Comment travailler la langue et évoquer la sédentarité ou encore les addictions aux écrans ? Nathalie Salines, professeure agrégée d’espagnol au lycée Victor Duruy de Mont-de-Marsan engage ses élèves dans un projet européen « mens sana et corpora sano ». L’idée est de « concevoir un guide sur les habitudes saines, tant sur le plan physique que mental ».
Pouvez-vous présenter votre projet ?
C’est un projet dont je suis cofondatrice. La collègue espagnole avec laquelle j’ai créé ce projet est professeure de biologie et m’a été présentée par la collègue avec laquelle j’ai initié les projets eTwinning. Ce projet n’est pas adossé à l’accréditation Erasmus.
Il s’agit d’un projet visant à créer un guide sur les habitudes saines, tant sur le plan physique que mental. L’objectif est qu’il s’agisse d’un outil créé par les élèves et qu’il puisse être utilisé pour aider d’autres élèves. L’augmentation des problèmes de santé mentale dans les écoles, ainsi qu’une utilisation incorrecte ou excessive des écrans et une augmentation des modes de vie sédentaires et des mauvaises habitudes alimentaires chez les adolescents ont motivé ce projet.
J’ai mené ce projet avec les élèves de Première suivant l’enseignement de spécialité LLCE espagnol ainsi que des classes de Seconde générale. L’infirmière du lycée s’est impliquée dans le projet. Deux de nos établissements partenaires (Boadilla del Monte et Rome) participaient au projet, ce qui a facilité également les échanges. Nous avons réalisé une activité pour réaliser un livre de recettes internationales équilibrées à l’occasion de la venue des élèves espagnols à Mont de Marsan. Les élèves espagnols qui n’apprennent pas le français ont réalisé cette activité en anglais.
Les projets eTwinning représentent de réelles opportunités d’échanges en langue cible, de partage d’expériences, de situations pédagogiques innovantes. Cela représente une véritable plus-value dans l’enseignement des langues.
Comment réagissent les élèves français et espagnols avec le sujet de la santé mentale?
Cette idée de projet vient de ma collègue espagnole, professeure de biologie. Le constat de base est l’augmentation des problèmes de santé mentale au sein des établissements scolaires espagnols, français et italiens, ainsi qu’un usage excessif voire nocif des écrans et une augmentation de la sédentarité et des mauvais comportements alimentaires chez les adolescents. Depuis la crise du Covid, la question de la santé mentale s’est posée en Espagne, avec un confinement beaucoup plus strict et long qu’en France. Les élèves se sont montrés intéressés par le sujet. Cela ne les a pas déroutés du tout.
Ils ont par exemple réalisé des campagnes de sensibilisation aux addictions, travaillé sur une roue des émotions, réalisé un livre de recettes saines et cela leur a permis de développer et partager un questionnement avec les élèves européens.
Quel a été le rôle de l’infirmière dans ce projet?
L’infirmière est intervenue en classe pour présenter le dispositif au lycée de point écoute adolescent. Il n’y a pas d’infirmière dans l’école espagnole. Elle a également été sollicitée lors de la réalisation du livre numérique de recettes saines. Nous avons réussi à l’inscrire sur eTwinning et elle a pu découvrir la plateforme. Par ailleurs, chaque élève de Première du lycée assiste à une intervention sur les conduites addictives réalisée par une association, l’association Apica, qui a pu être mis en résonance avec ce projet.
Quel rôle jouent les outils numériques dans votre projet européen ?
Les outils numériques permettent d’échanger et de faire des jeux. Par exemple, nous avons créé un Kahoot sur les addictions et les pratiques alimentaires saines, et les élèves français ont pu jouer simultanément avec une classe en Espagne. Les gagnants du jeu ont été applaudis chaleureusement par tous les élèves. Nous avons terminé cette visio par un échange entre élèves. C’est très positif, les élèves apprécient beaucoup ces échanges même s’ils ont un peu peur au début. Ce qui marche très bien également, ce sont des visios par petits groupes : entre 2 et 4 élèves français s’entretiennent avec 2 à 4 élèves européens ( espagnol, italien, allemand..) sur un thème préparé à l’avance.
Par exemple, lors de la journée des droits des femmes, ils devaient faire des recherches sur les avancées importantes pour les femmes françaises (droit de vote, avortement, divorce…) et ils devaient transmettre ces informations aux élèves italiens, qui eux devaient leur donner en retour les informations concernant les femmes italiennes. Ils ont également dû lors d’une autre visio choisir une affiche de sensibilisation contre l’homophobie parmi une série proposée par les professeurs et la présenter à leur correspondant en justifiant leur choix. La réalisation de visioconférence, la création de jeux qui ont été ensuite joués ensemble en ligne (kahoot) ont été des éléments extrêmement positifs. Les élèves ont acquis de nouvelles connaissances en travaillant de manière plus motivante et sont devenus plus compétents sur le plan numérique.
Quel bilan tirez-vous de ce projet?
C’est une organisation importante : de la constitution des groupes avec la collègue de l’école partenaire, la préparation de l’activité, jusqu’à la préparation de l’échange ( les élèves préparent les questions, les informations…). Mais c’est vraiment très enrichissant pour les élèves et c’est bien là l’essentiel.
Propos recueillis par Djéhanne Gani