Un groupe de travail sera réuni avant la fin de l’année civile afin de travailler sur la prévention de l’alerte suicidaire » chez les personnels de l’éducation nationale. Un CHSCT ministériel était réuni le 6 novembre à la demande des syndicats pour faire un bilan et proposer des mesures de prévention du suicide. Un mois après le suicide de C Renon, le ministère a-t-il pris la mesure de ce qui se passe ? Des professeurs venus soutenir le CHSCT en doutaient.
Minimiser les suicides
« J’aurais aimé que le ministre réponde au courrier intersyndical du 17 octobre », nous dit Bernadette Groison, secrétaire générale de la Fsu. Il n’a pas répondu officiellement et voilà ce qui motive le rassemblement organisé par une large intersyndicale (la FSU, l’UNSA-Education, le SGEN-CFDT, la FERC-CGT et SUD-Education) le 6 novembre pour soutenir le CHSCT ministériel consacré à la prévention des suicides dans l’Education nationale.
Le ministère publie le 6 novembre de premiers chiffres : 58 suicides de personnels de l’éducation nationale. « Cela représente sur l’année 2018-2019 au sein du ministère, un taux de 5,85 cas de suicide sur la base de 100.000 personnes, quand il se situe pour l’ensemble de la population française à 16,7 pour 100.000 (10.700 décès) », ajoute immédiatement le ministère. Comme si on pouvait comparer l’ensemble de la population et une catégorie , les enseignants. La différence c’est le fort taux de personnes agées dans la population totale, une catégorie particulièrement marquée par le suicide. La petite phrase laisse penser que le mal être actuel c’est peu de chose…
Un fort besoin d’écoute
C’est sans doute cela qui a poussé des enseignants à venir camper devant le siège de la direction des ressources humaines du ministère le 6 novembre en appui au élus du CHSCT.
« Le ministre devrait nous écouter car on a l’impression qu’il est totalement sourd et aveugle et qu’il ne prend pas en compte ce qu’on lui dit », nous a dit Frédérique Blot, professeure des écoles et responsable du Snuipp Fsu à Bondy. « Le 3 octobre à Bondy (journée d’hommage à C Renon) presque toutes les écoles ont été impactées par la grève. Cela a été un impact pour de nombreux collègues qui se sont rendus compte qu’ils partagent la même situation avec les autres ». Pour elle, le ministre devrait rétablir des aides administratives pour soulager les directeurs d’école et donner de la liberté sur l’utilisation des 108 heures dues annuellement.
« J’attends une écoute réelle sur ce qui se passe chez les enseignants », nous dit Catherine Anglesio, professeure d’éducation musicale dans le Val de Marne. »Il devrait ne pas faire ces réformes incessantes. On n’a même pas le temps de voir ce qui se passe avec la réforme précédente qu’une nouvelle arrive. On en a marre ».
Lever le tabou des conditions de travail
« On attend que soit levé le tabou des conditions de travail », nous dit Bernadette Groison. « J’aimerais qu’il dise qu’il y a un problème de souffrance au travail ». Elle attend que le sujet des suicides et de la souffrance soit vraiment traité.Mais B. Groison souligne aussi que les choix ministériels vont dans l’autre sens avec la personnalisation des carrières et des rémunérations.
« J’attends que le ministre se saisisse du problème et mette en place une médecine de prévention », nous dit Frédéric Marchand, secrétaire général de l’Unsa Education. « On ne peut pas augmenter sans cesse la charge de travail. Il faut ralentir et alléger ». L’Uns attend notamment des aides pour les directeurs.
A l’issue du CHSCT, le ministère s’engageait sur « la réunion d’un groupe de travail réuni avant la fin de l’année civile afin de travailler sur la prévention de l’alerte suicidaire ». « Une campagne nationale de recrutement des médecins de prévention sera lancée d’ici la fin de l’année civile ». Des annonces qui semblent très en retrait des attentes.
François Jarraud