Semaine des maths : Comment rendre les maths aimables ?
Pour inaugurer la Semaine des maths, le 17 mars, l’académie de Paris a mobilisé sa meilleure arme : Cédric Villani, médaille Fields, l’équivalent d’un Prix Nobel de maths. Avec brio il évoque les liens entre maths, culture et vie quotidienne devant 150 lycéens et leurs professeurs. Parmi eux, Stéphanie Colin s'inquiète des choix des élèves à 6 jours de la remise des voeux d'APB.
Connaissez-vous Riemann ? Cédric Villani redonne vie à ce mathématicien un peu oublié devant les élèves des bons lycées parisiens. Durant un véritable one man show, il évoque aussi Poincaré, Einstein, Ricci avec force anecdotes. Les lycéens notent, calculent, s’amusent des questions du maître. Ils enregistrent les liens entre leur smartphone et ces mathématiciens qui, à l’époque du téléphone en bakélite, ont préparé leur présent. Avec Cédric Villani, être mathématicien ce n’est pas désincarné. Ce n’est ni triste, ni inutile. Visiblement ça remplit une vie. Peut-être est ce encore très masculin…
"Avec Cédric Villani, les élèves voient quelqu'un de dynamique et de relativement jeune. Ils peuvent s'identifier à lui et envisager des études de sciences". Professeure de maths au lycée Montaigne, Stéphanie Colin a invité ses élèves de terminale S à cette rencontre. "On est en pleine phase finale d'orientation. On a beaucoup de bons élèves, bien formés en sciences, qui préfèrent demander des classes préparatoires commerciales ou des études d'histoire plutôt que des sciences. C'est dommage car on manque de scientifiques. La Semaine des maths est un prétexte pour changer leur représentation des études de maths".
Pour S. Colin, ce désamour des maths tient aussi à l'enseignement. "En S les maths sont difficiles et ils en font 8 heures par semaine. On est surement trop abstrait, trop déconnecté du réel. Il faudrait rendre la matière moins technique. C'est l'objectif des programmes qui nous invitent à être plus concret. Mais ce n'est pas dans la tradition de cet enseignement et on ne le fait pas assez en maths et en sciences".
Depuis plusieurs années, l'Education nationale n'arrive même plus à recruter le nombre de professeurs de maths attendu. Pourtant, pour S. Colin, c'est un beau métier. "Quand je les vois demander école de commerce je me demande avec quoi ils vont remplir leur vie. Quand on est enseignant on sait pourquoi on se lève le matin". Mais pour remédier à la crise du recrutement, elle estime qu'un effort financier ciblé est nécessaire. "Il faut payer davantage les professeurs des disciplines en mal de recrutement. En sciences, quand on est bon et qu'on a bac plus 5, on se pose forcément la question du salaire. Un bon scientifique ne choisira l'enseignement que s'il a la vocation. On perd ainsi nombre de candidats".
Sitôt rentrée au lycée, S. Colin va tirer parti de cette matinée avec C Villani pour parler orientation avec les élèves. "Je vais surtout en parler avec les filles qui ne réalisent pas que les sciences c'est aussi pour elles". Aurait-on besoin d'une médaille Fields féminine ?
François Jarraud
Par fjarraud , le mardi 18 mars 2014.