« Elle ne s’est pas engagée ». Après deux journées de grève et aussi deux votes unanimes du Conseil supérieur de l’Education contre les projets phares du gouvernement, sur le collège et le lycée professionnel, la nouvelle ministre Nicole Belloubet reçoit les syndicats cette semaine. Selon la Fsu, reçue le 12 février, la ministre écoute mais ne s’engage pas, notamment sur les groupes de niveau. Elle rendra ses arbitrages sous quinzaine.
Sur le collège
« Elle est là pour tenter de renouer le dialogue avec la communauté éducative. Mais les paroles ne suffiront pas« , nous dit Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes fsu, à la sortie de l’audience avec Nicole Belloubet le 12 février.
Sur le collège, les textes sur les nouveaux horaires du collège instituant les groupes de niveau ont été présentés au Conseil supérieur de l’éducation (CSE) du 8 février (67 voix contre, 1 abstention, 0 pour).
Ils avaient évolué sous Amélie Oudéa-Castéra. Le 5 février une première version de l’arrêté disait : » Art. 4-1 – Les enseignements communs de français et de mathématiques sont organisés en groupes de niveaux pour l’ensemble des classes et des niveaux du collège. Les groupes sont constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs et leur composition peut évoluer au cours de l’année scolaire afin de tenir compte de la progression et des besoins des élèves. Les groupes des élèves les plus en difficulté bénéficient d’effectifs réduits« .
Une nouvelle version a été envoyée aux syndicats la veille de la réunion du CSE. Elle disait : » Art. 4-1 – Les enseignements communs de français et de mathématiques, sur tout l’horaire, sont organisés en groupes pour l’ensemble des classes et des niveaux du collège. Les groupes sont constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs. Leur composition est réexaminée au cours de l’année scolaire afin de tenir compte de la progression et des besoins des élèves. Les groupes des élèves les plus en difficulté bénéficient d’effectifs réduits« .
Certains y ont vu le retrait des groupes de niveau. Mais l’annexe de l’arrêté portant la grille horaire du collège précise que » Ces enseignements sont organisés en groupes de niveaux, constitués en fonction des besoins des élèves identifiés par les professeurs sur la totalité du volume horaire. » Les groupes de niveau sont donc toujours là. Leur composition « est réexaminée » (au lieu de « peut évoluer »). L’effectif des groupes n’est pas défini. Et le ministère a tenu à préciser que les groupes concernent » la totalité du volume horaire » en maths et français, au cas où certains établissements auraient réduit leur existence à un temps limité… Le Snes Fsu parle de « maquillage » et de « manipulation« .
La réforme envisagée pose de façon urgente la question des moyens. Car, pour alimenter les groupes de niveau, il faudrait environ 7700 postes. Le ministère envisage, à coup d’expédients budgétaires, moins de 2500 postes. La Fsu relève que pour constituer les groupes de niveau on est en train de démanteler des dispositifs qui servent justement à gérer l’hétérogénéité.
Le 12 février, la ministre a répété ce qu’elle a dit lors de son discours d’installation. Elle ne veut pas d’une école du tri social. « Elle a pris garde à ne pas utiliser l’expression groupe de niveau« , nous dit S. Vénétitay, pour qui « la publication de texte rejetés par la profession serait une provocation« . Mais le seul engagement de la ministre c’est qu’elle décidera sous quinzaine. Il n’est pas question, pour le moment, de réunir à nouveau le CSE. Or sans réunion du CSE, il n’est pas possible de modifier les textes présentés.
Sur le lycée professionnel
L’autre réforme importante c’est celle du lycée professionnel. Les textes ont été rejetés eux aussi à l’unanimité (58 vis contre, 18 abstentions, 0 pour) par le CSE le 8 janvier. Mais là c’est pire : avant de partir A Oudéa-Castéra, sous la signature du seul Dgesco, a fait publier les textes au Journal officiel du 3 février. Malgré le rejet massif en CSE, la nouvelle ministre ne s’est pas davantage engagée à revoir ces textes.
« Nicole Belloubet lance des signaux pour dire qu’elle écoute. Mais cela ne pourra pas suffire », nous dit Sophie Vénétitay. Il lui est évidemment difficile d’assumer des textes aussi unanimement rejetés. Mais la convocation d’un nouveau CSE pour négocier de nouveaux textes n’est pas pour le moment annoncée. L’unanimité des organisations syndicales a t-elle une chance de faire évoluer la situation ? Ou les syndicats devront-ils appeller à de nouvelles mobilisations ?
François Jarraud
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