Comment favoriser la conscience d’une responsabilité partagée de l’environnement ? En Meurthe-et-Moselle, au collège Vincent Van Gogh de Blénod-lès-Pont-à-Mousson, un projet eTwinning de Laurence Langlois, professeure d’anglais, éduque en ce sens à la citoyenneté. « Let’s take SDGs actions » (Mettons en place des actions en faveur des Objectifs de Développement Durable) a été déployé par des 3èmes en partenariat avec 25 élèves d’un établissement en Turquie et 32 élèves d’un établissement en Espagne. Le travail a débouché en particulier sur la création de podcasts, la découverte du concept de gastronomie durable, un « clean-up day »…. Bilan : « Le fait de lier l’enseignement de l’anglais à des tâches concrètes, collaboratives et engagées génère un réel investissement des élèves. Ces derniers ont apprécié le travail en équipe avec des élèves, qui comme eux apprennent l’anglais. Les actions solidaires réalisées dans le cadre du projet ont impliqué toute la communauté éducative. »
Beaucoup de projets eTwinning de ces dernières années traitent du développement durable. Cette thématique, et plus largement celle du changement climatique et ses conséquences environnementales, a notamment été impulsée en 2020 par l’Union européenne. Pourquoi avez-vous retenu cette thématique pour ce projet ?
Notre collège est engagé depuis de nombreuses années dans une dynamique autour des objectifs de développement durable. Dès 2013, l’éco-radio, une webradio 100% développement durable a vu le jour dans le cadre d’une démarche éco école. En 2015, notre collège a intégré le réseau des écoles associées de l’UNESCO et depuis, tous les projets de notre établissement gravitent autour de l’agenda 2030 en abordant des sujets civiques, sociaux et environnementaux. Je mène donc des projets eTwinning depuis plusieurs années en lien avec les ODD pour sensibiliser les élèves et les engager dans cette dynamique. J’ai souhaité également allier ce projet à l’utilisation de notre webradio pour sensibiliser les élèves à l’éducation aux médias et à l’information.
Comment avez-vous rencontré et travaillé avec vos partenaires espagnols et turcs ?
J’avais déjà eu l’opportunité de travailler avec ma collègue turque sur 2 projets eTwinning, l’un sur la diversité culturelle en Europe et l’autre sur la lutte contre les stéréotypes genrés dans le monde du travail. Quant à ma collègue espagnole, elle m’a été recommandée par une collègue ambassadrice de l’établissement IES Blecua de Saragosse avec laquelle je travaille régulièrement.
Un projet eTwinning, c’est avant tout de la « collaboration » entre enseignant·es et entre élèves. Alors c’est quoi exactement la « collaboration » dans votre projet eTwinning ?
La collaboration commence déjà lors de la phase de conception du projet entre enseignants. On part d’une idée que l’on développe en trouvant des activités qui vont être engageantes pour nos élèves et qui rentrent également dans nos programmes respectifs. Nous nous interrogeons sur nos pratiques de classe et nos postures en tant qu’enseignants pour aider au mieux nos élèves à travailler ensemble. Comme nous sommes à distance et que nous travaillons essentiellement de façon asynchrone (n’ayant pas les élèves sur des créneaux horaires communs), nous devons trouver des tâches qui permettent aux élèves d’échanger et de construire du contenu ensemble tout en apportant un aspect aussi ludique dans les tâches à réaliser.
A ce sujet, quelle(s) activité(s) avez-vous mis en place dans ce projet pour favoriser la collaboration au sein des membres enseignants et élèves du projet ?
Au cours de ce projet, en équipes transnationales, les élèves ont rédigé de manière collaborative des podcasts (interviews, discours, poèmes, reportages) sur les ODD et certaines journées internationales sur le droit des femmes, la gastronomie durable et contre la discrimination raciale. Ils se sont ensuite partagé les enregistrements qui ont été publiés sur le TwinSpace du projet mais aussi sur la radio scolaire SDGs de notre collège. Ils ont co-construit des exercices et quizzes interactifs sur les thématiques travaillées et ils se sont défiés sur ces activités créées. Mais ils ont également imaginé ensemble et réalisé des actions solidaires concrètes qu’ils ont mises en œuvre dans leurs établissements telles que des collectes pour des associations ou des journées de nettoyage.
L’ONU a identifié 17 objectifs de développement durable. Comment ces objectifs ont-ils été retenus ? Comment ont-ils été concrètement exploités dans les activités ?
