A la veille des premières épreuves du controle continu du nouveau (E3C) bac 2021, chaque camp fourbit ses armes. De nombreux enseignants ont manifesté à Paris le 16 janvier contre la réforme du bac et l’organisation des épreuves qui doivent commencer le 20 janvier. Les syndicats du privé demandent eux aussi l’annulation de la session de janvier. De leur coté les recteurs donnent des instructions aux chefs d’établissement, comme cette lettre aux proviseurs de l’académie de Rennes que nous nous sommes procurés…
Le privé rejoint le mouvement
Qui veut encore des E3C ? Tous les syndicats enseignants du public ont demandé depuis plusieurs jours l’annulation de la première session qui va commencer le 20 janvier. Le 16 janvier c’est au tour de tous les syndicats du privé (Fep Cfdt, Cgt, Sundep, Synep Cgc, Spelc, Snep Unsa) de demander au ministre « de renoncer à cette session ». « A mesure que les semaines passent, les problèmes sont de plus en plus évidents : problèmes d’organisation, lourdeur de la procédure, inégalités de conditions de passage et de traitement entre établissements et donc entre élèves », écrivent les syndicats. » A moins de quinze jours de la tenue des épreuves, rien n’est prêt, ce qui contribue au stress grandissant des élèves. Les enseignants expriment leur malaise, ne pouvant faire correctement leur travail ».
Dans la manif parisienne
C’est aussi ce que nous ont dit les manifestants réunis près du ministère le 16 janvier. Une dizaine de lycées franciliens étaient représentés dans une petite foule soutenue par de nombreuses voitures qui passaient sur le boulevard.
« Je suis là contre la réforme des retraites et contre celle du lycée », nous a dit Marion, professeure d’anglais au lycée du Parc des loges à Evry. « Les E3C c’est une réforme aberrante et injuste pour les élèves. Ils n’ont pas le temps de se préparer et ont les mêmes sujets que les élèves de la filière générale. C’est une souffrance de les regarder travailler. Car ils ne sont pas au niveau qui est demandé », explique t-elle. « Comme professeure mon devoir c’est de les mener de l’avant pas de les envoyer 6 pieds sous terre ». Marion souligne aussi des difficultés techniques. « Il y a des inégalités dans les conditions d’organisation des épreuves. Dans mon lycée on n’a pas suffisamment de salles et on n’a pas le matériel vidéo nécessaire aux épreuves en nombre suffisant. On ne sait pas si on va y arriver ».
Un enseignant de SES, d’un lycée parisien, soulignait des problèmes en maths où il faut 4 sujets qui correspondent aux progressions de tous les professeurs. « C’est la quadrature du cercle ! ».
Les enseignants s’organisent
Que peuvent faire les opposants aux E3C ? On en discutait beaucoup dans la petite foule de manifestants au regard des sanctions possibles. Au lycée Clémenceau de Villemomble une enseignante annonçait une grève durant les épreuves et un refus de corriger les copies. D’autres s’organisent davantage. Ainsi, selon une enseignante du lycée Romain Rolland d’Ivry (94), des correcteurs au niveau d’un bassin se sont mis d’accord pour faire en sorte que les E3C n’aient pas lieu. La dématéralisation des copies ne va pas leur rendre la tâche facile.
Une minorité très vocale ?
Intervenant sur RTL le 16 janvier, JM Blanquer a minimisé la mobilisation enseignante. Les E3C sont « une innovation extrêmement intéressante », dit-il. « Dans les établissements ça se passe très normalement » mais « il y a toujours une petite minorité qui est très vocale », dit-il. « Il y a un arrière plan politique. Certains cherchent à avoir une action politique contre le gouvernement. Ce n’est pas normal… On voit des choses choquantes. L emur d elivres estun très mauvais symbole. Jeter un livre ne peut jamais être un acte de professeur. Ceux qui font cela nous déshonorent ».
La lettre du recteur de Rennes aux proviseurs
Mais que se passe t-il quand la « minorité vocale » c’est les enseignants de presque tous les lycées d’une académie ? Le Café pédagogique s’est procuré une lettre envoyée par le recteur de Rennes le 13 janvier aux proviseurs des lycées généraux et technologiques. Le recteur passe en revue les cas de figure qui peuvent subvenir et donne la conduite à tenir.
Il invite à rappeler « de manière individuelle aux enseignants qui maintiennent leur intention de perturber les évaluations » leurs missions statutaires. Un ficher joint donne des « éléments de langage juridiques » en ce sens.
En cas de refus de proposer des sujets, il invite à alerter le rectorat pour être aidé par un IPR « qui se rapprochera de vos enseignants » dans le choix des sujets. En clair le recteur ne peut pas contraindre les enseignants à choisir les sujets puisque la note définissant l’épreuve en rend le chef d’établissement responsable.
En cas de refus de surveiller i invite à mobiliser les assistants d’éducation et les personnels administratifs.
En cas de refus de corriger les copies , il demande aux chefs d’établissement d’envoyer des mises en demeure individuelles des enseignants concernés.
Dans cette académie près de 300 enseignants ont manifesté au rectorat contre les E3C le 15 janvier selon le Snes. La quasi totalité des lycées contesterait les épreuves. Le syndicat invite chaque section d’établissement à déposer un préavis de grève pour la durée des surveillances.
F Jarraud