Le Se-Unsa contre une évaluation en fin de grande section
Annoncée par Luc CHatel le 31 août, l’idée d’une évaluation finale de maternelle est rejetée par le Se-Unsa. « L’école maternelle permet de nombreuses acquisitions sur la base desquelles les apprentissages de l’école élémentaire vont se construire. C’est pourquoi il faut renforcer l’évaluation des acquis des élèves ». Le dossier de rentrée du ministère annone l’introduction dans le livret scolaire de chaque enfant d’un bilan des acquis de fin de maternelle.
Pour le Se-Unsa, « cela pourrait conduire à marquer, avant même le début de la scolarité obligatoire, comme étant en échec scolaire certains enfants simplement moins matures que d’autres ». Le syndicat prévient : « si telle est la conception du ministère en la matière, il se heurtera à notre opposition déterminée ».
Communiqué
Evaluations de CE1 : Les syndicats demandent de nouveaux dispositifs
« Les évaluations mises en place cette année ne sont pas un outil au service des élèves, des enseignants ou des familles » estime le Snuipp. « Leur mode de correction binaire ne permet aucune analyse des difficultés des élèves et constitue une régression par rapport aux évaluations précédentes ».
L’esprit est le même au Se-Unsa qui demande lui aussi un nouvel outil d’évaluation. « Le SE-UNSA conteste la pertinence du dispositif mis en place cette année. En effet, les mêmes objectifs pourraient être atteints par des évaluations portant sur des échantillons représentatifs. On échapperait ainsi au principal effet « pervers » de ces évaluations : un travail centré uniquement sur les mathématiques et le français au détriment des autres domaines d’enseignement ». Le syndicat souhaite aussi de nouveaux outils de remédiation. « Les disparités des résultats entre académies mettent en évidence la nécessité de mener des politiques ambitieuses en matière de lutte contre les inégalités sociales de réussite scolaire. Un effort particulier doit être fait en direction des départements d’outre-mer. Ces résultats ne font que confirmer des faits avérés. Il est maintenant urgent d’apporter des solutions efficaces ».
Bruno Suchaut (IREDU) :
une évaluation pour quoi faire ?
Quelle est l’efficacité et les finalités des évaluations de CE1 et CM2 ?
Certes elles permettent d’alimenter les tableaux exigés par la loi de finances (LOLF). Mais elles apportent peu d’informations nouvelles au maître du fait de leur encodage sommaire (binaire) qui ne permet pas une analyse suffisamment subtile des réponses pour envisager une remédiation efficace. Ainsi Bruno Suchaut a souligné une incohérence à ce niveau. » La vraie question », écrit-il, « est de savoir dans quel cadre apporter cette aide, quels élèves doivent en bénéficier et selon quelles conditions. Sur ce point, les recherches en éducation ouvrent des pistes intéressantes et montrent qu’il existe des modes de prise en charge efficaces à condition qu’ils soient véritablement intégrés au fonctionnement de l’école et mobilisent de fait, des moyens conséquents en termes d’encadrement. Même dans un contexte budgétaire contraint, ces solutions peuvent être envisagées à condition d’une réorganisation partielle du fonctionnement pédagogique des écoles ». Or il est clair que cette voie est barrée. Il faut ajouter que l’exemple de l’académie de Créteil montre que quand l’échec atteint un tel niveau, la réponse ne peut se limiter aux dispositifs officiels, dont l’efficacité est des plus limitée, ni même à l’Ecole. C’est la ségrégation croissante de la société qui est mise en évidence et la réponse ne peut être uniquement scolaire.
La première question soulevée par l’évaluation est celle du pilotage de l’évaluation elle-même. Sur le plan technique, l’évaluation de CM2 a été vivement critiquée. Celle de CE1 l’a été nettement moins même si le codage des résultats semble inadéquat. Les deux évaluations sont conçues par la Dgesco, une des directions du ministère. Des voix se sont élevées dans et hors institution, pour souligner le manque d’indépendance de la direction de l’enseignement scolaire vis-à-vis du cabinet du ministre et le déficit en savoir faire, par rapport à la DEPP par exemple. Si des évaluations sont faites dans la quasi-totalité des pays développés, il est rare que ce soit l’administration concernée qui s’évalue elle-même…
Mais c’est aussi le pilotage de l’information qui est en question. Comment empêcher la circulation des informations sur l’évaluation école par école ? A quel titre la refuser aux parents ? Comment justifier de la carte scolaire sans dévoiler des informations plus précises ? Mais dans ce cas comment empêcher la mise en concurrence des écoles et ne pas accélérer les processus ségrégatifs déjà fortement à l’œuvre ?
Question de confiance. « La récente réaction concernant les évaluations nationales dans les classes de CM2, montre le manque de confiance du milieu enseignant à l’égard des directives officielles » note B. Suchaut. Or s’il est nécessaire pour l’information des acteurs de l’école et celle des familles d’avoir une évaluation de son efficacité, celle-ci peut-elle se construire dans une période où les objectifs ministériels semblent flous ou menaçants ? Pour le moment cette évaluation semble soulever plus de questions qu’apporter de réponses.
B. Suchaut
Dossier : Evaluation : le système à un tournant
Et si l’on évaluait l’évaluation
Sans évaluation on prive les familles…