Dans un premier temps, ils ont approfondi leurs connaissances sur les 17 ODD et ont ensuite choisi l’ODD pour lequel ils étaient davantage prêts à s’engager. Cette activité a permis de former les équipes transnationales car nous avons réuni les élèves ayant fait le même choix. Dans un second temps, nous avons davantage travaillé sur les ODD en lien avec journées internationales. Pour la journée internationale de la solidarité humaine qui a abouti à des actions solidaires concrètes citées précédemment, nous avons surtout ciblé l’ODD 17 (partenariat pour la réalisation des objectifs) mais cette activité a abordé l’ODD 1 (pas de pauvreté), ODD 2 (Faim « zéro »), ODD 10 (inégalités réduites) et ODD 12 (Consommation et production responsables) avec les collectes pour les associations et l’ODD 15 (vie terrestre) pour le Clean Up Day. L’ODD 5 (égalité entre les sexes) a été mis en valeur lors de l’invention de poèmes collaboratifs sur des femmes ayant lutté pour leurs droits dans le cadre de la journée des droits des femmes. La création de discours sur des militants qui se sont battus contre la discrimination raciale pour la journée internationale pour l’élimination de la discrimination raciale a mis en valeur l’ODD 10 (inégalités réduites). Et enfin, l’élaboration d’un menu multiculturel sain et responsable pour la journée de la gastronomie durable a davantage touché les ODD 12 (consommation responsable) et l’ODD 3 (santé et bien-être).
Quel impact ce projet a-t-il eu sur les élèves, les enseignants, mais plus largement la communauté éducative de votre établissement ?
Le fait de lier l’enseignement de l’anglais à des tâches concrètes, collaboratives et engagées génère un réel investissement des élèves. Ces derniers ont apprécié le travail en équipe avec des élèves, qui comme eux, apprennent l’anglais. Les actions solidaires réalisées dans le cadre du projet ont impliqué toute la communauté éducative et la diffusion de podcasts via le TwinSpace et la webradio scolaire a permis d’informer et de valoriser le travail des élèves auprès des autres élèves, des enseignants mais aussi des familles.
Vous êtes une ambassadrice eTwinning chevronnée depuis plusieurs années. Vous menez des projets eTwinning depuis de nombreuses années. Quelle est la réelle plus-value d’un projet eTwinning, selon vous ? Pour vous en tant qu’enseignante, mais aussi pour les élèves ?
Comme je l’ai dit précédemment, le fait de travailler avec des partenaires étrangers sur un projet fédère les élèves et les motive davantage en donnant du sens à l’apprentissage. Ils apprennent à travailler de manière collaborative dans le respect des idées des uns et des autres mais également de façon plus autonome et responsable. Les projets eTwinning permettent de développer l’ouverture culturelle des élèves qui, un jour j’espère, seront curieux de découvrir le monde en réalisant des mobilités non plus virtuelles mais bien réelles. En tant qu’enseignante, les projets eTwinning m’offrent la possibilité de travailler avec des collègues de toute l’Europe, nous partageons nos pratiques et les faisons évoluer.
Certains enseignants hésitent à se lancer dans eTwinning. Qu’avez-vous à dire à ces enseignants pour les inciter à mener un projet eTwinning, et aussi pour les rassurer ?
Je les encourage vivement à se lancer dans l’aventure. Bien sûr, il faut commencer avec un projet modeste ou se greffer à un projet existant. Il est possible de mettre en place des projets simples sur une très courte durée mais il existe aussi des kits de projets que les enseignants peuvent réutiliser et adapter. Il n’est pas nécessaire de tout réinventer et il faut bien comprendre qu’un projet fait partie intégrante des cours. Un projet eTwinning rentre dans le programme scolaire et permet de travailler toutes les activités langagières avec des objectifs culturels, linguistiques et ce, en classe entière.
Avez-vous d’autres idées de projets eTwinning en tête pour les mois ou années à venir ?
Je suis actuellement en train de mener 2 projets avec une classe de 3e et une autre de 5e. L’un porte sur la thématique des jeux olympiques toujours en lien avec les objectifs de développement durable et l’autre sur la gestion des émotions en lien avec la thématique du bien-être et donc de l’ODD 3. Mon principal challenge est de mener ces 2 projets avec des classes très chargées jusqu’à 30 élèves. J’aide également 12 enseignants de notre académie à mener un premier projet avec 12 enseignants partenaires, également sur la thématique des jeux olympiques. Il s’agit d’un projet tutoré à l’initiative des inspecteurs.
Propos recueillis par Anthony Riou et Jean-Michel Le Baut
L’espace numérique de travail du projet
Les podcasts sur la radio scolaire « SDGs radio »
Les 17 Sustained Development Goals (ODD) sur le site des Nations-Unies