Dans le livre « École et politique : jusqu’où ? » paru aux éditions Vérone, Daniel Subervielle, Christian Lajus Et Patrick Wargnier font une analyse sans concession du système scolaire français. Stop’n go (changement de politique en fonction du ministre), pratiques d’évaluation, mixité sociale et scolaire et formation, les trois inspecteurs se positionnement. Selon eux, le mammouth a besoin « d’une véritable décentralisation et non d’une simple déconcentration, accompagnée d’une autonomie renforcée des unités d’enseignement. Cette dernière serait assortie d’une responsabilisation accrue des acteurs quant à l’efficacité des choix, des décisions et des stratégies collectivement assumées ». Leurs positions, loin de faire l’unanimité, ont le mérite de contribuer au débat. Ils répondent aux questions du Café pédagogique.
Vous évoquez le temps de l’éphémère pour évoquer les politiques publiques en matière d’éducation. Qu’entendez-vous par là ?
Les politiques éducatives se caractérisent depuis des décennies par des changements très fréquents qui nuisent considérablement à leurs effets attendus. Cette situation est indéniablement liée à la « durée de vie » de nos ministres successifs et de leurs conseillers du moment. Comme nous le démontrons dans notre essai, pas moins de 23 ministres se sont succédé rue de Grenelle de 1975 à ce jour, soit une durée moyenne de 2 ans et 2 mois. Certes, nous enregistrons des records de longévité – François Bayrou Et Jean-Michel Blanquer, mais nous avons aussi connu des « météorites » – Benoit Hamon Et Amélie Oudéa-Castéra. D’une manière générale, c’est donc de bien d’éphémère que nous pouvons qualifier chacune des politiques publiques en matière d’éducation, qu’il devient quasiment impossible de mettre en œuvre significativement sur le terrain et a fortiori d’en évaluer la pertinence et l’efficacité.
Non seulement cette alternance s’avère préjudiciable au temps que requièrent des politiques publiques en matière d’apprentissage mais elle se caractérise la plupart du temps par des mesures et des stratégies radicalement opposées aux précédentes. Certes quelques rares exceptions confirment la règle. On se rappelle par exemple que François Bayrou a poursuivi la politique des cycles initiée par Lionel Jospin.
Comment, dans ces conditions, s’engager sereinement et durablement ? A titre de comparaison, la dernière réforme des programmes et des méthodes d’apprentissage des mathématiques au Québec remonte à plus de deux décennies bien que de nombreux ministres se soient succédé durant cette période. Cette stabilité n’est probablement pas étrangère aux résultats positifs que les jeunes québécois ont enregistrés lors des dernières évaluations PISA. La formation des enseignants rendue plus performante en ce domaine sur le long terme grâce à cette stabilité en est sans doute un autre facteur explicatif.
En qualité de cadres pédagogiques, très respectueux de notre devoir de loyauté, nous avons eu maintes fois l’occasion de nous rendre compte des effets délétères de ces changements successifs. Nous avons même réussi à promouvoir tout et son contraire. Autant dire que notre crédibilité sur le terrain s’en trouvait sérieusement altérée !
Seule une mesure a échappé à cette valse car elle relève d’une décision supranationale. En effet, le socle de compétences qui, par définition, renvoie à des connaissances, des capacités et des attitudes, résulte d’une décision européenne des plus consensuelles. Certains de nos ministres ont bien essayé de la contourner, de la travestir, de lui donner une dimension franco-française, mais le principe et la finalité demeurent par-delà leurs tentatives.
Dans notre livre, nous évoquons des moyens de trouver une parade à l’éphémère visant à encadrer le pouvoir décisionnel de la rue de Grenelle.
Votre livre s’attarde sur l’évaluation. Quelle analyse faites-vous des dernières politiques en la matière ?
Les évaluations des politiques publiques ont vocation à permettre aux instances gouvernantes de mesurer la pertinence, la cohérence, l’efficacité et l’efficience des choix opérés afin de pouvoir les réguler, mais aussi à en rendre compte devant la nation tout entière.
