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Une rentrée 2012 pleine d'interrogations 

Par François Jarraud


Le Café pédagogique a partagé cette rentrée avec des enseignants, sur le terrain. Nous avons passé la pré-rentrée au sein d'un conseil d'école dans une ZEP. La rentrée des élèves nous a trouvé à Gennevilliers dans un lycée tout neuf au sein d'une zone en réaménagement. Partout nous avons trouvé des enseignants qui font face aux difficultés du métier et semblent assez loin des débats de la refondation...



Pré-rentrée : A la Goutte d’or, comment l’école se remobilise...


Que peuvent bien faire des professeurs des écoles durant la journée de pré-rentrée ? Quel est leur état d’esprit face à la « refondation » de V. Peillon ? Quelles sont leurs attentes ? A l’école de la rue d’Oran, dans le 18ème arrondissement de Paris, la rentrée se prépare sérieusement mais sans illusions…


10 heures. Autour d’une grande table, la directrice, Véronique Bavière, 9 professeurs des écoles, une enseignante de Rased. La moyenne d’âge est en dessous de 30 ans. Dans cette école Eclair située dans un quartier très populaire de la capitale, les enseignantes sont en début de carrière. Une professeure débute sa seconde année d'enseignement. Elle fait partie des nouveaux enseignants lâchés sur le terrain sans formation par Luc Chatel. L’école compte 8 classes avec 21 à 24 enfants par classe. Trois professeurs de la Ville de Paris, chargés de l’éducation artistique et physique, deux auxiliaires de vie scolaire (AVS) complètent l’effectif.


Les pieds sur terre


Ici on a les pieds sur terre, la tête dans les étoiles. Durant deux heures les enseignants et AVS vont préparer très concrètement la rentrée. Bien sûr, on commence par les documents officiels. Chacune découvre sa classe et certains noms sont déjà bien connus. Et parfois, en bien... Comment va-t-on accueillir les nouveaux CP  dans la cour de récréation ? Que fait-on pour les enfants qui arrivent le ventre vide ? Comment les reconnait-on ? Ceux qui sont très sales ? Que fait-on en début d'année quand l'accompagnement éducatif ne commence qu'en octobre...


Il faut expliquer à Amélie, une enseignante venue d'une autre école parisienne, comment fonctionne l'école. Rue d'Oran l'équipe a construit ses outils pour apaiser le climat scolaire et motiver les élèves. On fonctionne par classes de cycles. "Cela permet de limiter les redoublements", explique V. Bavière, "mais aussi de travailler au plus près du niveau réel des enfants". C'est aussi encourager des relations d'entraide entre grands et petits. Pour les enseignantes c'est une autre façon de travailler. Mais sans complexe. "Je suis à l'aide en CM2 mais j'ai besoin d'aide pour le CM1" dit l'une. Aussitôt la collègue se propose pour un coup de main.


Pas de "ceintures" rue d'Oran, mais des "échelons" qui vont du nouvel élève à l'élève référent en passant par 5 échelons. Chaque échelon donne de nouveaux droits mais aussi des responsabilités. On gagne ses échelons avec l'accord du conseil d'enfants de la classe et du conseil des maîtres, chaque adulte de la maison disposant d'un droit de véto. Chaque professeur sait qui parmi ses élèves est "référent" ou "tuteur" ou "confirmé"...


Enfin il y a l'ARR,  "l'atelier de réflexion et réparation", où sont invités les enfants dont le comportement laisse à désirer en dehors des heures de cours. Avec des adultes l'enfant doit s'expliquer et obtenir réparation. L'ARR est aussi un bon indicateur des tensions. Ses statistiques sont épluchées. "Il y a les dérapages des enfants", dit la directrice, "mais il y a les notres aussi" constate-elle quand les chiffres flambent à la fin de l'hiver. Finalement l'ARR ne sert pas qu'à la formation des  enfants.


Vers 11h30 arrive la question des parents. "Surtout pas d'injonction envers les parents" rappelle la directrice. Mais comment les associer davantage à la vie de l'école ? Les enseignantes échangent sur ce quia été réalisé l'année dernière avec plus ou moins de succès. Rue d'Oran on a des trucs pour que les parents démarrent la journée à l'école ou viennent la terminer. On sait comment positiver les problèmes rencontrés dans un quartier très défavorisé.


La tête dans les étoiles


Pour ceux qui rêvent d'établir de vrais chefs d'établissement dans les écoles, la visite rue d'Oran est intéressante. Il y a bien une directrice qui est écoutée. Mais comme il n'y a pas de supérieur hiérarchique, la discussion autour de la table est suffisamment libre pour que les faiblesses et les difficultés soient dites. Au final ça permet d'avancer et de trouver des solutions plus facilement. L'ambiance est à la confiance. Essayez de trouver cela dans le secondaire...


Et puis on discute pédagogie. Sur la table un grand classeur où chacun classe les articles intéressants qu'il a trouvé. On réfléchit au projet éducatif de l'année.  L'école est engagée dans un projet de partage de pratiques.


Quelle refondation ?


