Le raconte-tapis, ou encore Tapistoire, pour certains, cela ne signifie pas grand-chose mais pour grand nombre d’enseignants et enseignantes de maternelle, c’est un excellent outil pour que les élèves de petites et moyennes sections entrent plus facilement dans le langage. Écouter une histoire, c’est bien mais tous les élèves n’en saisissent pas forcément le sens. Le raconte-tapis est là pour donner vie aux personnages et à l’action comme l’explique Myriam Bonetti, connue sous le pseudo Mymygo Metresse sur Facebook, enseignante à la maternelle du Vieux Moulin à Rosières aux Salines (54).
Professeure des écoles depuis 29 ans, dont 27 en classe de petite section, Myriam enseigne dans une petite école rurale de Meurthe et Moselle. Soucieuse depuis toujours de se réinventer et consciente des difficultés de ses élèves à appréhender les histoires lues et travaillées en classe, c’est il y a six ans, lors d’une longue convalescence qu’elle a découvert le raconte-tapis, « J’ai eu le temps de farfouiller sur le Net pour chercher des idées, de nouvelles choses pour progresser dans ma pratique pédagogique, pour me renouveler ». Elle découvre ainsi le travail d’Anne Guérin, créatrice de raconte-tapis, « une magicienne, une fée des doigts… Un vrai déclic pour moi ! » raconte Myriam.
Un support pédagogique fait maison digne d’un expert-couturier
Autodidacte, elle touche à une machine à coudre pour la première fois en 2015, avec « l’envie de me lancer, d’oser. J’ai pris quelques cours de couture pour apprendre à dompter la bête et j’ai cousu mon premier raconte-tapis, Boucle d’Or et les 3 ours, grâce aux livres d’Anne Guérin ».
Mais qu’est-ce donc que le raconte-tapis ? C’est un support en tissu, en feutrine ou toute autre matière textile. Les personnages, qui viennent garnir le support, sont cousus mains – même si certains utilisent des peluches. Un travail d’expert-couturier dans lequel se lancent avec bonheur des milliers d’enseignants et enseignantes de maternelle. Un support qui « permet de conter une histoire issue d’un album de façon complètement différente » explique Myriam.
Un collectif d’entraide sur Facebook
Riche de son expérience, en 2017, elle ouvre un groupe Facebook, « Tapistoires en maternelle… Et l’imaginaire prend vie », qui ne réunit pas moins de 1371 membres. Un groupe où enseignants, enseignantes, professionnels de la petite enfance échangent, partagent, s’entraident… Un groupe grâce auquel les moins téméraires osent se lancer dans l’aventure, riches des conseils de leur collègues. Comme Delphine qui poste des photos, « mon tout premier Tapistoire qui m’a bien occupée ce weekend… Manque la moufle et ce sera prêt pour mes petits élèves ». Ou encore Laurence qui se lance dans l’aventure, « je viens de recevoir une machine à coudre et j’aimerais acheter des assortiments de tissus texturés, pouvez-vous me dire où en trouver ? ». Un groupe avec plein de « fées des doigts » comme aime à les appeler Myriam.
Un support pédagogique qui donne vie aux histoires
Pourquoi Tapistoire et non raconte-tapis ? « J’ai choisi d’appeler mes raconte-tapis des Tapistoires parce que mes PS les appelaient ainsi. C’est sans doute plus simple à prononcer pour eux ». Et lorsque l’on voit ses élèves à peine âgés de trois ans pour certains se ruer vers le coin regroupement, les yeux pétillants lorsque Myriam prononce Tapistoire, on se doute bien que c’est un moment privilégié. « Pour mes petits élèves, le mot Tapistoire est synonyme de magie, de plaisir, d’émotions… ».
Pédagogiquement, travailler sur un raconte-tapis n’est pas anodin, d’autres enseignants et enseignantes utilisent les boîtes à histoire dont l’effet est quasi similaire. Le Tapistoire « permet de rendre une histoire vivante. Une histoire version Tapistoire prend vie. Les personnages parlent, ils bougent, il y a interaction avec mes PS, ça devient concret, vivant… C’est un super outil de manipulation pour les plus introvertis, ils participent plus, ils comprennent mieux une histoire. J’utilise aussi le Kamishibaï, complémentaire tout en étant différent. Une même histoire peut donc être lue, contée, théâtralisée… Les possibilités sont multiples et ça favorise la curiosité, la compréhension, le langage de mes PS ».
Aujourd’hui, Myriam possède plusieurs Tapistoire qu’elle utilise chaque année avec ses élèves. « J’en ai cousu une dizaine et j’en ai un très précieux, « les 3 petits cochons ». C’est le cadeau d’une mamie d’élève. Elle l’a cousu pour moi et la classe. J’ai ressenti une grande émotion quand elle est venue le conter en classe et quand elle me l’a offert à la fin de la matinée ».
Tapistoire, raconte-tapis boites à histoires … sont autant d’outils précieux que se construisent les enseignants et enseignantes du premier degré, avec leur propres moyens, leurs petits doigts et leur grande imagination. Le langage, au cœur des apprentissages de l’école maternelle, nécessitent qu’ils se réinventent au quotidien. Un challenge accepté par la très grande majorité d’entre eux.
Lilia Ben Hamouda