir leur scolarité. Une mesure proposée par sa formation politique, le Front de gauche, inscrite au budget présenté par la majorité régionale pour 2014.


La cantine, révélateur des inégalités sociales


Sur les 471 lycées franciliens, 450 disposent d'un restaurant scolaire  et tous sont en régie directe. Mais chaque établissement a développé ses propres tarifs. On en compte des milliers. La moitié seulement des lycées font bénéficier les jeunes d'une aide régionale. Les résultats sont visibles : les jeunes de milieu populaire (enfants d'inactifs, ouvriers) ont deux fois moins de chance de déjeuner à la cantine que ceux des classes favorisées (cadre supérieur, profession libérale). La cantine est devenue le révélateur le plus sur de la composition sociale de l'établissement.


L'initiative régionale vise à uniformiser ces tarifs d'ici 2017 avec une première étape à la rentrée 2014 avec une centaine de lycées sur deux départements où le quotient familial est déjà utilisé au collège. La tarification unique pourrait être proposée en janvier 2014 au conseil régional.


"On hérite de tarifs très variés", nous dit H Zoughebi. "On va faire très attention à ce que les nouveaux tarifs soient avantageux aux plus défavorisés et aussi aux classes moyennes" Le prix du repas devrait varier entre 1 et 4 euros avec une graduation fine entre les deux. "On accompagnera la mise en place", souligne H Zoughebi qui s'inquiète de failles éventuelles. Les jeunes  qui ne peuvent pas payer 1 euros le repas devraient bénéficier du Fonds social lycéen mais celui-ci est devenu très insuffisant (1500 €pour 1470 élèves au lycée J Jaurès de Montreuil par exemple). A Paris, les assistantes sociales ne sont plus dans les établissements ce qui les éloigne des plus démunis.


Les petits plats dans les grands


La mesure devrait aussi avoir un impact sur la vie des établissements. H Zoughebi en attend que les jeunes se sentent mieux dans ce qui est leur seconde maison et à ce qu'ils s'alimentent mieux dans les quartiers populaires. Cette remontée du taux des demi-pensionnaires aura forcément un impact sur les emplois du temps. La région se prépare à investir dans l'aménagement des cantines et leurs frais. Sur le budget 2014 3 millions supplémentaires sont inscrits pour l'équipement des cantines (entre autres bornes magnétiques et cartes pour faciliter la gestion) et 2 millions pour le fonctionnement.


"Cette mesure va aussi nous aider à renforcer notre filière d'approvisionnement", souligne H Zoughebi. La région mise sur les achats en circuit court et le développement du bio. Une plateforme centrale d'achats va aider les restaurants dans leur gestion. En Ile-de-France, la région n'a pas fini de mettre les petits plats dans les grands pour les lycéens.


François Jarraud



Ce que nous apprennent les cantines sur nos lycées

La décision de la région Ile-de-France d'uniformiser les tarifs des restaurants scolaires sur le territoire régional s'appuie sur une intéressante étude de l'Institut d'aménagement et d'urbanisme régional (IAURIF). Elle met en évidence les inégalités sociales entre les jeunes pour l'accès à la cantine. L'IAURIF a observé la répartition géographique et sociale des demi-pensionnaires en Ile de France.


Sur le plan social, on observe d'énormes inégalités dans le taux d'accès à la demi pension. Selon l'IAURIF, en Ile-de-France, la probabilité d'être inscrit à la cantine est de 0,9 pour les professions intermédiaires contre 0,5 pour les enfants d'inactifs, les enfants de cadres étant la catégorie de référence. Autrement dit on a deux fois moins de chance de déjeuner à la cantine quand on est enfants d'inactif. Dans la même logique, les étudiants de CPGE ont deux fois plus de chances de déjeuner à la cantine que les élèves de 2de générale ou ceux de BTS.


Sur le plan géographique, la fréquentation des restaurants scolaires varie énormément à l'intérieur de la région.  Là où elle est la plus faible c'est le nord parisien : Seine Saint-Denis et Val d'Oise. La part des demi pensionnaires descend en dessous de 40% des élèves, voire même encore plus bas dans le 93. C'est en zone rurale que la participation est la plus forte. "POur l'IAURIF, le facteur le plus déterminant est géographique".


Selon une estimation de l'Institut, la nouvelle tarification pourrait changer réellement la donne. La tarification unique a amené les collèges à passer de 31% à 50% de demi pensionnaires. Le nouveau tarif doublerait le nombre de bénéficiaires de l'aide régionale.


Ainsi le taux de fréquentation de la cantine est un indicateur visible de la composition sociale de l'établissement. Plus il est élevé plus les catégories favorisées sont nombreuses. C'est aussi une information sur sa composition pédagogique. Plus la fréquentation est forte, plus le lycée propose des formations longues et prestigieuses. Il y a de la vérité dans les assiettes.


François Jarraud


L'étude

http://www.iau-idf.fr/fileadmin/Etudes/etude_861/NR_568_web.pdf



Sur le site du Café


Par fjarraud , le mardi 17 décembre 2013.

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