Que pensent ces enseignantes si impliquées de la refondation lancée par V. Peillon ? Pas grand chose. Pourtant il y a des attentes. "On aurait bien besoin d'une formation à l'interculturel" souligne une enseignante. "On ferait moins d'erreurs". Tout le monde acquiesce. Tout le monde attend aussi une revalorisation du métier. Mais la revalorisation financière divise. Ce qu'on veut surtout c'est de l'oxygène pour l'école. "On est habitué à gérer la pénurie. On a besoin de temps de concertation". "Il faudrait plus de professeurs que de classes", poursuit une autre. "Je suis persuadée qu'avec une formation ce serait efficace". "On a besoin de matériel informatique pour enseigner avec des outils modernes", demande une troisième enseignante.


"Il faudrait aussi lutter contre les ghettos. Quelle que soit l'énergie que nous dépensons, avoir 13 élèves sur 21 très défavorisés tire le niveau vers le bas", poursuit une autre enseignante. "On est toujours déçues des résultats de nos efforts". Rue d'Oran aussi la tâceh parait parfois immense.


François Jarraud


Lien : le projet éducatif de l'école

http://18b-gouttedor.scola.ac-paris.fr/IMG/pdf/Projet_d_Ecole_O[...]



Rentrée : Avec les lycéens à Gennevilliers


Surprise pour les élèves de seconde du lycée Galilée de Gennevilliers. Le 4 septembre, c'est le président du conseil régional d'Ile-de-France, Jean-Paul Huchon, qui fait la rentrée, accompagné de la vice-présidente en charge des lycées, Henriette Zoughebi, de la conseillère régionale locale , Françoise Diehlmann, du maire de Gennevilliers, Jacques Bourgoin et du recteur, Alain Boissinot. Un établissement bien choisi par sa qualité architecturale, l'engagement pédagogique des enseignants mais aussi le lien très fort entre formation initiale et développement économique local.


 "C'est le plus beau lycée francilien !" La région est propriétaire de 470 lycées. Mais visiblement le lycée Galilée de Gennevilliers est le préféré du président du Conseil régional. Et c'est sans doute un motif de légitime fierté pour la région de voir cette réalisation. Dessiné par Jean-Pierre Lott, le lycée est composé de bâtiments lumineux aux lignes pures et ondulantes, un rien lascives. Le vocabulaire architectural reste classique. Demi-sphère ou soucoupe blanche posée sur le gazon, passerelles, loggias et escaliers , tout est superbe. L'architecte a mis les ateliers industriels en vitrine. Ce sont eux que l'on remarque et de larges baies vitrées permettent d'apercevoir du dehors les énormes machines de la plasturgie. Les salles de classe de l'enseignement général sont plus quelconques. Si les espaces de circulation sont agréables et confortables, l'architecte n'a pas prévu de bureaux pour les enseignants.


"Dans cet établissement il y a une grande tradition d'accueil et de travail d'équipe", explique JP Huchon aux élève d'une classe de seconde. Pour ce premier jour de rentrée ils ont rendez-vous pour un entretien individuel d'accueil avec des professeurs. Ensuite en classe, ils rencontrent les deux professeurs principaux de chaque seconde. Le lycée illustre la volonté régionale de soutenir la réussite de tous les élèves. Situé en ZEP, dans la partie défavorisée des Hauts-de-Seine, le lycée Galilée est un lycée polyvalent,un modèle que la région veut étendre. ON y trouve des filières générales S et ES, des filières technologiques STL et STI2D ainsi que des CAP et bac professionnel plasturgie.  Autre volonté régionale : développer des BTS en banlieue. Près de 400 des 930 élèves sont en BTS ou licence pro dans les spécialités chimiste ou plasturgie.


 Le lycée a du mal à remplir certaines filières industrielles alors que l'intégration dans le monde du travail y est facile. Recrutant dans une zone défavorisée, le lycée a développé un programme expérimental pour améliorer la réussite en seconde. Trois secondes bénéficient d'un emploi du temps particulier. Le vendredi après midi est réservé à des activités culturelles, visites et conférences avec l'aide d'un médiateur culturel fourni par la région. De 14 à 16h et de 8 à 10h, les classes sont dédoublées. Les professeurs travaillent donc en équipe. La classe dispose de sa salle. Les résultats sont là : taux de redoublement divisé par deux, réorientation également. Un nouveau projet va voir le jour cette année : l'ouverture d 'un internat de proximité de 125 lits qui devrait renforcer le pôle industriel et bénéficier aux jeunes des quartiers.


 Le lycée se situe ainsi au coeur d'un dispositif de développement territorial. Très présent, le maire de Gennevilliers résume la situation de façon éclairante. 40 000 emplois se trouvent sur le territoire de la commune. La population active locale compte 22 000 personnes. Le taux de chômage est de 16%. Le lycée est donc une carte maitresse pour pouvoir proposer davantage de main d'oeuvre locale aux nouvelles entreprises  qui s'installent dans cette zone proche de La Défense. Elles n'iront pas chercher loin. Le lycée est aussi le monument autour duquel se déploie une vaste opération de rénovation immobilière.


La visite du lycée Galilée ne marquait pas que la rentrée scolaire ou l'hommage obligé aux enseignants. C'est aussi la force des politiques locales, la coordination entre commune, région et Etat que JP Huchon et H. Zoughebi célèbrent à Gennevilliers.


François Jarraud


Liens :

Le projet pédagogique de Galilée

http://www.ac-versailles.fr/public/upload/docs/applicati[...]

Le site du lycée

http://www.lyc-galilee-gennevilliers.ac-versailles.fr/



Sur le site du Café

Par fjarraud , le samedi 22 septembre 2012.

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