Un jeudi sur deux, Daniel Gostain, enseignant et Jacques Marpeau, docteur en sciences de l’éducation, nous proposent de décortiquer certaines notions pour en faire un sujet de réflexion, pour ouvrir le débat, afin de mettre en relief les enjeux qui découlent de leur utilisation.
Sous la notion de profession se cache un enjeu très précis d’autonomie de l’acte professionnel. Les professions se réfèrent à un ensemble de connaissances qui nécessitent une formation généralement longue, en lien avec un corps professionnel qui se porte garant du corpus de connaissances.
Une profession se professe alors qu’un métier se pratique, et ces deux notions-là ne sont pas du tout de mêmes natures.
La pratique s’apprend par l’apprentissage, donc par le passage par des procédures efficaces de transformation d’une réalité matérielle. Il y a dans la pratique d’un métier une capacité de maîtrise de l’objet transformé. Or, dès qu’on travaille avec l’humain, si on prétend transformer l’humain de l’extérieur de lui-même, on est dans le formatage, dans quelque chose qui est de l’ordre du conditionnement opérant, ce qui devient complètement déshumanisant. On est dans la taylorisation, ce qui est d’ailleurs la préconisation de l’idéologie néolibérale.
Alors que pendant les années de 1970 à 2000, on parlait de professions éducatives, on parle maintenant, de métiers, même plus des métiers de l’éducation mais des métiers du social. Une très grande différenciation est à opérer entre les deux termes : quand on travaille dans les professions de l’humain, on travaille dans la démaîtrise, c’est-à-dire dans quelque chose dont on n’est pas maître du résultat, puisque c’est la personne elle-même qui élabore ce qu’elle est en train d’advenir.
On comprend bien que des gestionnaires, des responsables administratifs et des DRH veulent maîtriser le résultat de l’opération. On est alors dans l’idéologie néolibérale du projet, dans lequel on n’a plus nécessairement de visée, mais où on doit aboutir à un résultat qui est prévu d’avance.
Une parole de Jacques Marpeau transcrite par Daniel Gostain