Qu’est-ce que l’addiction ? Comment faire la différence entre intérêt passion et addiction ? En suggérant que, après tout, on pourrait se passionner pour les TIC, l’auteur principal de cet ouvrage, spécialiste de ce domaine en tant que responsable de la consultation d’addictologie à l’hôpital de Garches, nous invite à comprendre l’intérêt le danger et les limites de la passion pour les écrans.
Dans le monde éducatif, comme plus généralement dans la société, les non spécialistes sont souvent à la recherche de classification rapide des situations qu’ils rencontrent. Etiqueter un comportement comme à risque, ou comme addictif est plus pratique que d’analyser à fond ce qui se passe réellement. On observe dans les écoles les mêmes échanges à propos des dyslexies, des intellectuellement précoces ou des hyperactif. Dès que je peut mettre une étiquette sur quelque chose qui me gène, cela me rassure et me rend moins gênant le problème. Mais il est moins gênant parce qu’il m’évite d’en analyser les tenant et les aboutissant, et éventuellement sa propre responsabilité.
Ainsi pour ce qui est des véritables addictions à l’ordinateur (sous toutes ses formes), il est moins inquiétant de marginaliser le phénomène soit en l’ignorant, soit en le médicalisant, soit plus simplement en le classant. Or les auteurs de l’ouvrage nous invitent à ce cheminement qui consiste à démonter derrière un comportement le contexte dans lequel il émerge, la manière dont il se développe et les indicateurs d’une dérive possible. Mais ils n’épargnent personne, pas même ceux qui viennent déplorer chez leurs propres enfants ces dérives. Car c’est bien là la difficulté pour aborder les véritables addictions pathologiques, elles font l’objet d’un déni. Personne ne veut voir le fait lui même tant qu’il ne génère pas trop de déséquilibre dans le milieu dans lequel il se produit.
Comme jadis pour le développement des thérapies familiales, on ne peut considérer que le problème est individuel parce que c’est l’affaire de la rencontre d’une personne et d’une machine. Cette rencontre obsessionnelle n’est pas forcément mauvaise et la diaboliser alors qu’elle n’est qu’un intérêt appuyé ou même une passion, peut générer des situations relationnelles catastrophiques.
Il faut bien évidemment entendre cet appel au dialogue, à la verbalisation, à la socialisation que les auteurs mettent en évidence. Car la relation addictive à l’écran est identique à d’autres addictions (drogues etc.) en cela qu’elle désocialise massivement.
L’éducateur et l’enseignant trouveront dans ce livre qui comporte de nombreux exemples des outils pour analyser et comprendre des comportements. Le parent y trouvera en outre des moyens d’interroger ce qui se passe dans la famille même. Questionner nos modèles d’éducation, que l’on soit parents ou enseignants, en s’appuyant sur des analyses comme celles-ci peut nous permettre d’y voir plus clair et ainsi de mieux aider réellement les jeunes qui, dans leur conduite addictive, expriment dans tous les cas une forme de souffrance, voire de conduite autodestructrice.
BD