Depuis les années 1970, un long cheminement a été engagé jusqu’à la mise en place de la LOLF qui a institutionnalisé de nouvelles pratiques fondées sur des processus plus démocratiques incluant le contrôle parlementaire.
Malgré tout, au sein du ministère de l’Éducation nationale, l’évaluation de l’action publique demeure toujours pilotée d’en haut. De plus, les acteurs y sont nombreux et en concurrence : IGÉSR, DGESCO, DEPP, Haut conseil de l’évaluation, CNESCO, Conseil de l’évaluation de l’école, …
Dans un rapport de décembre 2017, la Cour des comptes recommande « d’instaurer des relations de collaboration et de confiance entre une instance d’évaluation et le ministère à travers des mécanismes concrets qui garantissent son indépendance matérielle et fonctionnelle, sa capacité d’expression autonome, sans en faire une autorité ressentie comme étrangère aux services de l’Éducation nationale… ». Elle répond ainsi à des questions que l’on ne peut plus éluder : l’évaluation de l’École doit-elle être réalisée par le ministre de l’Éducation nationale ou un organisme indépendant ? Doit-elle être au service des élèves, des parents et des enseignants ou doit-elle simplement répondre aux commandes d’un cabinet ministériel ?
Nous proposons dans notre ouvrage la création d’une « Haute autorité de l’Éducation » indépendante du ministère, garante des grandes orientations de la politique éducative, du contrôle de leur mise en œuvre et de l’évaluation des effets attendus.
D’autre part, la question de l’évaluation des établissements revient régulièrement dans les débats des cercles « spécialisés » de l’Éducation nationale. Très tardivement inscrite dans la tradition française, contrairement à ce qui se fait dans d’autres pays depuis longtemps, ce n’est qu’à la rentrée 2019, après une dizaine d’années d’expérimentation et de tâtonnements, qu’elle a fait l’objet d’un cadrage plus précis et planifié. Par la suite a été créé le Conseil d’évaluation de l’école avec des objectifs clairement affichés et des modalités reposant sur une phase préalable d’auto-évaluation de l’unité d’enseignement retenue, croisée avec une évaluation externe menée par des personnels de l’encadrement pédagogique. L’analyse des résultats de ces évaluations fait l’objet d’un rapport annuel au niveau national. Ce dernier, en lien avec le programme de travail établi par le Conseil, témoigne effectivement d’une avancée notoire. Demeurent toutefois des questions soulevées dans notre ouvrage : le rythme affiché d’une évaluation tous les cinq ans pour chaque établissement privé, public, du premier et du second degré pourra-t-il raisonnablement être tenu ? Comment réduire les disparités entre les académies ? Quid de la formation des évaluateurs externes, des personnels de direction, notamment sur l’auto-évaluation? Quel suivi, quelle incidence sur la gestion de ressources humaines, sur le pilotage de ces établissements? Sur ces différents points, nos préconisations s’inscrivent nettement dans une logique d’évaluation longitudinale, clairement décentralisée, responsabilisant davantage les personnels et renforçant l’autonomie de ces établissements.
Et celle des personnels ?
S’agissant de l’évaluation des personnels d’enseignement, d’éducation et d’encadrement, les corps d’inspection et, dans une moindre mesure, les chefs d’établissement ont dans leurs missions la responsabilité de cette évaluation. Historiquement distinctes entre les deux degrés d’enseignement, souvent jugées très subjectives, et peu ou pas harmonisées quant à leurs conceptions et leurs pratiques, les inspections individuelles ont laissé place au PPCR depuis 2017. Cette évolution constitue à la fois une rupture d’envergure et un progrès indéniable à plus d’un titre. Plusieurs points permettent d’ores et déjà de penser que ce nouveau dispositif présente quelques avantages. Il propose en effet une méthodologie harmonisée au plan national avec trois rendez-vous de carrière, des référentiels de compétences clairement énoncés pour chaque corps dépassant largement les clivages inter-degrés et une incitation à une démarche réflexive et participative.
Tout semble indiquer que ces critères objectivés et harmonisés favoriseront le développement professionnel des enseignants, la rupture la plus marquée étant sans aucun doute la disparition de la note dont l’infantilisation et la grande subjectivité – tout comme pour les élèves – a historiquement marqué jusque-là le processus évaluatif des personnels.
