Un coup de projecteur et de comm’ réussi
En Alsace, la proposition de la députée Brigitte Klinkert (EPR) du Haut-Rhin a porté ses fruits : au lendemain de son communiqué pour faire cours d’allemand deux heures à des collégiens, l’académie a trouvé un professeur pour remplacer le professeur absent depuis novembre. « Depuis des mois, les élèves de 4e bilingue du collège Molière de Colmar sont privés de cours d’allemand faute de professeur », écrit la députée Renaissance dimanche 27 avril sur les réseaux sociaux, annonçant qu’elle pourrait enseigner deux heures par semaine à la classe.
Un détail toutefois – ou pas – Brigitte Klinkert n’est pas professeure. Si sa proposition de remplacement a apporté l’éclairage politique et médiatique, force est de constater qu’une fois encore, l’expertise professionnelle des professeur.es est mise à mal, alors même que la formation est au cœur de l’actualité politique avec une réforme mise en place à la rentrée.
Cette proposition de la députée aura apporté la solution d’un remplacement attendu et pointé le problème chronique des remplacements de professeur.es. En effet, faute de vivier – asséché – de TZR, et dans un contexte de crise d’attractivité du métier, la capacité de remplacement est réduite de manière générale. Pacte ou pas pacte.
Une discipline sinistrée
La députée aura également permis de pointer la situation difficile de l’allemand, discipline véritablement sinistrée. Depuis 2022, moins d’un poste sur deux (45,5 %) de professeur d’allemand était pourvu au CAPES 2024 (42 % en 2023). Les raisons sont multifactorielles : les conditions de travail des professeur.es d’allemand se sont beaucoup dégradées depuis la réforme du collège en 2015 et la perte d’heures.
Depuis plus de 12 ans, ce sont 1400 postes non pourvus, selon le décompte de l’ADEAF (l’association pour le développement de l’enseignement de l’Allemand en France). l’association alerte : « En 10 ans, le nombre de professeurs d’allemand a diminué de près de 30% alors que dans le même temps le nombre d’enseignants de LV augmentait de 7%. En 10 ans, la proportion d’enseignants d’allemand parmi les enseignants de LV a baissé de plus de 5%. Le nombre de professeurs d’allemand diminue continuellement. L’offre d’allemand pour les élèves aussi. »
La majorité des professeur.es sont en service partagé sur plusieurs établissements, mènent de nombreux projets pédagogiques et se démènent pour maintenir des effectifs et l’enseignement de l’allemand dans leurs établissements, parfois contre vents et marées.
Dans un contexte de baisse de DHG, de baisse d’effectifs, de services partagés, la mission est devenue épuisante pour de nombreux professeur.es, isolé.es dans leur discipline. Leur mission comprend bien sûr l’enseignement de l’allemand, souvent la promotion de la langue, en lien avec le Premier degré pour assurer des effectifs suffisants au collège, puis le rayonnement de leur discipline, qui va de pair souvent avec des projets de partenariats et de mobilité en Allemagne. Toutes ces missions, les professeur.es le savent, sont certes passionnantes, mais aussi exténuantes, chronophages, souvent bénévoles faute de moyens dédiés et ce d’autant plus quand ce travail est à faire sur plusieurs établissements.
« On demande beaucoup aux professeurs d’allemand, quand ça ne marche pas, ils le prennent personnellement, cela crée de la souffrance. La gestion est administrative, même pour les compléments de service, ce n’est pas une gestion humaine », déclare Thérèse Clerc, présidente de l’ADEF, contactée par le Café pédagogique.
Une disparition lente des germanistes
Selon les chiffres du ministère de l’Éducation nationale, en 2023, sur les 23 800 postes ouverts dans le public, 3 100 postes (soit 13 %) se sont retrouvés non pourvus, dont 1 848 dans le second degré (collèges et lycées).
Le nombre de germanistes baisse, comme le souligne et alerte l’ADEAF et sans enseignement de l’allemand et sans une politique volontariste – des moyens fléchés – pour maintenir celui-ci, c’est une disparition lente des germanistes qui se construit, et pas uniquement celle des professeur.es. Cette disparition réelle se construit en dépit des textes signés et célébrés et des poignées de mains entre le chancelier allemand et le président français, les 22 janvier à l’occasion de l’anniversaire du Traité de l’Élysée.
Djéhanne Gani
Dans Le Café pédagogique
Le 22 janvier : une journée d’alerte pour l’allemand, plus que de fête
Journée Franco-Allemande 2023 : 60ème anniversaire du Traité de l’Élysée
