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La classe inversée fait sa semaine du 25 au 29 janvier 

La dernière semaine de janvier sera celle de la classe inversée. L'association "Inversons la classe" ouvre les portes des salles de classe de ses membres un peu partout en France et même au delà. Les enseignants pourront rencontrer des professeurs du primaire et du secondaire pratiquant la classe inversée dans environ 70 lieux. L'opération bénéficie du soutien ministériel et est relayée dans plusieurs académies par des événements officiels. Héloïse Dufour, présidente de l'association, donne les clés de cette semaine.


Pourquoi cette semaine de la classe inversée ?


L'initiative de l'association Inversons la classe a été décidée à la fin du premier congrès de la classe inversée qui s'est tenu à Paris en juillet 2015. On s'est rendu compte des énormes attentes des enseignants sur la classe inversée, du besoin d'échanges sur cette pédagogie. On a donc décidé de délocaliser les échanges et de faire une semaine durant laquelle les enseignants pourront échanger sur la classe inversée près de chez eux.


On a proposé aux enseignants qui pratiquent la classe inversée d'ouvrir leur classe à leurs collègues pour qu'ils se rendent compte de la façon dont on la met en oeuvre. On a proposé à l'institution scolaire d'organiser des événements et de favoriser localement ces rencontres.


Actuellement plus de 80 classes se sont proposées dont environ 70 en France. On les trouve tout simplement sur une carte interactive sur le site de l'association.


Des séminaires académiques sont aussi organisés. Par exemple à Créteil avec des interventions de C Beccheti Bizot et de M Lebrun (qui publient un ouvrage sur la classe inversée NDLR). Il y en a aussi à Dijon, dans l'académie d'Orléans Tours.


Beaucoup d'enseignants cherchent des solutions aux difficultés qu'il y a à enseigner. La classe inversée est-elle la réponse à toutes les difficultés pédagogiques ?


Bien sûr que non. C'est une réponse. L'association considère que la classe inversée devrait faire partie de la boîte à outils de tous les enseignants. C'est une réponse intéressante à mettre en oeuvre mais chacun doit se faire sa propre opinion. Et c'est à cela que sert la semaine de la classe inversée : favoriser les échanges entre enseignants.


Des enseignants qui avaient été pionniers de la classe inversée sont passés à autre chose. La classe inversée c'est une étape ou quelque chose d'invariable ?


Pour moi ces enseignants restent toujours dans la classe inversée. On la réduit parfois à des vidéos avant le cours et le travail en classe. Mais conceptuellement c'est plus que cela. C'est mettre en autonomie les tâches cognitives les plus simples pour passer plus de temps sur les tâches plus complexes. Il y a donc bien des façons de faire la classe inversée.


Avez vous des ressources pour se lancer dans toutes les disciplines ?


Certaines discipline sont plus fournies que d'autres comme par exemple l'histoire-géographie. Mais on commence à avoir des ressources dans toutes les disciplines. Elles sont centralisées sur le site de l'association.


Propos recueillis par François Jarraud


Le site de l'association

http://www.laclasseinversee.com/

Le premier congrès de la classe inversée

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2015/2015_Classeinversee.aspx

La carte avec toutes les manifestations

http://www.laclasseinversee.com/semaine-de-la-classe-inversee-clise/

La page de ressources

http://www.laclasseinversee.com/la-classe-inversee/ressources/

Le guide pour ouvrir sa classe durant la semaine

http://www.laclasseinversee.com/semaine-de-la-classe-inverse[...]

Que faire après la classe inversée ?

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2015/12/15122015Article635[...]




La parution, en ce début 2016 de l'ouvrage de Marcel Lebrun et Julie Lecoq "Classes inversées, enseigner et apprendre à l'endroit !" (CANOPE Editions 2015) consacre officiellement, par une parole "universitaire", cette approche présentée comme innovante de l'enseigner et de l'apprendre. La sortie de cet ouvrage est opportune, en effet la semaine prochaine (du 25 au 29 janvier 2016) est organisée la "semaine de la classe inversée" (CLISE 2016). On ne pourra donc rendre compte de cette parution sans la mettre en perspective avec les événements qui seront organisés à cette occasion, mais aussi avec les publications voisines dont on proposera quelques références en fin d'article.


