Par François Jarraud
Où en est la scolarisation des élèves à profil particulier ? L’inspection générale consacre son rapport annuel 2009 à répondre à cette question en observant les Réseaux ambition réussite (RAR), l’intégration des enfants handicapés, celle des « ENAF » (nouveaux arrivants) ou des internats réussite. Le chapitre le plus sévère concerne la scolarisation des enfants gitans où l’Inspection dénonce une ségrégation qui produit de l’échec scolaire.
Qui a dit que tous les rapports de l’Inspection générale sont retenus ? Le Rapport annuel 2009 vient de trouver le chemin de la sortie. Intitulé « vers une Ecole de l’inclusion » , il passe au crible les dispositifs concernant des groupes d’élèves à intégrer. Et il nous offre quelques formules comme seule l’Inspection sait faire.
S’agissant des Réseaux ambition réussite (RAR), les inspecteurs jugent sévèrement l’empilement des dispositifs et le pilotage académique. « L’examen de la situation dans plusieurs académies, parmi lesquelles celles de Rouen, Créteil, Paris ou Grenoble, fait apparaître qu’il n’y a pas de corrélation entre l’importance numérique des RAR dans une académie et l’engagement du projet académique dans le soutien de la politique ambition réussite ». Mais ils s’en prennent au dispositif d’enseignants référents. » On constate souvent que le recrutement obéit moins à une vocation réelle ou à des compétences appropriées qu’à des demandes de mutation pour convenances personnelles ou après accord interne avec l’établissement. C’est pourquoi il arrive qu’on trouve nommés non pas des enseignants titulaires, mais de simples titulaires sur zone de remplacement (TZR). Le degré d’adéquation entre les besoins du réseau et les professeurs référents recrutés n’est, dès lors, pas homogène dans tous les RAR ». Du coup ses fonctions varient énormément d’une académie à l’autre. Sur le plan pédagogique, l’individualisation « s’inscrit dans la remédiation et non dans les situations d’apprentissage au coeur de la classe… Les enseignants sont par conséquent tout à fait démunis devant l’exigence d’une pédagogie différenciée ». Avec une exception, l’EPS qui est salue par les inspecteurs comme une discipline vraiment transdisciplinaire.
Les dispositifs d’excellence, qui se sont multipliés sous le quinquennat Sarkozy, sont jugés positivement sauf sous l’angle financier. Ainsi à propos des internats de réussite éducative, le rapport la mission constate que « le dispositif IRE est susceptible d’apporter une réponse adaptée à des enfants très jeunes ou en très grande difficulté. L’engagement des acteurs est à cet égard significatif et permet de contribuer très sensiblement à résoudre des situations très délicates conduisant souvent les jeunes concernés vers des impasses. On peut cependant regretter que le coût en soit non seulement élevé, mais surtout insuffisamment contrôlé ». Même remarque sur les internats d’excellence. Le summum est atteint par la Classe de préparation à l’enseignement supérieur du lycée Henry IV dont le coût pour l’Etat correspond à une année de CPGE (on sait que c’est l’enseignement le plus onéreux de l’éducation nationale) plus une centaine de milliers d’euros fournis par des mécènes privés.
La scolarisation des élèves handicapés est observée de très près 4 ans après la loi de 2005 comme un défi culturel pour l’Education nationale. Pour l’Inspection, » la mise en oeuvre de la loi implique surtout un changement de posture générale pour l’ensemble des acteurs du système éducatif. Ceux-ci doivent s’efforcer, en particulier, de considérer l’enfant handicapé comme un élève capable de réussir et, plus encore peut-être que pour les autres jeunes, d’anticiper sur son avenir… De plus, il leur est nécessaire d’apprendre à travailler avec de nouveaux partenaires ». Le pilotage académique leur semble insuffisant.
Les enfants gitans ségrégés. Si un flou certain règne, aux yeux de l’Inspection, dans la scolarisation des ENAF (élèves nouvellement arrivés en France) et dans leur orientation, le chapitre dédié aux enfants gitans résonne évidemment avec l’actualité. Si l’Inspection se pose la question de leur singularité elle dénonce leur ségrégation. » Très souvent, les élèves de famille gitane souffrent d’une ségrégation objective résultant des dispositifs ou des structures élaborés pour résoudre des difficultés pédagogiques. Dans les écoles, la ségrégation préexiste du seul fait qu’elle se trouve en un lieu déjà ségrégatif. Il n’en va pas de même dans les collèges, pour les raisons inverses : la population gitane y est très minoritaire et, dès lors que ses effectifs sont significatifs, la ségrégation y est quasiment la règle. Les élèves de famille gitane appellent d’emblée un traitement à part : l’étude n’a pas relevé d’établissements dans lesquels les difficultés pédagogiques les concernant soient abordées exclusivement comme des difficultés pédagogiques associées. Même si celles-ci sont corrélées à des difficultés relevant de la grande pauvreté ou de l’intégration, on ne manque jamais de les associer, de façon inégalement fondée, à des manières de vivre, à des stéréotypes, voire à des préjugés. Tantôt il y a des classes gitanes, non reconnues comme telles ; tantôt on évite de créer ces classes et on disperse les élèves de famille gitane : ce refus délibéré de les distinguer les identifie tout autant ».
