Comment rendre les élèves créatif avec le numérique ? Eric Gillon, enseignant de mathématiques au lycée Marlioz d’Aix-les-Bains utilise un logiciel simulant un synthétiseur pour aborder la programmation au lycée. L’idée est de « composer de la musique 8 bits des jeux des années 80 ». Les productions des élèves sont soumises ensuite au vote du public. Comment se déroule cet atelier ? Entretien avec Eric Gillon retenu pour la 9ème édition du forum des enseignants.
Pourquoi relier la musique et l’informatique?
Mon objectif était de relier l’informatique à des notions plus concrètes et en particulier du domaine de la création assistée par le numérique. La musique est un domaine où l’informatique peut intervenir et qui est peu connu du grand public. Il restait à lever une contrainte, comment faire pour que tous les élèves puissent s’emparer de ce travail quelques soient leur connaissance en musique.
Quel logiciel utilisez-vous ? Pourquoi ?
Pour cette séquence j’ai utilisé Sonic PI, ce logiciel permet de simuler un synthétiseur entièrement basé sur la programmation dans un langage dédié. L’avantage est qu’il n’y a pas besoin d’avoir de connaissances dans un instrument ou de la dextérité car il « suffit » d’écrire dans un langage spécifique l’enchaînement des notes souhaitées, leurs durées, amplitudes, etc. Il propose un didacticiel de prise en main fonctionnel qui permet aux élèves très rapidement de s’approprier des exemples, de les modifier puis d’écrire aux mêmes leur partition.
Que font les lycéens au cours des séances ? Comment évaluez-vous leur travail ?
L’objectif final est de composer une musique à partir de ce logiciel dans l’esprit de la musique 8 bits des jeux des années 80. Après avoir découvert ensemble cet univers, les fondamentaux du solfège puis les rudiments du logiciel, nous avons élaboré un cahier des charges commun. Puis en autonomie les élèves ont composé chacun leur morceau, mais toujours avec cet esprit d’entraide, particulier à l’informatique.
N’ayant aucune compétence particulière pour évaluer leur travail de composition, j’ai sollicité la communauté pour départager les productions. Les extraits ont été mis sur Internet et ceux qui souhaitaient participer devaient choisir leur morceau préféré correspondant au thème choisi. Une des compositions a remporté ce vote du public assez nettement.
Ces lycéens envisagent-ils ensuite la spécialité ISN (informatique et science du numérique) en terminal ? Avez-vous une formation particulière pour mener ce projet ?
Il s’agit d’un enseignement d’exploration de seconde, il ne peut donc servir à l’orientation et n’a pas vocation à servir de pré-recrutement pour la spécialité ISN en TS. Découvrir l’univers de l’informatique, s’initier à la programmation, la création numérique, les enjeux du monde numérique, acquérir des compétences numériques pour le citoyen sont nos objectifs pour cet enseignement. Pour ma part, je suis plutôt autodidacte dans ce domaine, mais j’ai passé l’habilitation pour enseigner ISN il y a quelque temps déjà.
Quelle est l’implication de la direction académique du numérique de Grenoble ?
Le DAN de Grenoble et les IPR en charge de ce dossier avec qui je travaille, promeuvent cet enseignement et favorisent les échanges de pratique entre les professeurs qui assurent cet enseignement et qui proviennent de différentes disciplines. La mise en place d’un enseignement facultatif en première et terminale l’année prochaine nécessite l’implication et donc la formation d’autres enseignants, pour pouvoir développer et assurer ces enseignements.
Quel bilan tirez-vous de votre participation au forum des enseignants innovants ? D’autres projets à venir ?
C’était ma première participation à ce forum, je découvrais donc son fonctionnement et sa richesse. Des idées, des initiatives, des projets tous portés par des collègues investis et qui croient en l’école (jeu de mot avec la vidéo produite pendant ce forum). C’est motivant ! Reste à trouver comment propager ces pratiques innovantes et les rendre pérennes.
Pour cette année, je travaille sur l’intelligence artificielle on en parle beaucoup avec les voitures connectées. Je vais proposer à mes élèves ce travail courant avril. Après les avoir fait réfléchir sur « monteriez-vous dans une voiture qui peut vous sacrifier pour minimaliser les conséquences d’un accident ? », découvrir les tests de Turing permettant de savoir si on a à faire à une IA ou à une vraie personne, nous irons ensuite programmer en langage JAVA une IA d’un robot de combat. L’objectif pour les élèves sera de réussir à battre l’IA de leur professeur sur un champ de bataille virtuel puis de défier d’autres IA de ce jeu en réseau…
Entretien par Julien Cabioch