Quel impact a eu la crise sanitaire sur les jeunes ? La Depp (division des études du ministère de l’éducation nationale) publie une Note reprenant des données OCDE sur les études et l’emploi. D’une toute autre nature, une autre étude, du ministère de la Santé, fait le point sur les effets du confinement chez les jeunes.
Allonger les études face au chômage
« En France, les jeunes de 18-24 ans ont moins souvent été en emploi en 2020 qu’en 2019 mais ont été plus nombreux en études », affirme la Depp en se basant sur les données OCDE. La part des 18 à 24 ans ni en emploi ni en études (NEET) est restée stable en 2020. La France n’est pas le seul pays a avoir su protéger les jeunes des effets sociaux de la pandémie. La Belgique, le Danemark, la Suisse connaissent aussi une stabilité. A l’inverse le Canada, les Etats Unis, l’Espagne ont connu une hausse de 2 à 4 points du nombre de jeunes ni en étude ni en emploi.
En France la stabilité n’a pas été atteinte en offrant davantage d’emplois aux jeunes. « La hausse de la part d’étudiants a compensé la baisse du taux d’emploi entre 2019 et 2020 », note la Depp. Avec le soutien de l’Etat au travail partiel durant le confinement on a les deux éléments qui ont absorbé le choc créé par la pandémie. En 2020 la part des jeunes en études a augmenté de 2 points dans le supérieur ou le lycée. Par contre le taux d’emploi des jeunes sui ont arrêté leurs études a reculé de 2 points en 2019 et 2020.
Mais des effets sur l’accès à l’emploi
La crise a aussi modifié le travail des jeunes. « En 2020, 4,4 % des jeunes sortis depuis un à quatre ans de formation initiale ont bénéficié de mesures d’activité partielle, contribuant à la hausse du sous-emploi, alors que seulement 0,1 % des jeunes étaient concernés en 2019… Pour les jeunes en emploi aussi, les conditions de travail ont évolué en 2020. La possibilité de travailler à domicile a par exemple permis de continuer son activité malgré les mesures sanitaires, à tous les niveaux de diplôme. Ce sont principalement les diplômés du supérieur long qui ont utilisé cette possibilité ».
Et sur la santé des jeunes
S’intéressant aux jeunes scolarisés (9-18 ans), l’étude du Ministère de la Santé (BEH Covid N°8) est nettement moins positive. « L’objectif de cette étude était d’évaluer l’état émotionnel et la détresse psychologique chez les enfants de 9 à 18 ans durant et au décours du confinement en fonction de leur environnement et de leurs conditions de vie et d’habitat. Elle visait également à mesurer la résilience et les stratégies mises en place pour la préservation de leur bien-être », notent ses auteurs. Et pour cela elle se base sur près de 4000 entretiens avec des jeunes de tous milieux sociaux.
« Les adolescents semblaient présenter une santé mentale plus impactée par rapport aux plus jeunes et les filles semblaient présenter une santé mentale plus impactée que les garçons pendant et au décours du confinement », notent les auteurs. « Les facteurs associés à la détresse psychologique étaient les conditions de logement (être confiné en zone urbaine, dans un appartement ou une maison sans jardin, ne pas avoir accès à un extérieur dans le logement, occuper un logement sur-occupé et ne pas pouvoir s’isoler), les conditions économiques (difficultés financières et alimentaires, diminution des revenus suite à l’épidémie ou au confinement, période de chômage des parents, absence de connexion à Internet), les caractéristiques des parents (famille monoparentale, niveau d’étude inférieur ou égal au baccalauréat, parents ouvriers ou employés, nés à l’étranger, absence de soutien social).
Inégaux socialement face au covid
Un manque d’activités, une augmentation du temps passé sur les réseaux sociaux et les écrans, un sentiment d’être dépassé par rapport au travail scolaire, l’infection à la Covid-19 d’un proche et l’hospitalisation suite au Covid-19 étaient également liés à la détresse. De meilleures conditions de vie, une composition familiale biparentale, un niveau de diplôme élevé des parents, un soutien social et l’exercice d’activités pendant le confinement étaient au contraire associés à un score plus élevé de résilience ».
L’enquête révèle donc le poids des inégalités sociales dans l’impact de la pandémie. « De meilleures conditions de vie étaient liées à une meilleure résilience comme le fait d’avoir été confiné dans une maison avec jardin, d’avoir accès à un balcon ou une terrasse, de ne pas vivre dans un logement sur-occupé, d’avoir une bonne situation financière, moins de difficultés alimentaires, une connexion à Internet et la capacité à s’isoler dans le logement ».
L’école aussi a sa part. « Le maintien des activités périscolaires (activités ludiques, aide aux devoirs…), des bibliothèques et ludothèques, ainsi qu’une attention accrue de l’école à ses élèves pourraient diminuer le sentiment d’isolement et éviter que les enfants et les adolescents
ne se sentent débordés par les devoirs à la maison ».
F Jarraud