Un ouvrage synthétique

La valeur du document publié par CANOPE est davantage dans sa dimension synthétique et universitaire que dans son opérationnalité immédiate. Si l'on y trouve quelques témoignages d'enseignants, on y trouve surtout un cadre pour penser de manière large et approfondie la question des changements pédagogiques possibles en lien avec le développement des moyens numériques. Marcel Lebrun est bien connu dans les milieux universitaires pour son travail sur le lien entre TIC et enseignement. Il a publié plusieurs ouvrages qui font autorité et ses interventions sont toujours bien perçues. On peut regretter d'ailleurs que cet ouvrage soit davantage destiné à un public averti des TIC, de la pédagogie et de l'université, qu'à des enseignants au prise avec leur quotidien disciplinaire et organisationnel. Cependant l'équilibre entre les différentes parties de l'ouvrage et les précautions prises par les auteurs font de ce document un élément de base pour réfléchir la question de la pédagogie inversée en lien avec le numérique et surtout les évolutions en matière d'apprendre.

Tenter de définir "les" classes inversées au pluriel (dans le titre aussi) c'est déjà un parti pris qui s'oppose à une sorte de "modèle" qui s'imposerait dans le domaine. Proposer en sous-titre "enseigner et apprendre à l'endroit" c'est d'une part tenter une ouverture vers un renouvellement pédagogique, mais d'autre part c'est aussi interroger un propos de S. Bissonnette et C. Gauthier (cf. bibliographie) qui posent la question dans une opposition entre endroit et envers. En commençant pas une tentative de définition les auteurs ouvrent des possibles formes variées dans ce premier chapitre. Logiquement, la suite est l'interrogation pédagogique sur les fondements de ces pratiques dont le pragmatisme l'emporte souvent sur l'expérimentation rigoureuse. On s'étonne qu'après cette première grande partie un chapitre de transition renvoie à des notions plus périphériques : hybride, distance, présence. En fait les auteurs nous invitent simplement à réfléchir à ces trois dimensions portées par les classes inversées et souvent négligées dans la réflexion : d'abord le fait que l'on associe plusieurs modalités de travail au sein d'un même dispositif, ensuite l'interrogation sur ce qui se passe à distance dans l'enseignement c'est à dire ce que l'apprenant fait à la maison, enfin l'interrogation porte alors sur ce qui se fait dans la classe elle-même. Arrivé à la moitié de l'ouvrage on comprend bien que ces classes inversées posent probablement beaucoup plus de questions qu'on ne le pense.


Ou théorique ?

La deuxième partie de l'ouvrage va alors porter sur les changements plus fondamentaux qui peuvent découler d'une telle approche. On y trouvera des questions comme la gestion des espaces dans l'établissement, la contextualisation des apprentissages (prise en compte de la vie sociale), la décontextualisation (prise de distance, théorie), ou encore l'évaluation ainsi que la formation des enseignants. Pour terminer les auteurs abordent les freins et moteurs de ces dispositifs. Ce chapitre qui semble donner quitus aux auteurs de leur honnêteté intellectuelle est pourtant bien en deçà des questionnements que posent souvent les enseignants du secondaire et du primaire et pas non plus ceux qui concernent le défi cognitif sous-jacent. En effet comment ne pas ignorer les difficultés cognitives des élèves, dans leur diversité et leur complexité ? On sent que les auteurs s'adressent à un public d'enseignants qui ont des "étudiants" et pas des "élèves". Ce détail n'est pas sans importance car les contextes d'apprentissage, les parcours individuels, les motivations, le cadre sont bien différents.

Les auteurs sont convaincus du bien-fondé de leur propos et tentent de le faire partager, c'est une bonne chose. Cependant la forme du document, mais aussi certains choix les amènent soit à rester très théoriques, soit à ne pas suffisamment contextualiser leur propos. Ce qui est certain c'est que contrairement à d'autres publications, l'ouvrage impose au lecteur un travail de "traduction" évité par d'autres ouvrages (en particulier ceux de Sams et Bergmann, voir bibliographie) ayant une cible moins universitaire. C'est la qualité qui est ici aussi un défaut. Et pourtant, ceux qui ont déjà entendu les propos de Marcel Lebrun (et ils sont nombreux en ligne, en vidéo) ou qui ont lu son article dans le revue "Projet" verront dans cet ouvrage une sorte de synthèse et un assemblage de nombreux travaux antérieurs, en moins opérationnel.


