Construire ou rénover un lycée : quelles innovations possibles ?
Par Françoise Solliec
Avec un patrimoine de près de cinq cents lycées publics et plus de quatre-vingt chantiers de rénovation ou de construction de lycées en cours chaque année, la région Ile-de-France s’impose comme l’un des plus importants maîtres d’ouvrage publics à l’échelon européen. Ces chantiers, d’étendue diverse, portent aussi bien sur la construction de bâtiments ex nihilo que sur l’aménagement de circulations ou de lieux de vie.
Une aventure de près de dix ans
La construction ou la reconstruction d’un lycée est une aventure qui concerne de manière importante des personnes très différentes : les services impliqués du rectorat et de la région, les élèves et équipes éducatives présents et futurs, les représentants et habitants de la municipalité, les partenaires de l’établissement. Même si la phase d’élaboration proprement dite ne dure en moyenne que cinq à six ans, c’est presque une décennie qui s’écoule le plus souvent entre le moment de la première décision et la livraison des bâtiments. Un code très strict en définit les différentes étapes.
En préalable, c’est au maître d’ouvrage, la Région en l’occurrence, qu’il revient de s’assurer de l’opportunité de l’opération. Puis le programme pédagogique du lycée, PPL, fondé sur sa structure de formation (nombre et nature des divisions notamment), travaillé en concertation, est adopté conjointement par l’Etat et la Région. A partir de ce moment est conçu, en concertation étroite avec les usagers du lycée, le programme fonctionnel et technique qui servira, tout au long de la construction, de référence au projet architectural. Dans la mesure où ce programme définit le nombre et les caractéristiques des locaux où se tiendront les enseignements, en conformité avec les référentiels de l’éducation nationale, le conseil d’administration de l’établissement est appelé à le valider. Une étude de faisabilité, menée avec la commune d’implantation permet d’estimer le budget de l’opération. Une première délibération du conseil régional, portant sur le programme et le budget, lance officiellement les travaux.
C’est ensuite à une équipe de maîtrise d’œuvre, désignée par un jury à la suite du concours d’architecture, qu’il appartient de concevoir le projet architectural détaillé. Cette équipe comprend un architecte, des bureaux d’études spécialisés dans les différents domaines de construction, un économiste de la construction et, en tant que de besoin, des spécialistes issus de telle ou telle profession (paysagiste, cuisiniste, …). Les études menées dans cette phase sont réalisées en étroite collaboration avec l’équipe du lycée.
Une fois l’avant-projet détaillé validé par une délibération du conseil régional, la phase de construction proprement dite peut commencer. La ou les entreprises qui réalisent l’ouvrage sont sélectionnées selon une procédure d’appel d’offres par une commission d’élus du conseil régional, en réponse à un cahier des charges à respecter strictement, établi par la maîtrise d’œuvre. Cependant, la concertation instaurée avec les utilisateurs ou les évolutions réglementaires imposent parfois des modifications de travaux qui font l’objet d’avenants techniques et financiers, soumis à la délibération du conseil régional.
Afin de mieux faire connaître le rôle de la Région comme maître d’ouvrage public, l’exposition Construis-moi un lycée a été organisée en novembre dernier. Sur près d’un mois, une centaine de chantiers ont ainsi été représentés par des maquettes, des croquis et des photos, dans un cadre réalisé par les élèves de filière bois d’une dizaine de lycées professionnels. Le catalogue en ligne décrit l’action de la Région en tant que maître d’ouvrage, précise les procédures employées et illustre chacun des chantiers.
La direction de la programmation pédagogique et patrimoniale du conseil régional joue un rôle essentiel dans les deux premières phases des opérations de construction ou de rénovation. C’est notamment elle qui va garantir la qualité des travaux dans ces phases, introduire le respect d’une démarche de qualité environnementale et assurer l’interface entre l’architecte et le projet pédagogique. Si les salles d’enseignement sont strictement définies par les référentiels, les fonctions transversales, locaux réservés à l’administration et aux enseignants, CDI, lieux de vie et de rencontre, etc. font l’objet de maintes réflexions et connaissent les plus grandes évolutions. C’est à ce niveau que sont pris en compte les besoins émergents des enseignants (bureaux d’accueil par exemple) ou des élèves (salles de travail à côté du CDI, cybercaféteria). Ainsi en dix ans, la surface allouée au CDI a décuplé, des salles polyvalentes et des amphithéâtres font systématiquement partie des programmes et un plus grand confort est recherché pour le personnel en terme d’espace et d’organisation. La réglementation plus contraignante sur la restauration a induit un gros effort de mise en œuvre. Cependant, le nombre des établissements (470) ne permet pas de satisfaire rapidement toutes les demandes, d’autant que pour les établissements qui bénéficient d’un programme de rénovation, la succession des équipes au cours de la réalisation du chantier engendre parfois des demandes contradictoires.
Depuis une dizaine d’années, la Région se préoccupe d’inscrire dans la construction ou la rénovation de ses lycées des dispositifs répondant à une démarche de haute qualité environnementale, HQE. Tout d’abord expérimentale, telles la chaufferie à bois du lycée les Pannevelles à Provins, ou la gestion alternative des eaux pluviales au lycée Jean Moulin de Rosny sous Bois, la gestion optimisée des ressources énergie et eau est maintenant intégrée dans les projets de lycée neufs et dans la plupart des reconstructions. La collectivité est désormais certifiée ISO 9001 pour la conception, la passation et l’attribution de ses marchés, affirmant ainsi ses exigences en matière de qualité des travaux. Avec le transfert des T0S, il va lui falloir, dans un proche avenir, articuler politique patrimoniale et politique de personnels, ce qui facilitera peut-être la généralisation d’innovations introduites pour l’instant avec prudence. A moyen terme, il s’agira certainement de parvenir à disposer de bâtiments faiblement consommateurs, voire producteurs d’énergie. Cela sera-t-il compatible avec les exigences architecturales et le confort des utilisateurs et à qui faudra-t-il s'adresser pour assurer l’administration des équipements correspondants ?
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