« Les enseignants deviennent plus souvent directeurs que les enseignantes », écrit Marie Lebaudy, de la DEPP, dans une note sur les directions d’école. « Néanmoins la part des femmes directrices dans les petites écoles est proche de celle des femmes qui enseignent dans le premier degré. Dans les territoires ruraux où les petites écoles sont concentrées, les directeurs sont aussi plus jeunes… En milieu urbain et en éducation prioritaire, les écoles sont plus grandes et dirigées par des enseignants plus expérimentés ».
La France compte 48 950 écoles du premier degré et 47 596 directeurs d’école qui sont totalement ou partiellement déchargés d’enseignement en 2021-2022. « 43 418 exercent dans le secteur public, parmi eux 6 675 sont affectés au réseau d’éducation prioritaire et 4 178 dans le secteur privé sous contrat » détaille la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance.
Plus il y a de décharge, moins ce sont des directrices
Si le métier de professeur des écoles est largement féminisé – en 2021-2022, 86 % des enseignants du premier degré sont des femmes dans le secteur public, elles sont 81% à assurer la fonction de directeur et à enseigner simultanément (directeurs- enseignants) et 59% à être totalement déchargées. « La proportion des femmes parmi les directeurs totalement déchargés a connu une augmentation de plus de six points depuis 2015-2016, de quatre points pour les directeurs-enseignants… Dans le secteur privé sous contrat, la population des enseignants du premier degré est encore plus féminisée (92 % sont des femmes) que dans le secteur public. Cette proportion est de 83 % chez les directeurs-enseignants, et de 69 % chez les directeurs totalement déchargés ». Dans le public, 11 % des femmes professeures des écoles exercent donc des fonctions de directrice, 16% des hommes.
Les femmes, moins nombreuses à prendre des fonctions de direction d’école, sont plus souvent directrices dans les plus petites écoles où elles touchent des indemnités et primes moins importantes. « Plus le nombre de classes de l’école est important, plus le parcours professionnel évolue vers de nouvelles missions (moins d’enseignement et plus de direction d’école) et des niveaux de rémunération plus importants, plus la part des femmes diminue, même si elles restent majoritaires ».
Concernant les taux de décharge dans les écoles publiques, 34 % des directeurs d’école n’ont aucune décharge d’enseignement ou sont très faiblement déchargés, 38 % ont un quart de leur temps en décharge d’enseignement, 18 %, un tiers ou la moitié, 10 % sont fortement ou totalement déchargés d’enseignement. « La part des femmes diminue lorsque la quotité de décharge augmente. Ainsi, les directeurs d’école sont 2,6 fois plus souvent totalement déchargés d’enseignement que les directrices d’école (17 % contre 7 %) » détaille l’autrice de la note qui précise que les résultats sont analogues dans le privé sous contrat. « Dans le secteur public, entre 2015-2016 et 2021-2022, la proportion de directeurs faiblement ou pas déchargés (1/4 de leur temps ou moins) a baissé de près de 9 points au profit de décharges plus importantes. Dans cette même période, la part des directeurs totalement déchargés a augmenté de près de 4 points. C’est pour les directeurs du public en éducation prioritaire que les évolutions sont les plus importantes ». Cette hausse des décharges s’explique – au-delà des aspects réglementaires – par les mesures de dédoublements de classe mises en œuvre depuis 2017 en éducation prioritaire qui « ont induit mécaniquement une hausse du nombre de classes dans ces écoles et par conséquent du volume des décharges ».
La Depp décèle une « variété de « profils » de directeurs d’école. « Ce qui différencie le plus les directeurs du secteur public entre eux est le nombre de classes de l’école qui est très lié au type de territoires et induit des conditions d’accès à la fonction différentes et une diversité des approches du métier de directeur ». 97% des directeurs d’une école d’une classe, généralement des directrices, n’ayant pas de décharge, se situent en milieu rural. « Plus les écoles sont grandes, plus les directeurs exercent en milieu urbain, en éducation prioritaire… plus ils sont expérimentés et plus la part des hommes augmente ». 55 % sont totalement déchargés d’enseignement et 39 % le sont la moitié de leur temps. « La fonction de directeur recouvre alors des missions larges dans des écoles de dix classes ou plus, davantage classées en éducation prioritaire (39 % des directeurs), et qui comportent fréquemment des classes d’inclusion ou d’adaptation (41 %) ». « Les directeurs d’école totalement déchargés sont plus âgés et ont davantage d’ancienneté dans le métier que les directeurs-enseignants, qui sont eux-mêmes plus âgés et plus expérimentés que l’ensemble des enseignants du premier degré », explique le service statistique du ministère.
Concernant les conditions d’exercice, les directeurs totalement déchargés dans les écoles de grande taille estiment « manquer de temps moins fréquemment que les autres directeurs : si un tiers seulement jugent disposer de temps suffisant, ce n’est le cas que de 18 % des autres directeurs ». « Même s’ils se sentent davantage reconnus par les parents d’élèves et par l’institution que les autres directeurs, ils se déclarent plus fréquemment victimes de violences, notamment de la part des parents d’élèves ».
Quant à la formation continue, « les directeurs totalement déchargés sont moins nombreux que les directeurs-enseignants à avoir suivi au moins un module de formation continue en 2021-2022 – 70 % contre 88 % et 87 % pour l’ensemble des enseignants du premier degré ».
Lilia Ben Hamouda