« L’augmentation du nombre de suicide nous alerte, nous bouleverse » déclare Claire-Marie Féret, élue du SNES-FSU Normandie. Et l’alerte de la FSU de l’académie de Normandie est aussi inédite que glaçante : une vague de suicides touche l’académie de Normandie. 9 personnels se sont suicidés dans les 7 derniers mois, sans compter 3 tentatives de suicides, selon le syndicat. Cette vague de suicides a été rendue publique vendredi 24 janvier par les organisations syndicales qui dénoncent l’inaction du rectorat et veulent soulever la chape de plomb du « #pas de vague ». L’académie de Normandie a d’ailleurs répondu au communiqué de presse du syndicat par voie de communiqué, samedi 25 janvier 2025. Elle évoque six suicides et l’ouverture de quatre enquêtes à la suite, ce que dément le syndicat.
9 suicides en 7 mois
La FSU dénonce un « pas de vagues » dans l’académie de Normandie. Elle a alerté le rectorat sur 9 suicides et avec une intersyndicale a demandé le 26 novembre 2024 une réunion d’une Formation Spécialisée Santé Sécurité Conditions de Travail extraordinaire sur les risques suicidaires. Elle attend toujours une réponse. A quelques jours du délai règlementaire des deux mois pour tenir cette réunion obligatoire sur demande, le rectorat n’avait toujours envoyé aucune convocation aux organisations syndicales. Suite à la publication du communiqué de presse publié vendredi 24 janvier, l’académie de Normandie a répondu samedi 25 janvier 2025 : « L’académie a déploré au cours de cette année scolaire le suicide de six de ses personnels », ne comptant pas trois suicides des mois de juin et juillet, dont fait part le syndicat. L’organisation syndicale précise au Café pédagogique avoir informé le rectorat des suicides dans plusieurs cas.
Des enquêtes pour faire la lumière
Le rectorat affirme avoir examiné six cas des suicides de personnels lors d’une réunion d’une formation spécialisée en santé, sécurité et conditions de travail et lancé quatre enquêtes, toujours en cours de traitement. Il explique que « cette instance peut décider d’ouvrir une enquête chaque fois qu’elle estime qu’une situation est liée à l’environnement professionnel de la victime. » Pour le syndicat, seules deux enquêtes sur les 9 suicides ont été votées, dont l’une qui avait d’abord été refusée par l’administration qui a ensuite rétro-pédalé (pour l’autre, les écrits laissés par le collègue ne laissent aucun doute quant au lien avec le travail). Le SNES-FSU regrette qu’aucune des deux n’ait néanmoins commencé.
Pas de vague de l’académie et souffrance des personnels
« La situation est grave et la FSU refuse de rester muette » explique l’organisation syndicale qui a « décidé de sortir du silence à ce propos et redemande, publiquement cette fois-ci, la réunion d’une FS SSCT extraordinaire sur la prévention des risques suicidaires ». Le rectorat propose plutôt « une réunion d’un groupe de travail sur ce sujet le 29 janvier », pour « préparer la discussion de l’instance académique qui se tiendra le 27 février ».
Avec la FSU, toute l’intersyndicale dénonce la souffrance des personnels et sa non-reconnaissance. Pour les syndicats, la réunion d’une formation sécurité extraordinaire consacrée à la prévention des risques suicidaires et une enquête permettraient « de mettre la lumière sur les circonstances, que des mesures soient prises pour empêcher et prévenir ces actes suicidaires ».
Des reproches et de l’intimidation au lieu d’accompagner
« Jamais dans l’Académie, les collègues n’ont tant fait état de leur mal-être, jamais les registres Santé et Sécurité au Travail n’ont enregistré autant de signalements et d’appels à l’aide » déclare la FSU. Elle dénonce l’attitude de l’administration qui « remplace souvent l’échange et l’accompagnement nécessaires par le reproche et l’intimidation ». Le rectorat répond « prendre toutes les mesures pour prévenir (les suicides) et assurer le bien-être de l’ensemble des agents au sein de leur environnement de travail », citant des dispositifs des mesures : présence de conseillers RH de proximité, soutien psychologique en partenariat avec la MGEN.
En sortant du silence, la FSU a lancé un pavé dans la mare : la santé des personnels de l’Éducation nationale a toujours été un angle mort et un impensé. Or, les conditions de travail, l’épuisement, l’allongement de la carrière ont des effets sur la santé. Quel autre métier n’a pas de médecine du travail ?
Djéhanne Gani