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Les chercheurs peuvent-ils changer l’Ecole ? C’est le défi que relève le Cnesco (Conseil national d’évaluation du système scolaire) en s’attaquant au redoublement sur tous les fronts. Championne mondiale du redoublement, la France tient à cette pratique qui rassure les parents et maintient l’ordre scolaire. Pour changer les choses, le Cnesco mise sur des stratégies d’information innovantes. Car s’attaquer au redoublement peut causer beaucoup de déni et même de désarroi…

« On a la volonté que la recherche soit utilisée par les acteurs de l’éducation« . Car c’est du coté de la recherche, en totale indépendance avec l’Education nationale, que le Conseil national d’évaluation du système scolaire (Cnesco) sent battre son coeur. Crée par la loi d’orientation, le Cnesco est chargé d’évaluer en toute indépendance l’organisation et les résultats de l’enseignement scolaire ». La loi prévoit qu’il réalise des évaluations  » à la demande du ministre chargé de l’éducation nationale, du ministre chargé de l’enseignement agricole, d’autres ministres disposant de compétences en matière d’éducation, du ministre chargé de la ville ou des commissions permanentes compétentes en matière d’éducation de l’Assemblée nationale et du Sénat ». Présidé par Nathalie Mons, il a choisi le redoublement pour faire son entrée dans l’univers éducatif français. Si le sujet a déjà été bien étudié , le Cnesco arrive avec des synthèses documentaires nouvelles et surtout une stratégie pour que la recherche rencontre les acteurs de terrain.

« La France a une pratique très massive du redoublement« , explique Nathalie Mons le 28 août en présentant le programme du Cnesco sur ce sujet. Le Cnesco a réalisé une synthèse des recherches existant sur ce sujet avec l’aide de l’IFE. 28% des jeunes français âgés de 15 ans ont déjà redoublé ce qui nous place dans le peloton de tête des pays de l’Ocde. Ce taux peut monter à 60% en L.P. Deux périodes sont marquées par une forte hausse du redoublement : le CP et le CE1 où le redoublement est plutôt vu comme un outil de remédiation. Et les 3ème et 2de (9% des élèves y redoublent) où il est une réponse aux stratégies des familles. Les chercheurs arrivent ainsi à faire le portrait robot du redoublant : un garçon, issu d’une famille monoparentale en précarisation économique, avec une mère de niveau éducatif faible. S’attaquer au redoublement c’est donc s’installer au coeur des inégalités sociales à l’Ecole.

Positif le redoublement ? La croyance est très répandue aussi bien chez les parents que les enseignants. Pour le Cnesco, les chercheurs ont démontré son effet négatif à moyen et long terme sur la carrière scolaire des élèves. Pourtant le système éducatif continue à le promouvoir. Même si l’institution fait pression pour qu’il diminue, le Cnesco relève à quel point la réglementation française est laxiste par rapport aux autres pays européens où le redoublement est très encadré. En France par exemple aucun critère objectif n’est exigé pour cette décision. Et cela alors que son coût direct pour l’Education nationale est estimé par le Cnesco à 1,6 milliard.

Peut-on faire diminuer le taux de redoublement ? De fait les travaux du Cnesco montrent qu’il a déjà beaucoup reculé. Dans presque tous les pays européens on organise un rattrapage en fin d ‘année scolaire pour l’éviter. En France certains établissements ont particulièrement réussi à le faire reculer. Le Cnesco donne en exemple 4 collèges de l’éducation prioritaire du 19ème arrondissement parisien. Christine Mengin, principale du collège Louise Michel, a fait passer le taux de redoublement de 7 à 1% en fin de 3ème en travaillant sur les difficultés des élèves. Une aide individualisée financée sur fonds européen (FSE) permet un suivi efficace et individuel des élèves en difficulté sur la base d’un diagnostic posé par les enseignants. Ces élèves sont aussi suivis par des dispositifs locaux en dehors du collège. Mais pour faire reculer le redoublement « on communique énormément avec les parents », confie C Mengin.

Comment faire bouger les choses ? Le Cnesco mise, avec l’aide de l’IFE, sur une stratégie de communication originale. Dès la rentrée une centaine d’établissements se sont portés volontaires pour travailler sur la représentation du redoublement. Le Cnesco veut alimenter un débat national sur le redoublement. Il passera par des forums en régions avec les parents. Une conférence de consensus réunira tous les acteurs pour faire le point sur les enjeux et les points d’accord et de désaccord sur le redoublement. Le Café pédagogique prendra sa part dans la diffusion des travaux du Cnesco.

François Jarraud

Installation du Cnesco

Des conférences de consensus avec le Cnesco

Le minsitère décrète la fin du redoublement

Comment diminuer le taux de redoublement ?