La rubrique juridique : Les élèves handicapés
Par Laurent Piau
En 2011-2012, 210.395 enfants en situation de handicap (130.517 dans le premier degré et 79.878 dans le second degré) étaient scolarisés dans les écoles et établissements de l’enseignement public et privé.
Si l’accueil de l’élève handicapé est un facteur d’enrichissement pour tous en permettant de nouer des relations de solidarité, il pose également des défis aux personnels qui sont en charge de cet accueil.
C’est pourquoi, nous allons, dans cette rubrique 137, étudier les obligations des personnels de l’Education national face aux situations de handicap des élèves.
I) Le cadre juridique
L’accueil des enfants et adolescents handicapés dans les établissements scolaires ordinaires est posé par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées ainsi que par le décret n° 2005-1752 du 30 décembre 2005 relatif à l’organisation de la scolarisation des élèves handicapés et au parcours de formation des élèves présentant un handicap.
Mais au-delà de cette loi de 2005, rappelons que la Loi impose le respect de la différence et de la singularité de chacun, ce qui doit être inscrit dans le règlement intérieur au chapitre concernant la citoyenneté, et que la même exigence est requise pour tous.
II) Les dispositifs de formation
La règle générale est que l’élève handicapé est scolarisé dans les conditions les plus proches possibles de ses camarades en situation de non handicap.
Quand cela n’est pas possible, deux types de structures sont prévus dans l’Education Nationale :
a) Les classes pour l'inclusion scolaire (CLIS)
Dans les écoles élémentaires, les classes pour l'inclusion scolaire (CLIS) accueillent des enfants présentant un trouble mental, auditif, visuel ou moteur pouvant tirer profit d'une intégration en milieu scolaire ordinaire. Ils reçoivent alors un enseignement adapté au sein de la CLIS, et partagent certaines activités avec les autres écoliers.
b) Les unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS)
Dans le secondaire, lorsque les exigences d'une scolarisation individuelle ne sont pas compatibles avec leurs troubles, les élèves présentant un handicap peuvent être scolarisés dans une unité localisée pour l'inclusion scolaire (ULIS).
Encadrés par un enseignant, en principe spécialisé, ils reçoivent un enseignement adapté qui met en œuvre les objectifs prévus par le projet personnalisé de scolarisation. Ce projet inclut autant que possible des plages de scolarisation dans la classe de référence de l'établissement.
III) Les membres de la communauté éducative.
Selon la loi, la communauté éducative doivent rendre accessible l’établissement d’accueil, la vie scolaire et les enseignements à chaque élève handicapé qui y est inscrit.
Pour cela, elle doit veiller à la qualité de l’accueil de l’élève et favoriser un parcours scolaire enrichissant en conciliant les exigences de son projet scolaire, éducatif et thérapeutique.
Ces actions se déroulent dans le cadre du projet personnalisé de scolarisation (PPS) de l’élève dont les principales orientations ont été décidées au sein de la CDAPH.
Le rôle de l’équipe de direction
Le chef d’établissement étant le garant du respect des droits de chaque élève, il doit veiller à l’application des textes officiels, des décisions votées en CA et au respect des orientations fixées par le projet personnalisé de scolarisation de l’élève handicapé.
Pour permettre la réussite de l’élève en situation de handicap, l’équipe de direction doit exercer une surveillance sur le transport, l’accessibilité des ouvertures, la sécurité de la circulation et des lieux de vie scolaire et d’enseignement (salles de classes, réfectoire, sanitaires, infirmerie, gymnase, terrain de sport, foyer des élèves, documentation) et alerter les responsables territoriaux si des problèmes apparaissent.
Elle doit également prévoir les aides matérielles et humaines (matériel pédagogique adapté, AVS), s’assurer du respect, par l’ensemble des équipes éducatives, des recommandations et dispositions du projet personnalisé de scolarisation ou du projet d’accueil individualisé et vérifier les conditions de l’intervention d’un service d’accompagnement pour les soins (kinésithérapie, orthophonie...) ainsi que les conventions passées avec les intervenants extérieurs à l’établissement (SESSAD et autres…).
Pour permettre aux enseignants de réussir la scolarisation des élèves en situation de handicap, l’équipe de direction de l’établissement se doit d’informer au plus tôt les enseignants en charge de l’accueil du nouvel élève afin que ceux-ci puissent se préparer au mieux et éventuellement suivre une information sur le handicap avec l’aide des acteurs spécialisés, extérieurs à l’établissement (Maison départementale du handicap, enseignant référent, Handiscol, professeurs ressources, mais aussi les parents de l’élève).
Enfin, elle doit faciliter l’organisation des enseignements (constitution des équipes, modulation des emplois du temps, occupation des salles) et leur coordination, y compris en allouant des temps de service propres à l’équipe en charge de l’élève handicapé.
Le rôle du conseiller principal d’éducation
Il consiste à veiller, avec son équipe, et en coordination avec l’équipe enseignante, à la qualité de la vie scolaire de l’élève handicapé et à son intégration sociale.
Sa première mission consiste à préparer l’arrivée de l’élève handicapé dans la classe. Pour cela, il intervient auprès des délégués de classe pour leur faire comprendre les particularités de l’élève handicapé et les obligations citoyennes que chacun doit respecter en expliquant la nécessité de certaines règles de circulation ou de sécurité et les raisons des éventuels « traitements de faveur ».
Vous noterez que ce travail, s’il est bien fait, facilite grandement le travail pédagogique des enseignants en charge de la classe et qu’il me semble qu’il convient, dès lors, d’apporter dès le début de l’année scolaire, un plein et entier soutien à cette mission du CPE.