Réfléchir à ses pratiques

On peut questionner la revue de littérature et plus largement la bibliographie proposées qui ignore l'ouvrage de Salman Kahn, qui même s'il ne se targue pas de scientificité, est pourtant un élément du paysage de la classe inversée non négligeable (hormis une ou deux allusions dans le texte). On peut aussi s'interroger sur la forme du document et sur son édition. Ouvrage plutôt adressé à des enseignants du supérieur (malgré les encarts consacrés à des enseignants du primaire et du secondaire), il est aussi difficilement accessible dans sa forme à un public qui cherche à trouver des repères pour expérimenter, ou encore des éléments plus factuels, mieux mis en avant.

La force de cet ouvrage c'est d'abord la qualité du travail en soi. La faiblesse de l'ouvrage c'est qu'il nécessite une sorte de mode d'emploi ou de mode de mise en oeuvre qui permettrait à l'enseignant de se lancer dans "l'hybridation de son enseignement". La maquette éditoriale met trop à plat les contenus en les rendant tous semblables, en apparence. On trouve aussi, ici et là des passages qui peuvent surprendre : ainsi la transposition de la recherche Hysup (hybridation dans les dispositifs d'e-learning) sur la classe inversée semble un peu rapide et pas vraiment justifiée dans le contexte.

Cet ouvrage vient à point nommé pour amener tous ceux et celles qui ont entamé de manière pragmatique de s'essayer à la classe inversée à réfléchir leur pratique. En effet, même si parfois le propos est dense, il a le mérite d'être suffisamment large et ouvert pour donner à travailler et à réfléchir. Un petit outil méthodologique aurait sûrement été le bienvenu qui aurait permis aux enseignants, de manière inversée de s'approprier l'ouvrage. Finalement cet ouvrage est presque un cours magistral et c'est dommage...


Bruno Devauchelle


Lebrun Marcel, Lecoq Julie, Classes inversées, enseigner et apprendre à l'endroit ! CANOPE Editions 2015, ISBN

978-2-8142-0328-0/2416-6448


Sur le Café :

Premier congrès de la classe inversée : le DOSSIER

http://www.cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2015/2015_Classeinversee.aspx

Que faire après la classe inversée ?

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2015/12/15122015Article635[...]

La classe inversée fait sa semaine

http://www.cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2016/01/15012016Article635[...]


Autres ouvrages consultables sur les classes inversées :

Alain Taurisson, Claire Herviou, Pédagogie de l'activité : pour une nouvelle classe inversée. ESF 2015

Salman Khan, L'éducation réinventée, JC Lattés, 2013

A.Sams, J.F. Bergmann, La classe inversée, Reynald Goulet éditions, © 2014

A.Sams, J.F. Bergmann, M.A.Girard, Apprentissage inversé, Reynald Goulet éditions, © 2015


Articles que l'on peut aussi consulter :

Bissonnette, S. et Gauthier, C. (2012). Faire la classe à l'endroit ou à l'envers ? Formation et profession, 20(1), 23-28. http://dx.doi.org/10.18162/fp.2012.173

FAILLET V., La pédagogie inversée : recherche sur la pratique de la classe inversée au lycée, Rubrique de la revue STICEF, Volume 21, 2014, ISSN : 1764-7223, mis en ligne le 04/05/2015, http://sticef.univ-lemans.fr/num/vol2014/23r-fail[...]

Nizet I., Meyer F., La classe inversée : que peut-elle apporter aux enseignants ?, en ligne sur le site de CANOPE 2015, http://www.cndp.fr/agence-usages-tice/que-dit-la-recherche/la-[...]

Gardiès C., Fabre I., « Médiation des savoirs : de la diffusion d'informations numériques à la construction de connaissances, le cas d'une « classe inversée » », Distances et médiations des savoirs [En ligne], 12 | 2015, mis en ligne le 18 décembre 2015, consulté le 18 janvier 2016. URL : http://dms.revues.org/1240



Sur le site du Café



Par fjarraud , le mercredi 20 janvier 2016.

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