A la crise d’attractivité du métier de professeur, la seule réponse du gouvernement peut-elle être « réforme de la formation », et se passer de la question salariale ? C’est ce que semble penser la ministre de l’Éducation nationale qui devrait s’emparer de cette réforme contestée l’année dernière.
Une confiance qui se passe d’une augmentation des salaires
La ministre rend hommage à la profession, renouvelant sa confiance lors de ses prises de parole. Toutefois ces mots et l’annonce de l’annulation des 4000 suppressions de postes ne suffiront pas face aux urgences. Si la ministre a éteint le feu, le brasier reste brûlant tant l’École est au bord du précipice. La ministre avait annoncé ne pas se lancer dans une énième loi pour l’Éducation nationale, mais elle pourrait reprendre le chantier de la formation et du recrutement et ainsi souffler sur les braises.
Crise d’attractivité et réforme de la formation
Pour la ministre Borne, recruter les professeurs à la fin de la licence et les former pendant deux ans permet d’« élargir le vivier ». Jeudi 23 janvier 2025, elle a affirmé lors de la matinale de France Inter que le recours aux enseignants contractuels n’était pas un choix délibéré, mais une nécessité en cas de postes non pourvus, comme dans l’académie de Créteil. Or, fidéliser et privilégier les contractuels est devenu une stratégie dénoncée par les syndicats dans plusieurs académies.
Le SNES s’oppose à cette formule de formation. A l’écoute de cette annonce de la ministre, Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES, déclare: « il n’est toujours pas acceptable de déqualifier nos métiers avec un concours dans l’année de licence 3. Il faut effectivement revoir la formation initiale en pensant une entrée dans le métier progressive (pre-recrutement dès la licence et concours à l’issue du M2). Cela permet de répondre à la fois à la question de la précarisation des étudiants et de la démocratisation des recrutements tout en ayant un haut niveau de qualification et de maîtrise disciplinaire ». Elle poursuit et craint que la ministre retombe « dans l’écueil de précédentes réformes, menées au pas de charge, sans études d’impacts ». La secrétaire générale du SNES s’étonne que « la ministre dise vouloir ouvrir une concertation sur le sujet tout en évoquant le projet de réforme dans les cartons (recrutement à bac+3). Peut-on vraiment parler de concertation si la ministre a déjà tranché sur cette question ? »
Contrairement au SNES, le SE-UNSA accueille ces propos de manière positive. Pour la secrétaire générale Elisabeth Allain Moreno : « Le SE-Unsa attend cette réforme du recrutement et de la formation depuis des mois, le retard pris est déjà trop important au regard de l’urgence à activer ce levier d’attractivité et de meilleur accompagnement à l’entrée dans le métier. Et ce pour de mauvaises raisons : économie budgétaire et valse ministérielle ! »
Si ce projet de réforme divise les syndicats, force est de constater qu’une grande absente et constante dans les propositions pour valoriser le métier reste la non-augmentation des salaires. Et sur le nécessaire rattrapage salarial, il y a bien consensus. Peut-on valoriser le métier sans augmenter les salaires ni améliorer les conditions de travail ?
Djéhanne Gani