Des temps difficiles pour la profession
Pour Patrick Rayou, il y a plusieurs marqueurs et signes des temps difficiles pour la profession. Tout d’abord, l’évolution du nombre des candidat.es présent.es aux concours de recrutement le montre : les métiers de l’éducation n’attirent plus. Patrick Rayou rappelle qu’en « un peu plus de vingt-cinq ans, le nombre de candidats au métier d’enseignant dans le secondaire a chuté de près des trois quarts ». Il pointe également la hausse du nombre de démissions.
« Des savoirs scolaires socialement construits »
Les raisons en sont multiples : le sociologue évoque la rémunération en-deçà de la moyenne des pays d’Europe, mais aussi la faible satisfaction au travail. Selon une note de la Depp datant de 2023, « La satisfaction professionnelle des personnels des établissements des premier et second degrés est de 6,0 sur 10, contre 7,2 pour l’ensemble des Français en emploi ». « L’école enregistre les inégalités sociales, mais elle en rajoute aussi », dit Patrick Rayou mettant en perspective les inégalités de réussite des élèves et le sentiment de culpabilité des professeur.es qui en résulte. Cela vient en partie de la façon dont « les savoirs scolaires sont socialement construits, puis distribués et évalués ». Si les temps sont difficiles pour les professeur.e.s, il a également souligné qu’ils l’étaient aussi pour les élèves. La démographisation n’est pas nécessairement démocratisation, a-t-il précisé. Il a rappelé quelques chiffres qui illustrent la « déception face à la massification, qui s’est accompagnée d’une « démocratisation ségrégative » (P. Merle). L’orientation en lycée professionnel le montre » glisse-t-il.
Le travail empêché, une déprofessionnalisation
Quelles finalités pour l’Ecole ?
L’accélération des réformes successives ne doit pas empêcher de voir l’ensemble de l’œuvre alerte Patrick Rayou. Si on ne pense pas les finalités de l’éducation, le risque est celui du retour aux « mythes éducatifs ». Parmi eux, le sociologue identifie celui de la méritocratie, de l’école du bon vieux temps, de l’excellence et du « pilotage par l’aval des grandes écoles » comme celui de la précocité. Sans oublier celui des fondamentaux … si la France compte plus d’heures de cours de fondamentaux que beaucoup d’autres pays, les résultats des évaluations ne la classent pas pour autant en tête du palmarès. La question n’est donc pas quantitative mais qualitative, pour les professeur.es comme pour les élèves.
La question de la qualité du travail apparait cardinale tant pour la santé des professeurs et élèves, que pour l’appropriation des savoirs et du sens de l’Ecole.
Djéhanne Gani
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