Pendant trois jours à Leucate, tout le monde a des ailes : les mouettes, les éoliennes, les kitesurfs et les enseignants. Pendant trois jours à Leucate, 380 profs des écoles prennent de la hauteur et observent leur métier avec les 25 chercheurs présents. Pendant trois jours à Leucate, entre ciel et mer, 380 profs des écoles discutent, réfléchissent, boivent un verre, écoutent, s’interrogent, courent sur la plage, prennent des notes, lisent, vont se baigner, reviennent, écoutent encore, repartent, questionnent… Ils sont dans leur métier autrement. Ils le pensent tous ensemble en s’appuyant sur la recherche. Et on dirait bien que ça les enchante !
Pendant trois jours à Leucate, le SNUipp fait le pari de l’intelligence… et le gagne.
Le programme de cette Université 2016 rassemble les interrogations qui analysent le système scolaire avec ses points de vue disciplinaires, sociétaux, pédagogiques. Les intitulés des conférences mettent en lumière les enjeux et les urgences : Laïcité, Pauvreté, Éducation Prioritaire, Formation des enseignants, Éthique, Art, Espace, Littérature, Nouveaux Programmes. Dans leur diversité, ces thèmes de travail construisent cette pensée collective de l’école faite de quotidien, de convictions, de doutes, d’engagement, de recherche et d’inventions : une pensée en marche, forcément.
Mais que viennent-ils donc chercher ici ces enseignants qui devraient être en vacances ?
Rencontre entre Nolwenn, toute jeune enseignante d’Ile et Vilaine et quatre enseignantes plus expérimentées, venues de Gironde : Hélène enseignante en petite section, Annie en moyenne/ grande section et Nicole, directrice en élémentaire.
Hélène vient chercher au SNUipp ce que l’institution ne donne pas : la formation. Annie constate que la formation est réduite à des petites animations pédagogiques qui ne débouchent pas sur une véritable réflexion. « Ici, on rencontre des chercheurs pointus sur les questions d’éducation. La réflexion s’inscrit dans la durée et dans une vision de l’école, de l’enfant et de ce que doit être le métier. Cette vision que l’on partage à Leucate n’est pas forcément en adéquation avec ce que dit l’institution. Elle est intéressante parce qu’elle apporte de la controverse ». Nicole pense « qu’elle nourrit nos pratiques d’enseignantes et de syndicalistes.
Hélène : « Je suis persuadée qu’un syndicaliste est aussi un pédagogue et que l’on ne peut pas faire du syndicat si l’on ne sait pas parler de son métier ».
Nicole : « J’ai besoin de cette dimension pour impulser avec mes collègues la nécessaire mutation de l’école, pour faire avancer les pratiques innovantes, car les enseignants sont démunis, manquent de lien avec la recherche. Venir à Leucate permet de mieux faire face aux questions difficiles de l’école.
Nolwenn est venue la première année de son entrée dans le métier. « Je n’avais pas tous les outils pour exercer mon métier et il y a quatre ans, je suis venue à l’Université d’Automne, chercher de la ressource pour ma classe. A Leucate, j’apprends à avoir un regard sur ma pratique. Ces quelques jours me regonflent, me donnent envie, me rassurent. Depuis, je viens tous les ans et je ne me pose même plus la question. C’est une évidence.»
Et toutes les quatre s’accordent à dire qu’il y a à Leucate, une ambiance « qui fait du bien ». « On se retrouve pour se remonter le moral dans ce métier de plus en plus difficile. On arrive à mettre des mots sur les grandes dimensions de l’école, à mieux formuler pourquoi on est enseignantes. Les chercheurs sont proches, on parle avec eux, c’est particulier. C’est un moment chaleureux. Cet aspect détendu, convivial fait partie de l’Université d’Automne.
Si ça n’était pas comme ça, on ne reviendrait pas.
Michèle Vannini