Et si les élèves apprenaient aussi à être? Aurélie Badard a en charge la section de découverte professionnelle DP3 dans son établissement. Professeure au collège Georges Charpak de Brindas (69), un collège périurbain d’une banlieue plutôt favorisée de Lyon, elle anime une section DP3 qui est vécue par les élèves et leur famille comme une opportunité. Entre visite et visiteurs, les élèves apprennent à poser la question du genre et celle du fonctionnement de l’entreprise. Comme enseignante, c’est là qu’elle se sent la plus utile.
Est-il vraiment utile de poser la question de leur métier à de jeunes collégiens ?
La connaissance du monde de l’entreprise fait partie de la culture générale que les élèves doivent acquérir. On ne leur demande évidemment pas de choisir un métier et d’aller en professionnel à la sortie de la troisième. D’ailleurs la majorité de ces élèves vont en seconde générale. Mais on les invite à découvrir différents métiers, à chercher s’ils ont des affinités. Ils vont en seconde générale mais ils ont au mois réfléchi à leurs compétences. D’ailleurs, dans le collège, la section DP3 n’est pas réservée aux élèves fragiles. Elle est ouverte à tous.
Comment fait-on pour faire découvrir les métiers ?
Ca passe d’abord par l’utilisation du numérique. Les élèves utilisent les bases Onisep. Ils réfléchissent ainsi par exemple le genre des métiers, c’est à dire le fait que les métiers sont ouverts aussi bien aux femmes qu’aux hommes. C’est important. On fait aussi venir des intervenants qui évoquent leur travail. Chaque rencontre donne lieu à un article rédigé par deux élèves sur le blog de la section. Ces rencontres sont toujours des moments intéressants et riches pour les élèves. Ils découvrent par exemple que tous les emplois sont importants dans une entreprise. On peut aussi monter une mini entreprise avec les élèves.
Mais comment trouvez-vous ces intervenants ?
Il y a la débrouille : on joue sur ses relations, sur les parents d’élèves. On utilise aussi la mission école entreprise de l’académie qui est en relation avec de nombreuses entreprises.
Enfin il y a des sorties ?
Les élèves visitent des entreprises. Ils vont au « Mondial des métiers ». Ils visitent aussi des lieux de formation : CFA, université. Ca leur montre qu’au sein d’une filière économique il y a des entrées à différents niveaux de formation.
C’est une activité chronophage pour l’enseignant ?
Ca demande de la préparation. Mais je ne me suis jamais sentie aussi utile comme enseignante que dans cette section DP3. On participe à la construction d’un parcours personnel des élèves qui aboutit à des choix d’orientation.
Le travail en DP3 rejaillit-il sur les disciplines obligatoires ?
Les jeunes sont évalués dans le cadre de la DP3 pour le B2i tout comme pour certains items du livret de compétences qui traitent du savoir être. Les élèves apprennent à accueillir et dialoguer avec des intervenants extérieurs, à les remercier. Ce sont des compétences utiles. Mais c’est bénéfique encore plus globalement. Quand on a des jeunes pas très scolaires, si on leur propose quelque chose de différent où ils réussissent, forcément cela a un impact. Les élèves gagnent en confiance. Cela change aussi l’image qu’ils peuvent avoir des enseignants.
Ce n’est pas dangereux de faire entrer les entreprises dans l’école ?
Il faut que cela soit cadré par l’institution. Mais la création du Conseil national éducation économie montre qu’il y a une volonté politique d’aller dans ce sens. L’école a déjà trop tendance à être un vase clos. Quand on a 10% de chômeurs on peut difficilement faire l’impasse sur la question de l’insertion professionnelle.
Propos recueillis par François Jarraud