Et pour les élèves ?
Quant à l’évaluation des élèves, source de multiples controverses, notamment au moment de la diffusion très médiatisée des résultats de PISA, celle de leurs performances renvoie à des enjeux d’apprentissage certes, mais également sociétaux. Elle impacte tout autant le quotidien de la classe que l’avenir de la société que l’école contribue à façonner. Elle constitue indiscutablement un indicateur de pertinence et de performance des politiques éducatives et, a fortiori, de celles et ceux qui les portent. C’est donc une problématique très exposée aux alternances politiques et plus encore aux influences idéologiques qui en orientent le sens et les enjeux. L’organisation de la scolarité en cycles d’apprentissage pluriannuels puis la mise en œuvre du socle commun de compétences et plus récemment celle du livret scolaire unique numérique pour toute la scolarité obligatoire, sont autant d’étapes notoires. Au quotidien dans les classes, elles structurent les pratiques d’enseignement et objectivent les attendus. Cela exige de reconnaître les différences inter-individuelles entre les élèves et la singularité de leur rythme d’apprentissage afin de les conduire à une maîtrise progressive de leurs compétences pour l’obtention d’une certification et/ou la délivrance d’un diplôme.
Depuis le ministère Ndiaye et les dernières polémiques autour d’Amélie Oudéa-Castéra, la question de la mixité sociale est centrale. Vous évoquez une bombe à retardement, c’est-à-dire ?
Au regard du tableau qu’elle présente, avec ses performances insuffisantes et ses problématiques d’inégalités sans solution évidente, l’école française est aujourd’hui à la peine. Elle manque cruellement d’efficacité mais aussi d’équité. Comme l’indiquent d’innombrables données issues de la recherche, elle reste élitiste et inégalitaire sur fond de ségrégation sociale et scolaire.
Cette réalité française est de nature à créer un sentiment d’injustice possiblement générateur de ressentiment, voire de révolte. Peut ainsi survenir le risque d’une rupture définitive avec notre république, responsable dans ce cas de ne pas avoir tenu ses promesses historiques. Une telle fracture peut dès lors prendre des formes violentes comme en témoignent les émeutes de l’automne 2005 et – surtout – celles de l’été 2023 au cours desquelles les dégradations subies par de nombreux établissements scolaires ont fait office de révélateur. Si rien n’est fait pour y remédier, il y a tout lieu de penser que de tels événements pourraient se reproduire et s’amplifier.
N’en doutons pas : relever un tel défi se présente comme une tâche immense. Il faudra d’abord convaincre tous les partisans d’un entre-soi échappatoire que la règle commune de la république qui prône le vivre ensemble est infiniment préférable à la juxtaposition à caractère communautariste de populations installées dans un côté à côte pouvant parfois se muer en face à face.
Les chercheurs en sociologie de l’éducation qui ont étudié ces phénomènes de mixité et leurs effets sur la réussite des élèves ont mis en exergue la notion de ségrégation scolaire en tant que conséquence de la ségrégation résidentielle et/ou des choix des familles, mais également comme la résultante de choix internes aux établissements.
En référence à toutes ces connaissances aujourd’hui établies, nous examinons dans notre ouvrage la nature des résistances et préconisons, entre autres, d’agir sur le paramètre résidentiel de la ségrégation, de reconsidérer la sectorisation des établissements en y intégrant l’enseignement privé sous contrat ou encore de sortir progressivement des politiques de zonage prioritaire.
Sur ce thème central, l’actualité politique récente a été marquée par une succession de ministres qui, bien qu’appartenant au même courant politique, ont illustré de façon radicalement différente leur approche de cette question. Ainsi, Pap Ndiaye a courageusement repris le flambeau porté par Najat Vallaud-Belkacem entre 2015 et 2017. Amélie Oudéa-Castéra a, quant à elle, clairement affiché une position qui traduisait bien plus qu’une indifférence pour cette problématique… Entre les deux, Gabriel Attal n’a abordé cette question que sous un angle donnant à penser que les solutions efficaces passeraient par une répartition des élèves à l’aune de leur niveau scolaire, avec tous les risques de dérives que cette approche peut entraîner. Son annonce relative à une possible évolution de la loi SRU va très certainement à l’encontre du souhaitable.
