Le weekend dernier, samedi 23 et dimanche 24 mars, se sont tenues les premières Assises nationales des Enseignants Référents à la scolarisation des élèves handicapés. Deux journées lors desquelles des dizaines d’ERSEH sont venus échanger sur leur métier et les condition de son exercice. Un métier chahuté par la difficulté d’une école inclusive mal pensée, sans enseignants et enseignantes formé·es, sans moyens dédiés et sans RASED… Ces journées ont aussi été l’occasion pour ces enseignants et enseignantes spécialistes de fonder l’AFER – Association Français des Enseignants Référents. « Il n’existait à ce jour aucune représentation nationale de la profession, aucune statistique émanant du Ministère – on parle d’un millier ou plus d’ER en France » nous confie Quentin Cohuau, le tout nouveau président. « Ce vide vient d’être comblé par la fondation de l’AFER ». Il répond aux questions du Café pédagogique.
Les premières assises nationales des enseignants référents qui se sont tenues à Marseille les 23 et 24 Mars. Pouvez-vous nous indiquer quels étaient les enjeux, et comment se sont déroulées ces rencontres ?
Nous avions besoin de nous rencontrer, de partager, entre référents des quatre coins du pays. Il faut insister sur le fait que c’est la première fois que cela se produit et l’enjeu est essentiel quand on sait que les pratiques sont départementales et donc parfois très différentes. Plus de soixante référents, originaires de 23 départements, 10 régions parfois très éloignées, se sont mobilisés sur leurs fonds propres, ont parcouru plus de 2000 km dans le week-end. Cela répondait à un besoin c’est certain. La rencontre a eu lieu, le déroulement a été très fluide. Du vendredi soir au dimanche soir. Toutes les Associations départementales déjà constituées ont pu participer, même l’ADER59 en distanciel. Au-delà de la dimension de partage et d’échange, il y deux enjeux. L’ADER (Association Départementale des Enseignants Référent) des Bouches du Rhône, forte de son expérience depuis 16 ans, souhaitait insuffler l’idée de créer ou relancer d’autres ADER partout en France. Je crois que c’est chose faite. L’idée est passée, les collectifs vont s’organiser : soit par département, soit à plusieurs pour les départements ruraux… L’autre enjeu était la création d’une entité nationale. C’est également chose faite. Avec l’objectif de créer un acteur légitime pour s’adresser aux instances nationales, tant dans le domaine de l’Éducation Nationale, que dans celui de la santé. Créer cette une association nationale c’est aussi appuyer, soutenir les initiatives locales si besoin. Enfin, rendre plus visible notre métier avant les 20 ans d’une loi qui nous a vu naître (la loi de 2005).
Quels sont les débats qui ont été abordés ? Comment reliez-vous la situation matérielle et morale des Enseignants Référents au contexte général que connaît l’éducation nationale et l’école inclusive en particulier ?
Nous avons beaucoup échangé sur nos conditions de travail et sur les conditions d’accueil des élèves en situation de handicap à l’école. Nous avons pu mesurer les écarts entre département, à tous les niveaux. Le texte qui régit notre métier est le même, l’exercice de nos missions ne se fait pas dans les mêmes conditions sur le territoire. Notre objectif est de promouvoir au niveau national les conditions d’exercice de nos missions qui sont des leviers de progrès, d’amélioration. La loi de 2005 est une loi vertueuse. Notre métier est indispensable pour la mise en place de cette loi.
Mais aujourd’hui, nous faisons tous le même bilan. Les moyens déployés pour scolariser certains élèves en Situation de Handicap (SH) ne sont pas suffisants. Les conditions d’accueil à l’école ne sont pas satisfaisantes. Elles peuvent mettre en difficulté ces élèves en SH, mais aussi les familles, les enseignants, les élèves de la classe… et nous les enseignants référents. L’école inclusive est une idée noble, mais dans certaines situations, elle est difficilement applicable. C’était un des axes développés par la conférencière samedi matin.
Les questions que vous abordez-vous concerne l’ensemble de la communauté éducative, enseignants, non enseignants, parents d’élèves, syndicats et associations spécialisées. Comment envisagez-vous développer les coopérations avec l’ensemble de ces acteurs ?
Nous avons acté dans nos statuts de développer ces coopérations. Souvent, les leviers sont communs, il faut donc nous unir pour les activer. Et puis, vous savez, le partenariat, le travail en équipe est un marqueur fort de notre métier, c’est une condition sine qua non pour sécuriser le parcours de scolarité des élèves en SH.
Et avec le Ministère ? Et les pouvoirs publics en général ?
A nous de nous faire connaître, de passer d’une posture invisible ou floue à celle de partenaire utile pour construire une école (plus) humaniste et plus juste. Nous pensons qu’au même titre que les MDPH, les IEN, les enseignants en classe, les AESH ou les structures de soins, nous pouvons apporter un regard intéressant auprès des instances locales et nationales.
En ce qui concerne votre association, comment allez-vous fonctionner ?
Nous avons voulu aller au plus simple. Cotisation la moins chère possible (15 euros par an), adhésion individuelle et représentation des ADER quand elles existent. Dématérialisation au maximum, facilitation du militantisme. Dans la mesure du possible, nous allons reproduire au national ce qui a permis localement de nous développer.
Quelles sont les prochaines étapes ?
Il y a tout à faire, même si le week-end que nous venons de passer a été très riche, que nous le percevons comme l’aboutissement d’un travail de longue haleine, nous n’en sommes qu’au point zéro ! Mais avant tout il va falloir nous faire connaître et lancer une campagne d’adhésion. Sans adhérent, pas de visibilité ! Et puis rapidement nous organiser en AG, à la rentrée de la prochaine année scolaire. Plusieurs réformes ministérielles sont en projet dans le cadre de la phase 2 de l’école inclusive. Notre intention est de nous faire entendre et de peser dans la balance.
Propos recueillis par Alain Barlatier
Pour contacter l’AFER : afer.ens.ref@gmail.com