Par Monique Royer
Que reproche-t-on à la formation continue ? Depuis quelques années, fleurissent les rapports qui dénoncent tantôt l’opacité du système, tantôt sa complexité voire son inefficacité.
« La formation professionnelle des adultes : un système à la dérive » annonçaient Pierre Cahuc et André Zylberberg dans leur rapport. L’année suivante, un colloque était organisé autour d’un rapport sénatorial sur la formation continue. « Les différents acteurs réunis (partenaires sociaux, représentants de l’ANPE, des chambres de commerce, de l’Afpa, du Cnam, des organismes collecteurs des fonds de formation, responsables politiques) semblaient à priori d’accord sur les constats. Plus de 150 000 jeunes sortent du système scolaire chaque année sans diplôme, la formation va majoritairement aux diplômés de l’enseignement supérieur travaillant dans des entreprises de plus de dix salariés. Il faut donc que la formation professionnelle continue s’adresse en priorité aux personnes qui ont besoin de se qualifier, dans une perspective d’employabilité c’est-à-dire de plus forte probabilité de conserver ou de trouver un emploi. », écrivions nous à propos de ce colloque.
Cet automne, le rapport de la Cour des Comptes sur la formation professionnelle dressait trois constats fort sombres « 1. Les formations sont largement inadaptées aux besoins des individus et des entreprises, qu’il s’agisse de la formation professionnelle initiale dont les résultats en termes d’insertion dans l’emploi sont insuffisants ou de la formation continue qui répond très imparfaitement aux difficultés des salariés peu formés ou mal qualifiés ; 2. Les financements sont abondants mais insuffisamment mutualisés, ce qui met d’autant plus en cause la pertinence du système actuel que celui-ci manque de transparence et fait apparaître des coûts élevés. 3. L’action des différents acteurs de la formation professionnelle est faiblement cohérente ; les cloisonnements du système, les insuffisances de son pilotage et la faiblesse des évaluations auxquelles il donne lieu, tant au niveau national que régional, rendent impossible la définition d’une stratégie partagée et compromettent l’efficacité d’ensemble des actions menées. »
Deux autres rapports sont venus parfaire le tableau, un sur la lisibilité de l’offre de formation et l’autre sur la VAE. Pour résumer succinctement cette avalanche de rapports, la formation professionnelle continue ne contribue pas assez à la qualification, et donc à l’insertion, des publics peu qualifiés. Son fonctionnement est opaque, cloisonné. L’offre de formation est trop abondante, amenant à des diplômes et des certifications trop nombreux pour qu’un quidam puisse d’y retrouver. Elle ne correspond pas toujours au besoin réel et ne vise pas assez la qualification sans que pour autant le renforcement des compétences de base soit suffisant ! N’en jetez plus !
Pourtant la dernière réforme de 2004 avait amené de nouvelles approches comme le droit individuel à la formation et des modalités de professionnalisation plus étendues. Du côté des conseils régionaux, instigateurs des politiques de formation, des initiatives sont menées pour coordonner les efforts sur le territoire pour améliorer le niveau de qualification en adéquation avec les besoins du tissu économique. L’ingénierie de formation, l’individualisation, des modalités de formation souples avec les Foad, permettent aux organismes de formation d’adapter leur offre. Alors, pourquoi tant de récriminations ?
On demande sans doute beaucoup à la formation professionnelle continue : à la fois accompagner les évolutions de l’entreprise, les anticiper et, dans un même temps, résoudre les problèmes d’insertion des demandeurs d’emploi, surtout des plus éloignés de l’emploi, par la qualification. Or, les solutions miracles ne pourront être trouvées sans relier par une passerelle infaillible la formation initiale et la formation continue dans une véritable perspective d’éducation et de formation tout au long de la vie. La notion de compétences de base est incontournable pour pouvoir se former dans une perspective d’insertion professionnelle et cette problématique, la formation continue n’est pas en mesure de la résoudre seule.
Le nouvel accord national interprofessionnel sur la formation, élaboré par les partenaires sociaux, insiste sur la nécessité de former 500 000 salariés parmi les non qualifiés et 200 000 demandeurs d’emploi chaque année, convoquant autour de cet enjeu financeurs publics et privés. La réforme ira sans doute dans ce sens mais on attend aussi que les débats sur l’évolution du système scolaire s’attardent sur la nécessité pour l’individu de se former tout au long de sa vie et des initiatives mises en œuvre dès le plus jeune âge pour, qu’une fois adulte, on ait encore le goût et la possibilité d’apprendre.
Le rapport Pierre Cahuc et André Zylberberg
http://eurequa.univ-paris1.fr/membres/azyl/pdf/Cahuc Zylberbe[…]
Le rapport du Sénat sur la formation
http://www.senat.fr/rap/r06-365-1/r06-365-11.pdf
Le colloque du Sénat sur la formation professionnelle
http://cafepedagogique.net/lemensuel/lesysteme/Pages/2007/L[…]
Le rapport de la Cour des Comptes
http://212.94.176.83/Portals/57ad7180-c5e7-49f5-b282-c6475cdb7ee7/[…]
La liste des rapports accessibles sur le site de la Documentation Française
http://www.ladocumentationfrancaise.fr/rapports/actualite/format[…]
Les documents sur la formation de l’Association des Régions de France
http://www.arf.asso.fr/index.php/documents/formation_professionnelle
L’ani du 7 janvier 2009