Mais en tout état de cause, nous sommes persuadés qu’une solide formation pédagogique devrait permettre de créer les contextes les plus favorables possibles à tous les élèves. La mixité doit donc être un fil conducteur essentiel de la mise en forme et du fonctionnement d’environnements adaptés aux communautés apprenantes.
A ce titre, le vrai courage politique en la matière consisterait à dépasser les idéologies conformistes et à renoncer à trouver dans les recettes d’hier les solutions pour demain.
Des annonces sont attendues dans les prochaines semaines sur la formation des enseignants et enseignantes. Que préconisez-vous pour votre part ?
Sortir de l’impasse actuelle demanderait sans aucun doute de revoir les modalités de conception et d’organisation de la formation ainsi que la définition des priorités, à tous les niveaux d’enseignement, y compris pour l’encadrement intermédiaire et supérieur.
L’une des dernières orientations concernant la création d’« écoles académiques de la formation continue » peut effectivement permettre à chacun de participer à la construction de son parcours de formation. Mais pourquoi avoir créé une structure supplémentaire et l’avoir rattachée au rectorat ? Pourquoi dissocier formation initiale, statutaire et continue dans des pôles différents ? Pourquoi dissocier métiers de l’enseignement et métiers de l’encadrement ?
Nous proposons d’être bien plus audacieux, d’aller plus loin, de fondre dans une même entité ces différents pôles de formation en créant des « centres académiques de formation et développement professionnels des métiers de l’Éducation » intégrant une entité de type « école d’ingénieurs ». Y serait dispensée, dès la sortie du lycée, une formation initiale de cinq années permettant la délivrance d’une qualification de niveau master reconnue à l’échelle européenne.
Ainsi serait proposée une réponse unique, porteuse d’une plus grande cohérence, qui permettrait de générer de nombreuses expérimentations, un croisement des analyses de pratiques et l’émergence ou la promotion d’innovations, avec l’appui du CNED, de Canope et de l’université. De la classe au pilotage d’un établissement ou d’un territoire, chacun trouverait là matière à forger le socle de compétences nécessaire à l’exercice de son métier, à réaliser pleinement ses transitions professionnelles. De plus, dès lors que l’objectif de formation s’inscrit dans une optique collective et collaborative, nous considérons que la démarche d’impulsion et de supervision revient au personnel de direction lui-même, au regard des besoins préalablement identifiés ou exprimés. Répondant aux objectifs contractualisés dans le cadre du projet d’établissement, les actions de formation des corps professoraux doivent alors être envisagées de telle sorte que chacun puisse contribuer à la plus-value collective attendue. La conception et l’accompagnement de tels dispositifs de formation, en présentiel comme à distance, au sein même de l’établissement et de son réseau d’écoles, pourraient ainsi être dévolus à des adjoints pédagogiques du chef d’établissement. Ces derniers auraient alors toute latitude pour faire appel si nécessaire à des experts – inspecteurs, conseillers pédagogiques et/ou chercheurs – en favorisant si possible l’ouverture vers d’autres organisations.
Une question traverse notre institution depuis de nombreuses années : « La formation doit-elle impérativement se dérouler sur le temps réglementaire consacré aux enseignements en présence des élèves ? ». Si oui, alors, cette solution mobilise de facto des moyens de remplacement conséquents dans le premier degré tandis qu’au sein des collèges et lycées les professeurs sont libérés de leurs heures d’enseignement qu’ils récupèrent ou pas. De plus, notre système éducatif peut-il encore longtemps tolérer ces différences de fonctionnement entre le premier et le second degré ? Elles constituent en effet un réel obstacle à la conception et à la mise en œuvre de formations inter-degrés. Une première perspective pourrait donc consister à reconsidérer ces principes en accompagnant cette évolution des efforts indispensables à réaliser dans le domaine de la rémunération comme nous le recommandons dans notre ouvrage. La deuxième orientation viserait à revoir l’organisation des remplacements, en la rationnalisant au sein de chaque établissement ou territoire, en planifiant les actions de formation de manière plus souple et plus localisée.
