Pourquoi compte-on deux fois plus de décrocheurs en France qu’en Pologne ? Un rapport su Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique met en évidence les défauts de pilotage et de conception d’une politique qui reste à construire. Alors que 12% des jeunes « décrochent » le pays ne consacre que 740 millions pour lutter contre ce fléau. Encore cet argent part-il parfois dans des dispositifs inadaptés. Encore est-il utilisé sans véritables organisateurs.
Mais comment font-ils les Polonais ? Leur taux de décrochage atteint 6% quand le nôtre frise les 12%. Le premier intérêt de ce rapport c’est d’interroger les dispositifs d’autres pays. En Pologne la scolarité obligatoire a été prolongée jusqu’à 18 ans, avec un tronc commun sans sélection jusqu’à 16 ans. La notation a été revue et on note sur 6. Un socle commun est mis en place. La Pologne n’est pas le seul pays à avoir une politique efficace contre le décrochage. Le rapport cite les Pays Bas ou le Québec par exemple. Dans ce dernier pays les Journées de la persévérance ont hissé la lutte contre le décrochage au niveau d’une grande cause nationale.
Le rapport montre l’empilement des dispositifs en France. Sur les 740 millions consacrés aux politiques de lutte contre le décrochage, seulement 136 millions vont à la prévention. Certains dispositifs sont ruineux. Ainsi dans les EPIDE le coût moyen de chaque décrocheur est de 25 312 euros soit cinq fois plus qu’en micro lycées (6214) ou qu’en école de la seconde chance (5400 €).
Le rapport consacre une grande partie à la définition des facteurs de décrochage. Ils sont très variables mais on sait que le phénomène concerne davantage les garçons que les filles, les enfants de milieu populaire que les plus favorisés (34% père ouvrier 10% père cadre supérieur). La moitié des décrocheurs ont un niveau faible dès l’entrée en sixième. Le décrochage interroge « la capacité de l’école à faire réussir les enfants des familles les plus défavorisées ». Or pour le moment les politiques de prévention à ce niveau sont rares. En France la mobilisation ne descend pas au niveau de l’établissement ou de la classe. Pour les auteurs du rapport, la lutte passerait par des changements pédagogiques, au niveau de l’évaluation et du suivi des élèves par exemple.
Pour le rapport, « la politique de lutte contre le décrochage scolaire est en construction… La prévention est peu structurée et ne fait pas l’objet d’une politique nationale, même si de nombreuses actions de prévention se développent localement. Les moyens consacrés à la politique sont relativement modestes ». Le rapport interroge aussi l’efficacité de l’existant. « Les moyens aujourd’hui alloués aux actions de remédiation ne sont pas toujours efficients, ces actions intervenant trop tardivement pour des élèves déjà très avancées dans le processus de décrochage ».
Le pilotage reste « embryonnaire« . « Il existe peu de pilotage national interinstitutionnel dédié au décrochage, le sujet étant le plus souvent traité dans des cadres connexes », dit le rapport. « Aux niveaux académique, régional et départemental, les partenariats sont souvent hétérogènes. Des acteurs incontournables (élèves et leurs familles, enseignants, corps d’inspection, entreprises) sont également insuffisamment impliqués dans le pilotage de la politique ».
Le rapport invite donc à descendre la politique de lutte dans la classe. » La politique de prévention doit s’appuyer sur la mise en oeuvre plus systématique d’alliances éducatives au sein de l’école et de la classe, en faisant collaborer des équipes éducatives et pédagogiques. Elle doit également accorder une place plus importante aux parents, en les impliquant davantage dans le projet pédagogique et éducatif de l’élève. La politique de prévention doit proposer, au-delà des dispositifs pour les élèves, des actions vers les personnels de l’Education Nationale, en particulier les enseignants et les corps d’inspection pour le premier comme le second degré. L’accompagnement et la formation des enseignants et des corps d’inspections sont des leviers majeurs pour améliorer la réussite des élèves ». Autant d’objectifs qui devraient être proposés lors de la conférence sociale des 7 et 8 juillet. Benoit Hamon y est invité.
François Jarraud
Le rapport
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Dossier : Objectif atteint pour V Peillon
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A Armand : Changer l’école pour lutter contre le décrochage ?
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C Blaya : qui sont les décrocheurs ?
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