Par la suite, le CPE s’assure que l’élève handicapé participe à l’ensemble des enseignements de l’établissement, qu’il est en capacité de s’intégrer avec les autres pendant les temps de vie collective (restauration, permanence, les inter-classes) et qu’il n’est pas marginalisé
Enfin, il veille, en coordination avec l’enseignant référent et la famille au bon fonctionnement des aménagements de la vie de l’élève (transport, absences, rééducation, soins).
Le rôle du professeur principal
Il est le lien privilégié entre la famille, l’équipe enseignante, l’équipe de direction, l’enseignant référent et les acteurs médico-sociaux.
Ainsi, il doit intervenir auprès des autres collègues pour faire passer les informations utiles au projet scolaire et éducatif de l’élève (volet pédagogique du PPS, éléments du PAI) et veiller à ce que l’élève handicapé soit bien accueilli dans la classe.
Le tout, en respectant les règles de la confidentialité…
Il doit également vérifier que cet élève n’est pas isolé et que le projet scolaire est en adéquation avec ses possibilités. Pour cela, il pilote avec le chef d’établissement, l’enseignant référent et la famille, l’accompagnement et l’évolution de ce projet et participe à la rédaction du bilan annuel envoyé à la CDAPH.
Vous aurez bien évidement remarqué qu’une telle mission va bien au-delà du rôle habituel du professeur principal et que l’on peut légitimement se demander si une indemnité supplémentaire pour le travail attaché aux élèves en situation de handicap ne devrait pas rémunérer ce surcroit de travail.
Ce, d’autant plus, que le rôle du professeur principal est également alourdi face aux élèves de sa propre classe pour faire comprendre les particularités de l’élève et la nécessité de la mise en place de certaines règles ou dispositifs singuliers...
Le rôle des enseignants de la classe
Il faut tout d’abord noter que l’enseignement aux élèves en situation de handicap étant exercé par les professeurs affectés dans l’établissement, ces derniers doivent s’informer et se former afin de comprendre les difficultés de l’élève et de les prendre en compte dans l’enseignement de leur discipline.
Les enseignants doivent également s’informer auprès du médecin scolaire et de l’infirmière des termes du PAI, du PPS concernant leur discipline. C’est d’autant plus utile qu’un suivi formalisé de l’évolution des compétences de l’élève doit être mis en place dans toutes les disciplines d’enseignement, y compris l'EPS et que cela permet de mieux coordonner et souder l’équipe pédagogique.
Il est également de la responsabilité de chaque professeur de rendre l’enseignement de sa discipline accessible à tous les élèves scolarisés dans l’établissement ; c’est pourquoi, chaque projet d’enseignement disciplinaire et son évaluation doivent prendre en compte le volet pédagogique du PPS.
Enfin, dans le cas où les possibilités de l’élève l'empêchent d’acquérir connaissances et compétences comme les autres élèves de sa classe, il appartient à l’enseignant de tenir compte des particularités et potentialités de l’élève dans sa progression et son évaluation.
Vous noterez avec attention, que dans toutes les situations, l’enseignant n’est pas responsable des incidences de l’insuffisance des capacités cognitives de l’élève en situation de handicap dans la progression et les résultats scolaires de celui-ci.
Tout comme, il n’est pas responsable des insuffisances ou du caractère inadapté des installations, insuffisances ou caractère inadapté auquel il ne lui appartient pas de palier, même momentanément, sa responsabilité civile et pénale pouvant être, en cas d’initiative malheureuse, engagée…
Le rôle du conseiller d'orientation psychologue
Il est le lien avec les acteurs scolaires (chef d’établissement, professeur principal de l’élève, l’élève et ses parents) pour le suivi scolaire, l’évolution de ce suivi et l’orientation de l’élève. Il est membre de l’équipe de suivi de scolarisation.
IV) Les membres du corps médical
Le rôle du médecin scolaire
Il lui revient d’aider l’équipe éducative à comprendre les déficiences de l’élève handicapé accueilli et à lui adapter l’enseignement de la classe.
C’est, en général, lui qui rédige le projet d’accueil individualisé (PAI) de l’élève atteint d’une pathologie évolutive, en précisant dans quelles conditions particulières il est capable de vivre dans la collectivité (protocole en cas d’urgence, suivi du traitement médical, aménagements spécifiques…) et lui qui contribue au suivi du PPS.
L’infirmière
C’est elle qui assure, auprès de la famille, le lien entre le projet thérapeutique et ses incidences sur le projet scolaire ou éducatif de l’élève (suivi du PAI).
De fait, sa présence permanente dans l’établissement fait d’elle le relais pour l’information des enseignants et des autres acteurs sur les difficultés propres de l’élève.
En principe, elle peut conseiller l’AVS pour les gestes techniques qu’il peut être amené à réaliser et participer au conseil de classe et aux réunions de synthèse concernant cet élève.
L’assistante sociale
Elle fait le lien entre la famille et l’élève et les services sociaux territoriaux (conseil et information sur les droits, protection de l’enfance).
Elle contribue à améliorer l’évolution du projet personnel scolaire de l’élève handicapé et de ce fait, elle est membre de l’équipe de suivi de scolarisation et elle peut participer au conseil de classe et aux réunions de synthèse concernant l’élève.
Attention : Les médecins, infirmiers et assistants sociaux sont soumis au secret professionnel.
Si leur devoir est d’apporter à chaque membre de l’équipe éducative les informations utiles à la compréhension des difficultés et des déficiences des élèves, seule la famille peut donner le diagnostic si elle le souhaite.
Laurent Piau, juriste, est l'auteur de l’ouvrage Le Guide juridique des enseignants aux éditions ESF
Sur cet ouvrage :
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Par fjarraud , le samedi 17 novembre 2012.