Dans l’attente qu’elle soit tranchée, si elle l’est un jour, la question divise et c’est aujourd’hui un sujet récurrent de contestation maintes fois évoqué par les représentants des personnels lors des réunions des conseils académiques de formation.
Certains évoquent un mammouth lorsqu’ils parlent du MEN, vous allez jusqu’à titrer un chapitre : Les résistances en question : un réflexe pavlovien. Est-ce le principal problème de l’Éducation nationale ?
Sans remonter au pléistocène, notre système éducatif s’est fossilisé à bien des égards. Les fréquents changements que nous avons connus auraient pu constituer un vecteur de transformation en profondeur tant du point de vue de son organisation que de son fonctionnement. C’est plutôt le règne de la « réformette » qui a prévalu jusque-là et les quelques projets très innovants et réformateurs qui ont pu voir le jour ces dernières années ont été assez rapidement soit dépouillés de leur substance, soit mis sous le tapis. Les causes en sont multiples mais les résistances au changement sont, sans aucun doute, l’un des facteurs explicatifs. Elles s’expriment en effet comme un réflexe pavlovien de la part de certains groupes d’influence. Qu’il s’agisse de lobbies qui gravitent autour des décideurs politiques de toutes tendances, d’organisations syndicales – notamment les moins progressistes d’entre elles, d’élus locaux ou encore de fédérations de parents d’élèves, le rejet s’exprime de façon récurrente et plus ou moins insidieuse.
Ainsi notre institution vit collectivement sous l’emprise d’un terrible paradoxe qui fait que la plupart de ses acteurs et usagers pensent qu’elle va mal, mais bien peu estiment qu’elle nécessite des transformations profondes auxquelles pourtant ils s’opposent quand elles sont proposées !
Serait-ce la volonté de maintien des acquis quoi qu’il en coûte ? Serait-ce tout simplement la nostalgie d’un temps révolu ? Serait-ce la fréquence des changements qui décourage toute adhésion aux projets ? La massification de la scolarité ne s’est pas accompagnée de sa démocratisation car on continue majoritairement à croire et à agir comme si l’égalité prévalait sur l’équité et comme si l’efficacité recherchée pouvait se satisfaire de mesures unilatérales et verticales.
La diversification, la différenciation, la reconnaissance de la singularité des élèves, des personnels, des établissements, des territoires constituent un levier majeur pour l’amélioration de ce système dépassé à bien des égards. La politique du « coup par coup » a ses limites tout comme celle de l’ultra centralisation des politiques éducatives. L’extrême hétérogénéité des situations ne peut plus se satisfaire d’une gouvernance jacobine. Il faut oser faire confiance aux acteurs de terrain qui, mieux que personne, ont une connaissance fine des besoins et des potentialités des territoires sur lesquels ils exercent. Si la métaphore du mammouth persiste, c’est bien que la glaciation de nos instances dirigeantes constitue le point de tension de toute révolution copernicienne qui pourrait conduire à un transfert massif des compétences en direction des instances régionales. Il s’agirait alors d’une véritable décentralisation et non d’une simple déconcentration, accompagnée d’une autonomie renforcée des unités d’enseignement. Cette dernière serait assortie d’une responsabilisation accrue des acteurs quant à l’efficacité des choix, des décisions et des stratégies collectivement assumées.
C’est de fait une résistance à la volonté et au courage de changer d’ère dont il est question. Les nombreux défis qui nous attendent, notamment ceux générés aujourd’hui par l’intelligence artificielle dans le champ éducatif, nous y contraindront tôt au tard …
Nos propositions qui constituent le dernier chapitre de notre ouvrage ont l’ambition de réconcilier l’école avec une action politique conçue sur de nouvelles bases, quitte à ériger parfois l’utopie en mode de pensée.
Propos recueillis par Lilia Ben Hamouda
« École et Politique : jusqu’où ? ». Préface d’Alain Boissinot aux éditions Vérone