Les 8 000 enseignants de Mayotte feront-ils leur rentrée aujourd’hui ? Après le passage du cyclone Chido qui a dévasté Mayotte le 14 décembre, beaucoup d’écoles ont été détruites sans compter les morts de l’archipel qui seront difficiles à évaluer d’après de nombreux témoignages. Dimanche 12 janvier, à la veille de la rentrée prévue pour les personnels, la tempête Dikeledi et des pluies diluviennes ont encore détruit et inondé les écoles. La rentrée des personnels a été reportée au lundi 20 janvier.
Lundi 13 janvier, la ministre a adressé au personnel de l’académie de Mayotte un courrier annonçant que la rentrée des enseignants « ne pourra intervenir, dans le meilleur des cas, avant la semaine prochaine » pour des raisons de sécurité, soit le 20 janvier. Le ministre des Outre-Mer a évoqué une rentrée possible des élèves le 27 janvier lors d’une audition à l’Assemblée nationale.
Des chefs d’établissements épuisés et des professeurs qui craquent
Depuis le mois de décembre, des proviseurs comme des directions d’écoles sont mobilisés dans leur établissement pour constater l’ampleur des dégâts, réparer et accueillir. C’est un travail sans répit depuis des semaines à présent, et d’incertitudes.
Toutefois, avant la rentrée, difficile de savoir si les équipes d’enseignants seront présentes. De nombreuses directions sont dans la même situation que le proviseur Eric Keiser, qui sait que « des personnels ne seront pas rentrés, les conditions matérielles ne permettant pas de revenir dans l’île. Recruter, oui mais même si on recrute, on les met où ? » demande-t-il ? « Ceux qui sont restés craquent les uns après les autres et ceux qui vont rentrer vont découvrir une Mayotte défigurée et des conditions pas simples, découvrir des habitats détruits, détériorés ou cambriolés ». « On va faire avec ceux qui sont là ». Dans ces conditions, « la continuité pédagogique, pas sûr qu’elle ait du sens » se demande-t-il, « tout cela fragilise notre système éducatif qui est déjà très fragile » regrette-t-il.
Des locaux dévastés et non sécurisés
Guillaume Dupré se demandait encore à quelques jours de la rentrée des professeurs quand la rentrée pourrait avoir lieu dans son école. Pour la mairie, elle ne serait pas possible avant le mois de mars. Le directeur nous dit n’avoir que 3 classes sur 15 en état. Pour la rentrée des professeurs, il ne savait pas encore si les conditions de sécurité seront réunies pour la rentrée, si les travaux de mise hors d’eau et de sécurisation seraient terminés.
Eric Kaiser, proviseur depuis 9 ans à Mayotte prévoit pour la rentrée des professeurs « un accueil en fonction des collègues qui seront là ». Il veut « travailler sur « l’approche psychologique post traumatique » pour accueillir au mieux les élèves qui se présenteront. Il envisage un accueil en musique pour « échanger avec les élèves, arriver à se retrouver, à se dépasser », « essayer de faire quelque chose d’agréable en dépit des circonstances […], puis il va falloir qu’on les mette au travail, petit à petit » ajoute-t-il.
Une rentrée progressive pour les élèves
La ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche Elisabeth Borne avait rencontré les organisations syndicales jeudi 9 janvier pour faire un point sur la situation à Mayotte. Elle avait salué la mobilisation des personnels pour préparer en urgence l’accueil de la population. La ministre évoquait alors une rentrée progressive pour les élèves à Mayotte. Elle rappelait l’importance d’une reprise rapide pour les élèves, qui ont « plus que jamais besoin de l’École, tout en garantissant les conditions de sécurité indispensables. La reprise sera progressive et tiendra compte des réalités locales et des capacités d’accueil de chaque école et de chaque établissement. »
Les écoles sont détruites. Nul ne sait aujourd’hui où les cours seront dispensés et combien manqueront à l’appel, côté enseignants, mais aussi côté élèves.
Djéhanne Gani