« Dans certains collèges recevant une population gitane importante, on note que des SEGPA, où sont concentrés les enfants de famille gitane, ont été spatialement séparées du reste du collège pour éviter des incidents, au prétexte des comportements inadaptés ou asociaux de certains élèves », écrit l’Inspection. « La ségrégation pédagogique soutient la ségrégation spatiale des individus. On observe ainsi une multiplication de dispositifs, au statut administratif incertain, prenant en charge les difficultés scolaires d’une population exclusivement gitane. On peut s’interroger sur la réalité pédagogique du critère qui fait entrer tel enfant dans ce genre de dispositif volatile, lié aux personnes, à leur bonne volonté et à des financements peu pérennes. Il est à craindre un effet pervers de telles dispositions, partant certes de la difficulté scolaire constatée, mais ayant aussi pour effet de la produire. » On ne saurait être plus clair.
Alors que l’Inspection n’a pas fait de recommandations dans les chapitres précédents, elle prend position sur l’alphabétisation des gitans. « L’alphabétisation des enfants de famille gitane implique : de reconsidérer le statut scolaire des langues maternelles et de les faire vivre dans l’espace scolaire, pour que les élèves deviennent bilingues sans dévaloriser leur propre langue et prennent conscience, dans leur langue maternelle, des caractéristiques de celle-ci qui sont susceptibles d’être transférées dans une culture écrite. ; de mettre en place un enseignement systématique du français oral susceptible de permettre une bonne intercompréhension entre le maître et les élèves et, dans les cas de structures non ségrégatives et linguistiquement hétérogènes, des élèves entre eux ; de mettre en place un enseignement du français langue de scolarisation jusqu’au moins à la fin du 2e cycle de l’école primaire pour les élèves ayant fait une scolarité complète depuis la maternelle avec ce nouveau type de prise en charge, jusqu’à la fin de l’école primaire pour les autres ». Un effort qui doit être prolongé à l’école et au collège.
Le rapport de l’Inspection
http://lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr/cgi-bin/brp/telestats.cgi[…]
Gueule de bois en Grande-Bretagne : Le pays découvre une école inégalitaire
Après des années de politique de lutte contre les inégalités, l’Ecole britannique cumule toutes les tares inégalitaires. C4est ce que révèle un rapport de la commission sur l’égalité et les droits de l’Homme publiée le 10 octobre.
Selon elle, l’école britannique reste inégalitaire selon le genre, la classe sociale et la race. L’inégalité des genres se voit dès 5 ans où 53% des garçons mais 72% des filles atteignent un bon niveau. Les garçons ont 3,5 fois plus de chances de se faire exclure de l’école que les filles… L’inégalité « raciale » est marquée aussi par les statistiques britanniques qui relèvent que les « noirs » des Caraïbes ont 3 fois plus de chances de se faire exclure que la moyenne des élèves. L’inégalité sociale apparaît aussi quand on sait qu’un tiers des enfants des familles défavorisées atteignent un niveau suffisant à 5 ans alors que la moitié y échoue. Tous ces résultats font débat dans la presse britannique.
Le rapport
http://www.equalityhumanrights.com/
L’Ecole peut-elle lutter contre les inégalités sociales ?
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/laclasse/Pages/2010[…]
Sommaire
Annoncé depuis plusieurs semaines, le rapport sur les discriminations a finalement été publié par le ministère le 24 septembre. Le texte s’appuie sur les informations des associations. Il préconise un effort de formation des enseignants, un travail sur l’orientation, des expérimentations. Des propositions qui seront probablement considérées comme insuffisantes par les acteurs de l’Ecole.
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Alors que de nets progrès ont été faits dans l’éducation depuis les années 1970 (doublement du nombre d’enfants scolarisés au primaire et au secondaire), moins de 40% des pays ont atteint la parité. C’est la principale information de l’édition 2010 de Recueil de données mondiales sur l’éducation de l’Unesco. Selon l’Unesco, la moitié des pays n’atteindront toujours pas la parité en 2015.
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