Cette fois-ci, c’est dans une CLIS 4 que le Café a rendez-vous, pendant la pause méridienne, à l’heure où les élèves de la classe se reposent et dorment, à l’heure où les maîtresses se concertent et font leur préparation de classe.
Ce qui frappe en premier dans ce groupe scolaire de RRS, c’est l’atmosphère feutrée qui règne et le calme de Mylène qui explique : « Mes élèves ont besoin de se reposer, la sieste est vraiment bénéfique pour eux, ils sont très fatigables et après une matinée de travail et un repas au milieu du brouhaha… D’autant plus que certains se lèvent tôt pour venir jusqu’ici. »
Cette école de ville de 10 classes maternelles et élémentaires accueille depuis 2 ans deux CLIS 4, pour des élèves qui ont des troubles des fonctions motrices, parce que toute l’architecture est de plain-pied et que l’équipe, consultée par la mairie et la circonscription, s’est prononcée pour cette implantation.
Une fois la décision prise, toute une série d’actions s’est mise en place.
C’est l’affaire de toute une équipe !
Et toute l’équipe s’y est mise, et toute l’école a été sensibilisée aux questions du handicap. Les locaux sont accessibles, soit. La loi impose d’inclure les élèves handicapés, mais il ne suffit pas de le décréter. Il faut que les mentalités évoluent et rendre les savoirs accessibles, ce n’est pas si simple, c’est même un drôle de défi à relever.
Pascale, la directrice, explique :
« Et dans cette école, tout le monde s’y est coltiné ! Pour expliquer d’abord, la différence, le handicap… : moi-même aux familles dans les réunions de rentrée ou en conseil d’école, le psychologue scolaire en passant dans toutes les classes pour instaurer des temps de paroles avec les élèves, l’enseignante de CLIS en parlant des profils d’élèves en conseils de maîtres, les élèves handicapés eux-mêmes allant se présenter dans les autres classes. »
Mettre dans le coup le personnel municipal a été aussi une priorité, de même que donner une place identifiée par tous et bien reconnue à l’auxiliaire de vie scolaire (AVS) et à l’aide médico-psychologique (AMP) qui interviennent au quotidien avec ces élèves et qui sont une aide précieuse pour leur confort et leur autonomie.
Travailler à deux dans le même espace…
La co-intervention dans la CLIS entre l’enseignante et l’AMP permet que chacune apporte ses compétences particulières. Mylène, la maîtresse, explicite aux élèves tout e qu’ils font, pourquoi ils le font et elle explicite aussi à Maryline, l’AMP, ce qu’elle attend de l’élève ou du petit groupe d’élèves à accompagner, le degré d’autonomie dans l’activité. Maryline mène son activité et en retour, note les observations sur l’élève, les procédures qu’il a utilisées, ce qu’il a fait seul ou avec aide, etc. Les allers-retours sont permanents entre les 2 adultes, les observations de l’une permettant à l’autre d’ajuster ses objectifs d’apprentissage au plus près des potentialités de l’élève.
« C’est un vrai défi, on n’a pas l’habitude au début mais maintenant on se connaît bien et c’est une vraie richesse ! Ca nécessite qu’on se mette d’accord sur les exigences attendues, on se voit tous les vendredis après le repas de midi pour se concerter », confie Mylène. Le travail de concertation n’est pas prévu dans le temps institutionnel…
De l’intégration à l’inclusion
Pour inclure ces enfants dans l’école, il a fallu penser ensemble toute une série de dispositifs bien connus et utilisés ici à bon escient : au niveau pédagogique et organisationnel, selon les projets ou les compétences, des décloisonnements, des groupes de besoins, des interventions à 2 enseignantes avec 2 classes pour dédoubler les groupes ensuite, des échanges de service, des interventions de la directrice ou l’enseignante surnuméraire du RRS, etc.
C’est la volonté politique (au sens étymologique du terme) de mettre en avant les questions pédagogiques et de s’en emparer collectivement qui fait que les enseignants ont retrouvé le cœur de leur métier.
La question du rapport au savoir et la notion d’accessibilité des savoirs se rejoignent, enfin comprises comme les 2 composantes indissociables d’une même problématique. Le fait de se poser la première donne des éléments pour résoudre la seconde. Et cette équipe a fait beaucoup de chemin en le comprenant.
C’est aussi la mise en cohérence de tout ce qui se passe au sein de l’école qui permet de mieux vivre l’école, la difficulté ou le handicap.
Les micro-projets des classes sont articulés avec le projet d’école, lui-même articulé au projet d’éducation prioritaire, corrélé au projet de l’équipe de circonscription (IEN et conseillers pédagogiques) et à celui du Réseau d’aides (un RASED complet). Les objets de travail des différentes instances sont cohérents entre eux, au niveau de l’école, dans chacun des 3 cycles, de l’équipe de circonscription, des liaisons école/collège. Des concertations, harmonisations permettent de donner du sens à ce qu’on fait. De ce fait, la CLIS est une classe parmi les autres. Les besoins particuliers des élèves handicapés sont pris en compte comme ceux des élèves en grande difficulté, comme ceux des élèves « ordinaires ». La notion de personnalisation est très présente pour prendre en compte chacun comme sujet, sans pour autant négliger le collectif et le vivre ensemble. Chaque élève est singulier et reçoit une attention particulière, cela aplanit les différences et compense les handicaps.
La conclusion revient à Mylène : « Les adaptations existent mais si elles sont conçues pour l’élève handicapé, elles servent à tous. »
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