Jean-Michel Blanquer arrivera-t-il à réaliser la promesse d’Emmanuel Macron ? Dès maintenant on peut émettre de sérieux doutes. Pas seulement à cause du manque de locaux. Ce sont les postes qui vont poser problème. La réalisation sur 2017 est déjà largement inférieure à ce qui était prévu. Du coup, l’objectif du dédoublement des CP et CE1 de l’éducation prioritaire, promis par Emmanuel Macron lors de sa campagne électorale, semble hors de portée pour 2018. Un mois et demi seulement après sa nomination, Jean-Michel Blanquer semble déjà dans l’incapacité de satisfaire l’objectif présidentiel. Ni la musique à la rentrée, ni le discours sur le redoublement, ni la promesse de la réussite et du bonheur pour tous, ni toute la « soap education » agitée par le ministre ne doivent faire oublier le calcul des postes…
Les promesses de campagne d’E. Macron
Rappelons nous les engagements d’Emmanuel Macron. Dans son programme de campagne, le futur président a annoncé le dédoublement des CP et CE1 de l’éducation prioritaire. Son équipe avait fixé à 12 000 le nombre de postes nécessaires, soit 5000 pour le CP et 7000 en CE1. Ce calcul, nous l’avons dit à l’époque, est réaliste.
Où les trouver ? L’équipe d’Emmanuel Macron avait fait un calcul déjà serré. Selon elle, en 2017 tous les CP de Rep+ et presque tous les CP de Rep devaient être dédoublés en utilisant les maitres surnuméraires , les fameux « plus de maitres que de classes » (PDM). Il y avait 5 161 PDM et cela devait effectivement suffire pour la rentrée 2017. Pour la rentrée 2018, l’équipe de campagne annonçait 5000 recrutements et 2000 redéploiements. Ce qui déjà supposait de racler les fonds de tiroir des remplacements…
Où en est JM Blanquer ?
Voyons maintenant où en est JM Blanquer. Pour la rentrée 2017 il a abaissé l’ambition ministérielle au dédoublement des seuls rep+, soit environ 2500 postes. Actuellement , selon certains hauts fonctionnaires de l’Education nationale, 1 700 PDM seront réaffectés en CP . Les 800 postes restants seront pris sur les remplaçants. Nos recoupements personnels, dans plusieurs départements, confirment ces données.
Pour atteindre l’objectif présidentiel le ministre doit donc trouver 9 500 postes pour la rentrée 2018. Et c’est là qu’est le problème.
L’impasse
Le ministre s’est engagé à ne pas mettre fin au dispositif « plus de maitres que de classes ». Difficile pour lui d’aller au-delà des 2 500 postes déjà réaffectés. Dans cette optique ce sont 9 500 postes à trouver. S’il ne respectait pas sa parole et supprimait tous les PDM , ou plutôt s’il les « réaffectait en CP et CE1 », comme il dit, ça ne règlerait pas son problème. Il lui resterait quand même 7 500 postes à trouver.
Les jeunes enseignants stagiaires recrutés sur concours sont à mi-temps. En 2017 ils compensent juste les départs en retraite. Pour pouvoir atteindre l’objectif de 9 500 postes en 2018 et remplacer les 6000 à 6500 départs en retraite annuels, il faudrait presque tripler le recrutement annuel. Ce qui semble carrément impossible. Et une énorme provocation après la publication du rapport de la Cour des Comptes.
« Soap Education »
Comment Jean-Michel Blanquer peut-il sortir de l’impasse ? On ne peut qu’émettre des hypothèses. Il pourrait le faire en revenant sur les autres politiques menées sous le quinquennat Hollande : supprimer tous les PDM, fermer des classes, saigner à blanc les Rased et vider le vivier de remplaçants qui commence tout juste à se reconstituer. Des mesures qui auraient un coût politique que le président de la République n’a probablement pas envisagé.
Emmanuel Macron est-il prêt à voir sa réforme enterrée ? Probablement pas. Pour le moment son ministre semble surtout réussir à détruire les réformes précédentes. Le retour accéléré à la semaine de 4 jours pourrait bien d’ailleurs annuler les bienfaits attendus par E. Macron du dédoublement en CP CE1.
En attendant , le ministre amuse l’opinion avec ses propos sur la musique, l’épanouissement, « la réussite pour 100% des CP » et autres propos publicitaires. Selon certaines sources, cette agitation médiatique aurait été baptisée « soap education » à l’Elysée…
François Jarraud
PS Contacté, le cabinet de JM Blanquer n’a pas répondu à nos questions.