Chatel : Un comité pour réformer l'enseignement des langues
Par François Jarraud
A l'occasion d'une visite des stages de langues organisés durant les vacances de février, le ministre a vanté le dispositif et annoncé la réunion le 7 mars d'un comité chargé de réformer l'enseignement des langues " sur toute la scolarité".
"Je suis venu constater la montée en puissance des stages de langues". Jeudi 24 février, c'est dans les locaux du lycée Jacques Decour de Paris, que Luc Chatel, accompagné de Patrick Gérard, recteur de Paris, assiste à plusieurs groupes de langues, en l'occurrence deux d'anglais et un d'allemand. Chacun accueille de 4 à 8 lycéens, de seconde ou de première, encadrés par un enseignant. Le stage dure une semaine, chaque matin de 9 à 12 heures. Les jeunes se disent satisfaits. "J'ai amélioré mon vocabulaire" dit l'une. "L'anglais c'est indispensable dans la vie", plaide un autre. Les jeunes débattent, chantent (en anglais) ou fabriquent le journal télévisé du jour (en allemand), mais sans caméra ni montage vidéo.
Luc Chatel vante les mérites de son dispositif. "C'est une volonté de ma part de permettre à tous les élèves de bénéficier de ces stages pour l'apprentissage de la langue parlée", affirme-t-il. Le ministre évoque "des méthodes différentes des cours habituels" et "un vrai progrès". Il y avait 20 000 lycéens inscrits la première année, 30 000 la seconde. Il ne connaît pas encore le nombre d'inscrits de cette année mais à Paris il souligne une progression de 40% avec 850 inscrits.
Malheureusement ce n'est pas le cas à Jacques Decour où on est passé de 59 à 44 élèves de 2010 à 2011. En août dernier, le ministre avait promis que 1 800 lycées accueilleraient ces stages. Or le chiffre réel, si l'on additionne les académies, est plutôt de l'ordre de 300. Sur Paris, seulement 1% des 61 000 lycéens en profitent. A Jacques Decour, la moitié des jeunes stagiaires bénéficient de séjours de longue durée en Angleterre et le stage n'est qu'un moment parmi d'autres pour parler anglais. C'est peut-être un facteur d'explication de la baisse du nombre d'inscrits à Jacques Decour. Il en est un autre : aucun professeur du lycée n'a accepté d'encadrer les stages. Cette "froideur" est une réponse à la suppression des postes dans l'éducation nationale, nous confie la proviseure adjointe du lycée.
Revoir l'enseignement des langues. "Ne pas parler anglais est un handicap" souligne Luc Chatel. Il annonce la réunion le 7 mars d'un comité "pour réfléchir sur la façon d'enseigner les langues sur l'ensemble de la scolarité". Pour lui "il y a de la matière" en ce qui concerne le volume d'heures de cours de langues. Mais "il faut réfléchir à la façon de répartir ces heures, comment travailler le langage, l'accent, la pratique de l'oral". Le comité réunira des personnalités spécialistes des langues pour envisager une réforme globale. La réforme touchera l'évaluation des langues. "Par exemple l'évaluation en langue vivante 1 au bac", précise-t-il, "ce qui pose la question de l'écrit". Le ministre précise ses convictions. "Je crois dans les groupes de compétences, les locuteurs natifs, la vision conférence. J'ai la conviction que l'utilisation des TIC change les pratiques et peut améliorer l'oral". Quant aux échéances , "Je fixerai le calendrier" prévient-il.
Un effet d'annonce ? Un plan de rénovation des langues a été introduit en 2005 au collège et en 2010 au lycée. Il s'appuie sur le Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) du Conseil de l'Europe. Il privilégie l'apprentissage de l'oral et une entrée dans les apprentissages par les contenus culturels. Les élèves sont évalués par référence aux niveaux du CECRL et la répartition par groupe de compétences est encouragée. Toutes choses cohérentes avec les stages de vacances et les propos du ministre. Dans ce contexte, on voit mal comment une nouvelle réforme pourrait prendre place alors que la réforme en cours arrive tout juste au lycée. A moins d'apporter des réponses à ce qui freine son application : la politique générale de réduction des moyens, qui n'épargne pas les langues, qui rend peu crédibles les objectifs ministériels et qui pousse les enseignants à bouder les dispositifs ministériels.
En attendant les profs de langues ne sont pas les derniers à manifester leur mécontentement. Des profs d'espagnol protestent contre la mise en veilleuse de l'Année du Mexique, des profs d'allemand contre la suppression des moyens. Pour autant il n'est pas certain que les profs d'anglais soient plus satisfaits...
François Jarraud
Liens :
La politique des langues
http://www.eduscol.education.fr/cid45756/plan-renovation-ense[...]
Prise de position de Georges Couffignal, sur l'année du Mexique
http://www.lemonde.fr/imprimer/article/2011/02/21/1483155.html
Pétition Faut-il sauver l'allemand (plus de 1800 signataires)
http://www.petitionpublique.fr/?pi=P2011N6841
Par fjarraud , le jeudi 24 février 2011.